UNEQ et écrivains en chiens de faïence

Méfiez-vous de vos vœux, ils pourraient se réaliser. Cette perle de sagesse dont on trouve des échos jusque dans les fables d’Ésope est taillée sur mesure pour les écrivains et pour l’organisation qui les représente, plongés ensemble dans un psychodrame à l’intrigue alambiquée. En s’enrayant à peine mise en marche, la professionnalisation a mis au jour des conceptions du bien commun irréconciliables et une immaturité syndicale qui commande un électrochoc.

Les dernières semaines ont révélé de multiples erreurs, imprécisions et omissions de la part de l’Union des écrivaines et des écrivains québécois (UNEQ). Malgré sa volonté affirmée — et réaffirmée — de bien faire, elle n’a pas su honorer le droit à la négociation dont elle a hérité avec la refonte de la Loi sur le statut professionnel des artistes. Les écrivains ont eu raison de remettre en question sa gouvernance. L’organisation a eu des chances de se racheter ; elle n’a jamais su les saisir.

La loi prévoit que le ministre peut désigner un médiateur ou un arbitre advenant des difficultés. On voit toutefois mal comment il pourrait recourir à pareils mécanismes dans l’immédiat. Le départ en bloc de son conseil d’administration, de sa présidente et de son directeur général laisse l’UNEQ non seulement étêtée, mais privée de ses organes vitaux. Cela n’aide pas.

Investie de la mission cruciale de mettre en place un cadre de conditions de travail minimales, l’UNEQ a le devoir de se recomposer rapidement. Il faudra pour cela que l’organisation et ses membres (et certains membres entre eux) cessent de se regarder en chiens de faïence. Sans quoi, Québec, qui a déjà offert son soutien à l’organisation, aura raison de s’impatienter et de sortir les forceps pour défendre sa loi.

Dans la foulée, l’inexpérimenté syndicat doit se questionner sur sa conception « comptable » de ce défi qui colle mal à l’esprit d’indépendance du milieu. Imaginer que les auteurs trouveront la rédemption dans un bras de fer autour des droits d’auteur relève effectivement du vœu pieux. Il faudra être plus inventif sur les formules et les moyens de tisser et de déployer un filet social digne de ce nom pour susciter l’adhésion des auteurs échaudés.

À ce propos, un travail urgent d’introspection devra aussi être fait par les auteurs. Si la dernière assemblée générale a été si chaotique, c’est qu’ils n’ont pas su, eux non plus, faire corps autour de ce projet. Or, le passage au collectif se fera, quoi qu’il en coûte. Voudront-ils le dessiner à leur mesure ou le subir ? La réponse leur appartient encore, mais pour combien de temps ?

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