Lent effritement
La légitimité du président Mahmoud Abbas s’étiole nettement au sein de la société palestinienne et la victoire du bloc pro-Hamas aux élections étudiantes à l’Université Birzeit en est le signe le plus récent. Située tout près de Ramallah, Birzeit est une université laïque réputée, foyer traditionnel du Fatah qui domine l’Autorité palestinienne (AP) présidée par M. Abbas. En l’absence de la tenue d’élections législatives depuis 2006 dans les territoires, les scrutins universitaires sont considérés comme des indicateurs utiles du sentiment général de l’opinion publique. L’Université de Birzeit, qui accueille environ 10 000 étudiants, en est le plus important. La victoire de la Liste islamique soutenue par le Hamas a donc provoqué une onde de choc.
Il s’agit moins, veulent croire un certain nombre d’observateurs, d’une victoire pour le Hamas que d’une défaite pour l’AP, décrédibilisée par son affligeant échec à négocier avec Israël la création de l’État palestinien que les accords d’Oslo de 1993 avaient fait miroiter. Âgé de 80 ans, M. Abbas gouverne de plus en plus avec autoritarisme. Le Parlement palestinien ne fonctionne plus depuis 2007 ; M. Abbas, élu en 2005, outrepasse maintenant son mandat présidentiel de six ans. L’homme déçoit, même au sein de l’AP, pour être devenu un administrateur de l’occupation plutôt que d’être demeuré le leader d’un mouvement de résistance — pendant qu’Israël continue de s’emparer, morceau par morceau, des territoires palestiniens.
Les Palestiniens ne considèrent pas pour autant les islamistes du Hamas comme une panacée. Ce qui les exaspère peut-être par-dessus tout, c’est la profonde et paralysante rivalité qui oppose le Fatah et le Hamas. En interne, il devient urgent de surmonter cette paralysie. Comme il est nécessaire, pour l’avenir de la société palestinienne, de tenir à plus ou moins brève échéance de nouvelles élections présidentielle et législatives.
Entendu qu’Israël fait ses choux gras de la situation, qu’il en est en fait largement responsable, que son refus de négocier de bonne foi un accord de paix nourrit la crise permanente dans laquelle se trouve plongée la société palestinienne. Cette crise et ces déchirements font son affaire — les Palestiniens n’en sont évidemment pas dupes. Près de 580 000 colons juifs vivent maintenant en Cisjordanie — leur nombre a doublé en dix ans. La volonté n’existe pas au sein de la classe politique israélienne, ou si peu, de négocier la création d’un État palestinien en bonne et due forme. Le premier ministre israélien, Benjamin Nétanyahou, le reconnaît épisodiquement, avec de moins en moins de subtilité.
Alors quoi ? La société palestinienne se délite. Les étudiants de Birzeit basculent et penchent, par dépit, pour le Hamas.