Maintenir la pression
Pendant que les deux principaux partis d’opposition à l’Assemblée nationale redoublent d’ardeur au chapitre de la défense de l’identité québécoise, il faut s’en remettre à un groupe informel de la société civile pour faire le suivi de la commission Charbonneau.
C’est la première surprise à la lecture du rapport du Comité public de suivi des recommandations de la commission Charbonneau, publié la semaine dernière. Le groupe dispose de ressources anémiques pour s’acquitter d’un rôle de vigie. Il repose sur la superposition des talents de ses membres bénévoles : Luc Bégin (professeur à l’Université Laval), Pierre-Olivier Brodeur (ancien recherchiste à la commission Charbonneau), Paul Lalonde (président de Transparency International Canada), Gilles Ouimet (avocat et ex-député libéral), Peter Trent (maire de Westmount), Denis Saint-Martin et Martine Valois (tous deux professeurs à l’Université de Montréal).
Au total, pas plus de 14 citoyens ont participé, de près ou de loin, à cet effort d’analyse de la réponse du gouvernement Couillard au rapport final de la commission Charbonneau. Un an après la publication des 60 recommandations, ce bilan était nécessaire. Le genre d’exercice qu’aurait dû mener l’opposition…
Le comité en arrive à une conclusion implacable. « Malgré les quelques avancées réalisées, le travail accompli jusqu’à maintenant est insatisfaisant. Le gouvernement doit faire mieux », constatent les membres du comité.
Selon leur analyse, seulement 15 des 60 recommandations du rapport ont été mises en oeuvre de façon satisfaisante, tandis que 9 l’ont été de façon partielle. Autrement dit, 60 % des recommandations n’ont suscité aucune action gouvernementale.
Les libéraux ont vivement réagi, en présentant un scénario à l’exact contraire : 60 % des recommandations ont été appliquées, en tout ou en partie. Et ce n’est pas terminé, promet Québec.
C’est le terme « de manière satisfaisante », employé à bon escient par le comité de suivi, qui compte dans cette analyse. À titre indicatif, les libéraux se vantent de mieux protéger les lanceurs d’alerte, mais ils excluent du régime de protection les dénonciateurs du secteur municipal. La création d’une Autorité des marchés publics est prometteuse à première vue, mais elle n’a ni l’indépendance ni les pouvoirs pour jouer son rôle de surveillance dans l’octroi des contrats publics. Les exemples de réponses incomplètes ou insatisfaisantes s’enchaînent, au point qu’il faut se demander quelle est l’intention du gouvernement. Le changement de culture en matière d’éthique publique sera-t-il cosmétique ou durable ? C’est une question à laquelle devraient s’intéresser les partis d’opposition.