Lettres: Le jupon montréalais de Radio-Canada

Depuis des lunes, tout le monde, du moins à l'extérieur de la métropole, sait que Radio-Canada porte un jupon montréalais, mais ses artisans tentent souvent de le cacher. Quand ce n'est pas Franco Nuovo, dans Je l'ai vu à la radio, qui invite les auditeurs à se joindre à son équipe dans un bar sur le boulevard Saint-Laurent, c'est Christiane Charette, dans son excellente émission, qui demande au cinéaste Carl Leblanc s'il vit à Montréal. Ainsi, dit-elle à peu près, elle pourra l'inviter plus souvent pour parler des livres qu'il a lus. Pourquoi faut-il vivre à Montréal pour être considéré comme un invité potentiel à cette émission pancanadienne? Bien sûr, il y a sûrement des contraintes budgétaires qui font en sorte qu'on n'invitera pas tous les jours une personnalité de Moncton, Caraquet ou Toronto. (En passant, Radio-Canada a des studios partout au pays, mais c'est bien plus plaisant de parler à l'invité face à face... )

Quand la radio ou la télé d'État nous présentent des émissions censément réseau, on devrait s'attendre à ce qu'on s'adresse non seulement aux Montréalais mais à tout le Québec, à toute l'Acadie et à tout le Canada. Guy Fournier, dans ses sorties parfois maladroites, avait probablement raison quand il disait chez nous que Radio-Canada faillit parfois à la tâche dans son mandat national. Ce n'est pas qu'on doive convaincre le bon peuple que le Canada est le meilleur pays du monde. C'est surtout que lorsqu'un auditeur de Hawkesbury, de Balmoral ou de Sept-Îles écoute la Première Chaîne de Radio-Canada, il se rend compte qu'il n'écoute pas une radio de Montréal mais bel et bien sa radio, celle qu'il paie avec ses propres impôts.

La solution? Chaque matin, lorsque Christiane Charette commence son émission, elle devrait se dire intérieurement qu'aujourd'hui, elle s'adresse tout particulièrement aux gens d'Edmundston, par exemple. Les réflexes montréalais finiraient par diminuer. Bien sûr, il faut qu'elle invite des gens qui n'habitent pas Montréal (on lit aussi à Shippagan) et, idéalement, que les animateurs sortent de leur studio du boulevard René-Lévesque pour venir dans ce qu'ils appellent les régions (Montréal en est une aussi, en passant). Quand Marie-France Bazzo est allée à Edmonton avec son équipe, on en a entendu parler pendant des jours par la suite alors qu'elle se permettait même de commenter les matchs des Oilers... Cela devrait être ça tous les jours, Radio-Canada.

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