L'offensive du FBI

En ordonnant la publication d'une note confidentielle datée du 6 août 2001, l'administration Bush caressait l'espoir que le FBI devienne le sujet de toutes les critiques. Ce faisant, l'exécutif souhaitait qu'il soit exonéré de tout blâme. Cet effort de transparence de la part de la Maison-Blanche a eu un effet notable: il a délié les langues. Il a libéré la parole des patrons du FBI. À un point tel qu'on dispose d'une certitude: l'autorité de tutelle du FBI, soit le ministre de la Justice John Ashcroft, était moins enclin à faire la guerre au terrorisme qu'au trafic de drogues.

Grâce à la lettre que l'ancien directeur du FBI Louis Freeh a fait publier dans le Wall Street Journal, sans oublier son témoignage d'hier devant la commission, les Américains savent que toutes les requêtes que celui-ci avait formulées afin de disposer de moyens adéquats pour la guerre au terrorisme ont été rejetées. Selon son évaluation, le pays avait besoin de près de 2000 agents consacrant leur temps à pister Ben Laden, entre autres. Il a obtenu de quoi engager moins de 80 d'entre eux.

Grâce, maintenant, aux questions adressées au successeur de Freeh, Thomas Pickard, sur tous les faits et vices entourant la note du 6 août, les Américains ont appris que jamais celui-ci n'avait lu ce document où le travail du FBI était évoqué sans être précisé. Au passage, on doit souligner que Pickard s'était taillé une bonne réputation pour le boulot accompli contre la mouvance terroriste. CQFD: de tous les patrons du FBI, Pickard était le plus conscient des dangers que représentaient al-Qaïda et autres mouvement terroristes.

On sait également que l'ex-patron de la section antiterroriste du FBI, Dale Watson, est «tombé en bas de sa chaise», pour reprendre ses mots, lorsqu'il a constaté que le programme des priorités établies par Ashcroft, programme communiqué six mois avant les attentats, était exempt de toute allusion au terrorisme. Cette confidence a tellement dérangé Ashcroft que celui-ci a tenté par tous les moyens de faire en sorte qu'elle ne figure pas dans le rapport de la commission.

Quoi d'autre? On a été mis au parfum d'un fait d'autant plus troublant qu'il en impose. Le plan commandé par la ministre de la Justice de l'administration Clinton, Janet Reno, afin de lutter avec efficacité contre la bête, plan baptisé «Maximum Capacity by 2005», a été ignoré par la Maison-Blanche. Enfin, tous les patrons du FBI ont pris soin de noter que les augmentations budgétaires quémandées ont toutes été refusées par Ashcroft.

La divulgation de la note du 6 août a eu ceci de riche: le terrorisme était loin d'être la priorité de l'exécutif pour tout ce qui a trait à la sécurité des États-Unis.

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