Posture indienne

Les pays riches ont l’obligation légale d’aider les pays en développement à juguler le réchauffement climatique, stipule la Convention-cadre des Nations unies adoptée à Rio en… 1992. Il se trouve, près de 25 ans plus tard, que cette question demeure l’un des principaux obstacles à la conclusion d’une entente internationale sur le climat qui soit véritablement porteuse de progrès.

En ce sens, le premier ministre de l’Inde, Narendra Modi, qui s’est présenté à Paris en champion des pays pauvres, a raison de se montrer d’entrée de jeu intraitable sur cette question, vu les responsabilités historiques du monde industrialisé dans la calamité climatique en devenir, et de défendre, par conséquent, le droit des pays du Sud de se développer économiquement en continuant d’avoir recours aux énergies fossiles.

Le fait est que le Fonds vert pour le climat créé à Copenhague en 2009 prévoyait un montant de 100 milliards pour aider les pays en développement à faire la transition vers des énergies plus propres et faire face aux impacts du réchauffement climatique. À ce jour, ce fonds n’a été approvisionné qu’aux deux tiers. Il coule de source que les pays riches doivent en faire beaucoup plus pour accompagner le développement durable du Sud.

Cela dit, M. Modi a beau jeu de bomber le torse sur la scène internationale, comme il plaît toujours à l’opinion publique indienne, à droite comme à gauche, de voir l’Inde tenir tête aux États-Unis et à l’Europe, par vieux réflexes antioccidentaux.

Il faut préciser ensuite que le droit au développement que soutient M. Modi revient, pour ainsi dire, à défendre celui de développer l’Inde n’importe comment. L’homme est un néolibéral bon teint dont le projet politique se résume pour l’essentiel à enrichir une minorité en comptant que la croissance du PIB créera des emplois et rejaillira par ruissellement sur les classes moyennes. Il est loin de défendre l’idée d’une économie soucieuse de redistribuer la richesse. Il était donc agaçant de le voir à Paris défendre l’intérêt national au nom des centaines de millions d’Indiens qui vivent dans la pauvreté, alors qu’ils sont en vérité laissés de côté par son approche économique.

Non plus que M. Modi ait manifesté une sensibilité environnementale très aiguisée depuis qu’il a été élu en mai 2014. Le tout à la croissance capitaliste qui anime les élites fait que l’air de Delhi est devenu plus irrespirable que celui de Pékin. Mieux gérés seraient les besoins en charbon si l’État faisait un effort pour rénover le système complètement désuet de distribution de l’électricité. Où est sa volonté politique de rebâtir les réseaux d’aqueduc et dépolluer les rivières ? Vrai que l’Occident a ses responsabilités. M. Modi a aussi les siennes.



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