La loi sur la prostitution doit être abrogée!

Mondialement, de nombreuses travailleuses du sexe bravent la stigmatisation quotidiennement, afin de défendre leurs droits fondamentaux.
Photo: Pedro Ruiz Le Devoir Mondialement, de nombreuses travailleuses du sexe bravent la stigmatisation quotidiennement, afin de défendre leurs droits fondamentaux.

Alors que des groupes antidroits célèbrent la première année d’application de la loi fédérale sur la « Protection des collectivités et des personnes victimes d’exploitation » et interpellent le gouvernement fédéral pour que celui-ci aille encore plus loin, il nous importe de faire le point sur ladite loi.

 

Violence, clandestinité et stigmatisation renforcée, augmentation des pratiques sexuelles à risque, dégradation des rapports avec les forces policières, peur de dénoncer les clients violents, précarité induite par une pression à la baisse sur les tarifs : voilà quelques-uns des effets néfastes de cette loi. Il faut le dire, cette loi ne criminalise pas le travail du sexe, mais toutes les mesures de sécurité sont criminalisées : interdiction pour les travailleuses et travailleurs du sexe (TDS) de travailler ensemble et à l’intérieur, de communiquer clairement avec les clients, en plus de criminaliser ces derniers.

À l’instar de l’Organisation mondiale de la santé, de l’ONUSIDA, du Programme des Nations unies pour le développement, de l’ONU-Femmes, de l’Organisation internationale du travail, de Human Rights Watch, d’Amnistie internationale, nous soulignons que la pénalisation du travail du sexe et par conséquent des clients renforce la précarité des conditions de travail des TDS. Par ailleurs, comme le souligne le SEFPO, les femmes autochtones, plus que toutes autres, sont particulièrement victimes des approches prohibitionnistes.

Notre gouvernement canadien, responsable du droit criminel, doit regarder de plus près les avis étayés des groupes susmentionnés (voir la liste des signataires) qui proposent une analyse planétaire non partisane et transversale de la prostitution. Une analyse qui prend en compte pauvreté, sexisme, racisme, colonialisme, homophobie et transphobie. Nous espérons donc que M. Trudeau résistera aux groupes refusant obstinément de tenir compte de ces avis et des paroles, des besoins et des solutions exprimés par l’ensemble des premières concernées. Mais surtout, nous nous attendons à ce que notre premier ministre respecte la décision de la Cour suprême du Canada, soit la décriminalisation du travail du sexe.

Mondialement, de nombreuses TDS bravent la stigmatisation quotidiennement, afin de défendre leurs droits fondamentaux. Elles exigent égalité, sécurité, dignité, santé et solidarité, ni plus ni moins. Bien qu’une minorité prohibitionniste soucieuse de défendre une vision manichéenne de la prostitution monopolise le débat public, nous croyons qu’il est impératif de se pencher sur l’importance de tenir compte de l’expérience et de l’expertise des premières concernées, qui sont les mieux placées pour exprimer la diversité de leurs propres expériences et définir les solutions politiques les plus appropriées à leur propre bien-être.

Après une décennie de politiques conservatrices, le premier ministre Trudeau semble incarner le vent de changement dont les TDS canadiennes avaient grandement besoin. Ce nouveau gouvernement saura, nous l’espérons, instaurer un état de droit concordant avec les décisions de la Cour suprême et honorant notre Charte des droits et libertés. Parce que nous sommes en 2015. Parce que les droits à la vie, à la santé, à la sécurité et à la dignité, ça concerne aussi les TDS.

*Signataires : Marylie Savoie, travailleuse du sexe, porte-parole de l’APAQ (Action Putes et Allié.e.s Québec), Anna-Louise Crago, travailleuse du sexe, Nadia, travailleuse du sexe, Maxime Durocher, travailleur du sexe, Sid, combattant, amoureux, étudiant en sexologie et travailleurs du sexe, Vero Pageau, dominatrice, Gabrielle Laliberté, courtisane indépendante, Alexia, masseuse, Bruno Laprade, travailleur du sexe et doctorant, Jo Redwitch, chroniqueuse à L’Itinéraire, ex-travailleuse du sexe, Mélodie Nelson, chroniqueuse, ex-travailleuse du sexe, Jean MacDonald, directrice générale de Maggie’s Toronto Sex Workers Action Project, Geneviève Quinty, coordonnatrice du Projet intervention prostitution Québec (PIPQ), Mylène St-Onge, coordonnatrice du projet L.U.N.E., Claude Poisson, coordonnateur du programme Travailleurs du sexe, REZO, Gabrielle Bouchard, coordonnatrice du Centre de lutte contre l’oppression des genres, James McKye, coordonnateur d’Action santé travesti(e)s et transexuel(le)s du Québec (ASTT(e)Q), Ken Monteith, directeur général de la Coalition des organismes communautaires québécois de lutte contre le VIH/sida (COCQ-sida), Pierre-Henri Minot, directeur général du Portail VIH/sida du Québec, Robert Paris, directeur général de PACT de rue, Katherina Pacey, avocate, directrice générale de PIVOT Legal Society, Bruno Dion, directeur d’OBNL, militant queer, Jordan Arseneault, coordinateur du Projet mediaqueer.ca et cofondateur du SéroSyndicat, Alexandra De Kiewit, agente de liaison, Stella, Anita Schoepp, agente de liaison, Stella, Joyce Arthur, FIRST, Vancouver, Caroline Leblanc, fondatrice de Solidarité dans la rue, sexologue et candidate à la maîtrise en service social, Frédérique Chabot, POWER, Ottawa-Gatineau, Mario Gagnon, Point de repères, Julie Nicolas, professionnelle en santé communautaire, Diane Deslauriers, intervenante communautaire, Liam Michaud, travailleur de rue, Amélie Goyette, intervenante à Cactus Montréal, Jason Phelps, travailleur social et psychoéducateur, Étienne Boudou-Laforce, intervenant social, Devon Simpson, MA travail social, travailleuse communautaire en santé mentale, Gaelle-Mauve Lapostolle, intervenante communautaire, militante féministe, Jonathan McPhedran Waitzer, organisateur communautaire et boursier de Jeanne-Sauvé, Jackson Hagner, travailleur social, étudiant à la maîtrise en travail social, Raphaële Frigon, membre du Groupe de recherche en intérêt public (GRIP), Université McGill, Michel Martel, président de REZO, travailleur social, MA sexologie, Sébastien Barraud, président de The Warning, MA anthropologie, éducateur, conseiller syndical, Patrick Charette-Dionne, secrétaire de The Warning, «Truvada whore», Natasha Potvin, administratrice à Peers Victoria resource society, Viviane Namaste, professeure, titulaire de la Chaire de recherche en VIH/sida et santé sexuelle à l’Institut Simone de Beauvoir de l’Université Concordia, Maria Nengeh Mensah, professeure titulaire à l’École de travail social et à l’Institut de recherches et d’études féministes de l’UQAM, Martine Delvaux, écrivaine et professeure à l’UQAM, Marie-Eve Sylvestre, vice-doyenne à la recherche, Section de droit civil, Université d’Ottawa, Francine Tremblay, Ph. D, professeure à la Faculté d’anthropologie et de sociologie de l’Université Concordia, Patrice Corriveau, professeur agrégé à la Faculté des sciences sociales, Département de criminologie, à l’Université d’Ottawa, Joanne Otis, professeure au Département de sexologie de l’UQAM, Janik Bastien Charlebois, professeure à l’UQAM, Shawna Ferris, chargée d’enseignement, Women and Gender Studies, Université du Manitoba, Abby Lippman, professeure émérite à l’Univesité McGill et assistante de recherche à l’Institut Simone de Beauvoir de l’Université Concordia, Colette Parent, professeure titulaire retraitée au Département de criminologie de l’Université d’Ottawa, Thomas Waugh, professeur de Sexualité et cinéma à l’Université Concordia, Alana Klein, professeure adjointe à la Faculté de droit de l’Université McGill, Mickael Chacha Enriquez, professeur de sociologie, Montréal, Jenn Clamen, organisatrice communautaire, Stella, et chargée de cours à l’Institut Simone de Beauvoir de l’Université Concordia, Ryan Conrad, chargé de cours à l’Université Concordia, membre de l’APAQ, Karen Herland, chargée de cours à l’Université Concordia et d’Ottawa, Louise Toupin, chercheuse autonome, chargée de cours à l’UQAM, Thomas Haig, chercheur communautaire, UQAM et COCQ-sida, Gabriel Girard, sociologue, postdoctorant, IRSPUM, Isabelle Robichaud, étudiante à la maîtrise en travail social à l’UQAM, adjointe de recherche Cultures du témoignage, Miguel Dionne, auxiliaire de recherche à l’Université de Montréal, Brenda Belak, avocate, PIVOT Legal Society, Elin Sigurdson, avocate, PIVOT Legal Society, Sandra Ka Hon Chu, avocate, Réseau juridique canadien VIH/sida, Molly Alexander, avocate, conseillère syndicale, Debora De Thomasis, avocate, Walid Hijazi, avocat, Véronique Robert, avocate criminaliste, Jean-Yves Leblanc, criminologue, Evelyne Fleury, sexologue, à titre personnel, Pascale Robitaille, BA, MA, sexologue, Émilie Laliberté, ex-directrice de Stella, membre de l’APAQ, Maxime Vallée, membre de l’APAQ, bénévole chez Stella, étudiant en maîtrise en sociologie à l’UQAM, Chantal Montmorency, écrivaine et militante, Arlene Jane Pitts, militante pour la reconnaissance des droits des TDS, Amélie Bédard, militante pour la reconnaissance des droits des TDS, Anna-Aude Caouette, militante pour la reconnaissance des droits des TDS, Alice Lepetit, militante féministe, Jacques Audet, militant féministe, Geneviève Bédard, féministe, Adam Hodgins, Syndicat canadien des employées et employés professionnels et de bureau, section locale 225, M. Desjardins, activiste politique et activiste trans, Marie-Christine Lemieux-Couture, auteure et militante féministe, Jessica MacCormack, artiste, Philémon Cimon, auteur-compositeur-interprète, Laurence Nerbonne, auteur-compositeur-interprète, Marie-Élaine Thibault, DJ-photographe, Shannon Harris, réalisatrice, artiste, Julie Paquet, performeuse, Stéphane Crête, acteur, metteur en scène, Pascale Cormier, écrivaine, Paul Ahmarani, acteur, Lady Trash, artiste, Corine Lespérance, blogueuse, Antonia Zerbisias, journaliste, Claudia Sofio journaliste, Elie Darling, traducteur, TScoop.ca, Shauna Weston, BA, Sault Ste Marie, Ontario, Bronwen Agnew, sage-femme, Rochelle Ross, MA travail social, Ashley Fortier, éditrice, Metonymy Press, Jean-Philippe Ung, développeur Web, Heather Hayes, travailleuse en service de garde, Clark Pignedoli, doctorant en sociologie et études féministes à l’UQAM, Véro Leduc, doctorante en communication, Jacky Vallée, doctorant en anthropologie, Claudyne Chevrier, doctorante à l’Université du Manitoba, Edith Gauthier, BA sexologie et candidate à la maîtrise en sexologie, profil recherche-intervention, Maxime Faddoul, étudiant à la maîtrise en travail social à l’UQAM, Sarah Labarre, auteure et étudiante au baccalauréat en sociologie à l’UQAM, Ariane Temkine, étudiante, Matt McLauchlin, étudiant en travail social, Alexis Marcous Rouleau, personne trans, étudiant en criminologie, Anca Andrada Doroga, étudiante en criminologie, stagiaire à Émissaire, Cactus (Montréal), FIRST (Vancouver), Migrant Sex Workers Project (Toronto), The Winnipeg Working Group, Big Susie’s (Hamilton, Ontario), SWAN – Sex Workers Advisory Network (Sudbury, Ontario), Sex Professionals of Canada (Toronto), South Western Ontario Sex Workers (London, Ontario)

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