Agence d’infrastructures - Non à une agence

Le ministre des Transports du Québec, M. Sylvain Gaudreault, a déposé, la semaine dernière, un projet de loi qui, s’il devait être adopté malgré la situation de gouvernement minoritaire, déplacerait la quasi-totalité des activités de son ministère vers une agence indépendante. Si l’objectif d’accroître l’efficacité est louable, le moyen choisi ne l’est pas.

 

L'Agence des infrastructures de transport (AIT) que voudrait créer le gouvernement du Parti québécois aurait pour mission de « gérer et d’exploiter les infrastructures routières », de « développer une expertise » et de « protéger l’intégrité des investissements routiers ».

 

En présentant son projet de loi, le ministre Sylvain Gaudreault a fait valoir que le Québec retrouverait ainsi l’expertise perdue au cours des années Charest, et placerait ces activités à l’abri des influences politiques.

 

Vraiment ? Et qui nommerait les membres du conseil d’administration et de la haute direction de cette agence ? Qui choisirait les projets et selon quelles priorités, sinon celles du Conseil des ministres ?

 

En soi, il n’y a rien de mal à ce que le gouvernement décide de l’allocation des fonds publics. Mais c’est précisément pour cette raison qu’il existe un ministère des Transports. Or, c’est la mission de ce ministère qu’on souhaite ainsi transférer à l’AIT.

 

Selon les plans du gouvernement, 90 % des 6500 fonctionnaires du ministère deviendraient des employés de l’Agence, qui n’aurait plus à se soumettre aux règles d’embauche de la fonction publique. On comprend par là que l’organisation adopterait sa propre politique de rémunération, plus généreuse que celle de la fonction publique.

 

Il existe pourtant déjà des mesures particulières qui permettent au gouvernement de faire exception à la règle lorsqu’il y a pénurie de main-d’oeuvre. Ce ne sont quand même pas toutes les catégories d’emplois qui présentent des problèmes de pénurie dans ce ministère qui compte bien d’autres corps de métier que celui d’ingénieur.

 

Et la direction ? Pourquoi répéter les excès des trop nombreuses organisations parapubliques ? Boîte à patronage, dites-vous ?

 

Si le ministère des Transports n’était plus que l’ombre de lui-même à fin du règne libéral, c’est que ce gouvernement l’a vidé de sa substance en confiant l’essentiel de la gestion et de la surveillance des travaux d’infrastructures au secteur privé. On a parlé de réingénierie alors qu’il s’agissait de transfert de pouvoirs et d’argent à des amis politiques en échange d’une étroite complicité au financement du parti.

 

Conséquences de ces gestes irresponsables : les coûts de construction ont explosé au Québec et le ministère des Transports s’est retrouvé en panne de compétences et d’autorité.

 

En créant l’Agence des infrastructures de transport, le gouvernement Marois affirme que l’État reprendrait le contrôle de la situation. Contrôle politique sans doute, mais au plus haut niveau seulement et surtout à l’abri des regards trop curieux du public.

 

A-t-on déjà oublié l’arrogance et l’absence de transparence de l’ex-Agence des PPP accusée par le vérificateur général d’avoir faussé les données pour justifier la construction du CHUM en partenariat public-privé ? Jamais la haute direction n’a accepté de répondre elle-même aux questions des médias parce qu’elle jugeait n’avoir de comptes à tendre qu’au gouvernement.

 

Il est difficile de croire qu’en confiant les infrastructures routières à une agence indépendante, l’intérêt public serait mieux protégé.

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