Priorité à l’aide directe

Plus d’un million de Canadiens ont déjà fait appel à l’assurance-emploi et ce nombre augmente de jour en jour. Selon l’analyse effectuée par la firme-conseil Aviseo, le PIB du Québec pourrait chuter de 15 % au cours du deuxième trimestre et le taux de chômage grimper à 25 %, soit beaucoup plus qu’au pire moment de la récession de 2009.

La situation ne durera pas éternellement mais, contrairement aux récessions passées, il est probable que la reprise soit plus lente à cause de cette menace invisible qui continuera de rôder longtemps après que l’on aura franchi le sommet de la courbe de propagation du virus.

Plusieurs mesures d’aide aux individus et aux entreprises ont rapidement été annoncées par nos gouvernements, la plupart justifiées et assez bien ciblées. Mais répétons-le : elles ne suffiront pas. Le problème vient du fait que, malgré les programmes annoncés, plusieurs n’auront pas accès à des liquidités suffisantes pour respecter leurs obligations financières de court terme. Il faut y remédier en offrant encore plus de prêts à très faible taux d’intérêt, des prêts garantis par les gouvernements ou par la Banque du Canada, remboursables ou non selon le sort que ces PME auront réservé à leurs salariés.

Au cours des derniers jours, des associations d’entreprises ont demandé aux gouvernements de subventionner les salaires de leurs employés au lieu de verser des prestations de chômage une fois ceux-ci mis à pied.

Ottawa a déjà annoncé qu’il était prêt à financer les salaires à hauteur de 10 % dans les petites entreprises seulement. Certains pays, comme le Danemark, subventionnent jusqu’à 75 % du salaire, avec un plafond maximum par personne et par entreprise.

L’idée a du sens, mais elle arrive un peu tard puisque le mal est fait. Puis, elle risque de servir les intérêts des actionnaires avant ceux des employés dans les sociétés dont les activités se poursuivent à peu près normalement, ou qui ont plus facilement accès à du financement de marché. Ce qui est le cas des grandes sociétés rentables comme CGI, BCE et combien d’autres. Cela dit, Ottawa devrait certainement bonifier son programme puisque le pourcentage de 10 % est vraiment trop peu élevé pour changer les choses dans nombre de PME en difficulté.

D’autres mesures sont aussi proposées, comme un report temporaire des cotisations sociales (RRQ, AC, Fonds des services de santé) et des remises de la TPS-TVQ. Bonne idée, pourvu que les sommes retenues servent à maintenir un niveau de liquidité minimum et non de profit minimum… L’objectif est de protéger l’emploi, pas le niveau de vie des actionnaires.

Pour ce qui est des particuliers, les études et les sondages nous disent depuis longtemps que les Canadiens sont surendettés, au point que 40 % d’entre eux seraient dans le trouble advenant un simple retard dans le versement de leur paie. Plusieurs programmes ont récemment été annoncés pour fournir un revenu minimum en cas de perte d’emploi, mais là encore, les sommes promises ne suffiront pas. Ces jours-ci, l’anxiété atteint des niveaux rarement vus.

Québec aidera les travailleurs qui n’ont pas accès à l’assurance-emploi, dont Ottawa a par ailleurs assoupli les règles ; le paiement des impôts est retardé et l’allocation pour enfants, bonifiée. Quant au crédit TPS, il est multiplié par deux, et la différence pouvant atteindre 443 $ pour une personne seule sera versée en mai. Le hic, c’est que ce crédit est calculé sur le revenu de l’année précédente. Il faut faire plus. Voilà qui est généreux, mais d’autres mesures s’imposent. Et viendront. Quant au déficit, on a déjà oublié l’existence de ce mot dans le vocabulaire des économistes.

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