Pourquoi Ottawa craint-il les partenaires fédératifs?

L’auteur réagit notamment à la réponse d’André Pratte sur le processus de nomination des sénateurs.
En décembre dernier, le gouvernement fédéral nous a offert de participer à un processus transitoire visant la désignation de candidats au poste de sénateur. Bien qu’il ait défini seul ce processus transitoire, il annonçait son intention de procéder ensuite par un mode différent et permanent qui tiendrait compte des propositions des provinces.
Bien que quelques provinces aient refusé ce processus, nous avons indiqué notre intérêt pour le processus permanent, en proposant la parité au comité indépendant de sélection des candidats et la participation du premier ministre du Québec, représentant légitime de tous les Québécois, au processus consultatif à l’égard des candidats retenus par le comité.
La ministre Monsef s’est engagée à analyser sérieusement notre proposition. En raison de cette ouverture, nous avons décidé de participer au mode transitoire. Dernièrement, la ministre Monsef nous a fait connaître son orientation : sans aucune justification, elle renonce à adopter un processus différent et rend permanent le mode transitoire. Dans ce contexte, et en toute cohérence, nous n’entendons pas participer à un processus qui ne nous offre pas un rôle significatif.
Absence
Certains regretteront que nous adoptions ainsi une stratégie de chaise vide. Pourtant, avant d’invoquer l’importance d’occuper la chaise plutôt que de la laisser vide, encore faut-il s’assurer qu’elle est convenable. Nous avons occupé la chaise transitoire, car elle ouvrait la possibilité d’un processus permanent qui s’inscrit dans l’esprit des demandes historiques du Québec. C’était une chaise convenable.
Maintenant que le gouvernement fédéral revient sur sa position, qu’il renonce à un mode permanent différent et, sans explication, qu’il rejette notre proposition, il n’y a plus de chaise convenable à occuper. Il ne fait aucun doute, dans notre esprit, que notre proposition ne nécessite pas de modification à la constitution.
Le premier ministre du Canada, sans modification à la Constitution, accepte de prendre conseil auprès d’un comité consultatif qui lui propose une liste de candidats, avant de recommander au gouverneur général la nomination des sénateurs. Dans ce contexte, il est difficile de prétendre que le fait de consulter le premier ministre du Québec à l’égard d’une ou de plusieurs personnes de cette liste constituerait un encadrement à ce point exigeant qu’il limiterait le pouvoir de recommandation du premier ministre du Canada.
Dialoguer
À moins, bien sûr, de mettre de côté les décisions de la Cour suprême du Canada, lesquelles appellent les partenaires fédératifs à collaborer. À notre avis, permettre un dialogue et des échanges entre les principaux représentants du gouvernement fédéral et du gouvernement du Québec répond certainement à cette nécessité de collaborer pour faire évoluer notre fédération et ses institutions.
Il n’est pas trop tard pour insuffler au Sénat une représentativité accrue des provinces. Pourquoi devrait-on craindre l’avis des partenaires fédératifs à propos d’une institution sensée tous les représenter ?