«Le Devoir» atteint l’équilibre financier

Contre toute attente, Le Devoir a dégagé un modeste surplus en 2015, résultat d’un effort collectif du personnel, des lecteurs, des bénévoles et des Grands Amis, qui ont tous à coeur la survie et l’essor de ce projet collectif.
Les mutations technologiques et la remise en question du modèle d’affaires des médias traditionnels continuent de susciter des remous dans les salles de rédaction, y compris au Devoir. Que ce soit à la radio, à la télévision, dans les quotidiens ou les périodiques, aucun média traditionnel n’échappe à une remise en question de ses façons de faire. La révolution numérique a démocratisé les moyens de production et la circulation de l’information, mais le déplacement des investissements publicitaires vers les médias numériques a engendré des pressions accrues sur les médias traditionnels.
Au Devoir, nous sommes contraints d’investir dans le développement de nouvelles plateformes tout en gérant la décroissance des revenus et du tirage dans l’imprimé. Nos résultats de 2015 sont le reflet de cette réalité complexe.
Les résultats
Les états financiers pour l’année terminée le 31 décembre 2015 affichent un résultat opérationnel négatif de 313 537 $. L’année précédente, nous avions enregistré un résultat négatif de 719 685 $. En ajoutant des produits financiers positifs de 29 932 $ et un apport considérable en dons de 360 099 $, nous en arrivons à des résultats avant impôts de 76 494 $. En soustrayant la charge d’impôts positive de 25 723 $, nous obtenons finalement, pour l’année 2015, un résultat net positif de 50 771 $, comparativement à la perte de 519 979 $ enregistrée en 2014.
Pour l’année qui vient de se terminer, les produits des activités courantes se sont élevés à 16 365 771 $, comparativement à 16 990 086 $ l’année précédente. Il s’agit d’une diminution de 3,7 %, principalement attribuable au recul des revenus publicitaires.
Les médias traditionnels, au Québec comme dans le reste de l’Amérique du Nord, connaissent depuis maintenant plus de dix ans une érosion constante de leurs revenus publicitaires. La chute est cependant plus brutale depuis quatre ans, alors que les investissements en publicité numérique ont rattrapé et dépassé les investissements en publicité dans l’imprimé.
Les revenus tirés de la diffusion du journal, toutes plateformes confondues, ont diminué de 1,1 %. La diffusion du Devoir, telle qu’évaluée par l’Alliance for Audited Media, une organisation indépendante, s’est établie pour l’année à 32 961 exemplaires en semaine et à 53 519 exemplaires pour l’édition de fin de semaine. Le Devoir comptait plus de 11 600 abonnés numériques au 31 décembre dernier. Selon les données de Vividata, Le Devoir est lu par un nombre cumulatif de 1,27 million de lecteurs toutes les semaines.
Dans un environnement difficile, Le Devoir a poursuivi encore en 2015 une stratégie de contrôle serré des dépenses. Elles étaient de 16 679 308 $, en baisse de 5,8 % par rapport à l’année précédente. Cette réduction significative des coûts est attribuable à des compressions importantes en interne et à un programme de départs volontaires. Tout le personnel non syndiqué, les cadres et les employés du syndicat de la rédaction ont connu, pour une deuxième année consécutive, un gel des salaires.
Les projets du Devoir
En 2015, Le Devoir a poursuivi le développement de son application tablette, compatible avec les systèmes d’exploitation IOS et Android. Une deuxième version de l’application a été lancée, en février dernier. L’interface est maintenant plus épurée, ce qui facilite le repérage et la lecture des contenus. Cette version améliorée permet une utilisation accrue des contenus multimédias (photoreportages, vidéos, extraits sonores, galeries de photos). L’application, développée à peu de coûts par rapport à nos concurrents, a gagné en fluidité et en vitesse de téléchargement, deux variables importantes sur les plateformes numériques.
Le Devoir continuera d’offrir un journal imprimé à ses lecteurs, et il profite d’ailleurs de la disparition d’un concurrent, en semaine, pour recruter de nouveaux abonnés. Le Devoir est maintenant disponible sur cinq plateformes différentes (papier, tablette, Internet, journal virtuel et mobile).
Il y a maintenant 13 ans, Le Devoir a mis en place un modèle de diffusion payant, allant à contre-courant d’une tendance à la gratuité des contenus dans l’univers numérique. Aujourd’hui, force est de constater que plusieurs médias ont adopté ou réfléchissent à l’idée d’un modèle d’affaires basé sur les abonnements. Dans la perspective de monétiser ses contenus par les abonnements payants, et d’accroître son achalandage par le partage et la circulation de contenus gratuits, Le Devoir a développé en 2015 un modèle de compromis : celui du mur payant. Nos abonnés ont toujours un accès illimité à nos contenus, tandis que les non-abonnés doivent se contenter de 15 articles gratuits par mois. Le Devoir fait le pari qu’il y a un marché et un public pour l’information de qualité, produite selon des exigences de rigueur, de diversité et d’indépendance éditoriale.
Depuis 1914, Le Devoir peut compter sur une « carte cachée », les Amis du Devoir, une société à but non lucratif dont la mission est d’apporter un soutien financier au quotidien et d’assurer sa pérennité. Le Conseil des Amis, présidé par Michel Petit, les administrateurs de la société et des bénévoles dédiés, au sein de la communauté d’affaires montréalaise, ont convaincu 200 donateurs de devenir des « Grands Amis » du Devoir, et de nous verser 1000 $ par année pendant trois ans. Cette campagne a permis d’amasser 200 000 $. Une deuxième campagne à l’intention du grand public (« Je soutiens Le Devoir »), réalisée de concert avec le Conseil des Amis et des membres du personnel, a permis de récolter quelque 160 000 $.
Au final, Le Devoir a récolté des dons de 360 099 $.
Ce soutien est précieux, et il nous permet d’envisager l’avenir avec plus d’optimisme qu’à pareille date l’année dernière. Les dons reçus par les « Grands Amis » sont utilisés pour notre virage numérique, entre autres pour améliorer l’application tablette et pour développer, l’automne prochain, une application pour le mobile.
Remerciements
L’année 2015 était la dernière de Bernard Descôteaux à titre de directeur, et de Josée Boileau à titre de rédactrice en chef. Ils ont joué un rôle de premier plan afin de maintenir la qualité du Devoir dans un contexte de rendement décroissant. M. Descôteaux a dirigé Le Devoir de 1999 jusqu’à son départ à la retraite, pleinement méritée, en février dernier. Il aura passé 42 ans de sa carrière au Devoir, en donnant le meilleur de lui-même et en portant le projet d’un journal indépendant jusqu’au bout de ses convictions.
L’équipe de direction est maintenant formée du nouveau directeur, Brian Myles, de la nouvelle rédactrice en chef, Luce Julien, de la vice-présidente au développement, Christianne Benjamin, de la vice-présidente aux ventes publicitaires, Lise Millette, et du directeur des finances, Stéphane Roger.
Mme Benjamin, Mme Millette et M. Roger ont assuré la stabilité de l’entreprise durant une année marquée par l’incertitude financière et le processus de sélection du nouveau directeur. Leur appui est précieux, tout comme l’est celui de tous les cadres, les membres du personnel syndiqués et non syndiqués et les collaborateurs. Tous les artisans du Devoir ont conscience de la situation financière délicate de l’entreprise. Ils s’acquittent de leur travail avec un indéniable dévouement qui impose le respect. Nous les en remercions.
Nous sommes également redevables de l’engagement bénévole du président du conseil d’administration du Devoir inc., Jean Lamarre, et des membres du conseil. Les derniers remerciements, et non les moindres, reviennent sans conteste aux membres du conseil des Amis du Devoir, et à leur président, Michel Petit. De concert avec les organisateurs bénévoles de la campagne des « Grands Amis du Devoir », ils nous ont permis d’entreprendre de nouveaux projets numériques.