Jorge Mario Bergoglio - Un pape pasteur

L’Église catholique a un nouveau pape, le 266e de son histoire. Le cardinal Jorge Mario Bergoglio, qui a pris pour nom François, pourrait être un pape différent de ses prédécesseurs. Issu de l’Amérique latine, il est un ascète, mais surtout un pasteur proche du peuple de l’Église. Son élection à la papauté porte un signal dont la signification réelle reste toutefois à venir.

Les cardinaux, en élisant ce cardinal argentin, qui en 2005 avait renoncé à la papauté qui échut alors au cardinal Ratzinger, ont fait un choix délibéré. Le processus électif particulier qu’est le conclave exclut le hasard, d’autant qu’ils avaient dans les jours précédents participé aux congrégations qui étaient un lieu de discussion sur les orientations à donner à ce nouveau pontificat qui s’incarnent par la force des choses dans la personnalité de l’élu.


Le premier trait à retenir est l’origine géographique du nouveau pape, l’Amérique latine qui est démographiquement le bastion du catholicisme. Voyons-y une volonté nouvelle de représentativité du peuple de l’Église. Le signal vaut pour tous les non-Européens, tout particulièrement pour l’Église africaine et l’Église asiatique.


L’Église catholique qui fut et qui est toujours la première institution mondialisée et qui s’est toujours dite universelle devient vraiment universelle. L’institution renonce en quelque sorte à la domination italienne et européenne, même si son siège demeure à Rome.


Un second trait de la personnalité du nouveau pape est la proximité qu’il entretient avec le peuple de l’Église. Le cardinal qu’il était avait volontairement renoncé aux pompes de son titre, vivant dans un petit appartement, se déplaçant en métro et en autobus plutôt qu’en limousine, et menant une vie d’ascète. Tout naturellement, il a fait de la pauvreté son combat. Sa recherche de justice sociale pour les Argentins l’a amené à s’opposer au couple Kirchner, qui se partage la présidence de l’Argentine depuis 10 ans.


Le pape François sera sans doute le pasteur que le théologien Benoît XVI ne pouvait être. Il sera sans doute porteur d’une sensibilité plus grande à la situation sociale et économique de ses fidèles, qui en Amérique latine, en Asie et en Afrique sont les laissés pour compte de la croissance. Le cardinal Bergoglio offrira au peuple chrétien une image de l’Église autre que celle de ses scandales sexuels et financiers.


Les cardinaux manifestent par le choix du nouveau pontife une volonté de changement, tout au moins une capacité d’adaptation aux problèmes auxquels ils sont confrontés. Mais leur choix n’est pas le point de départ d’une révolution.


Le cardinal Bergoglio est un conservateur et le pape François le sera sans doute. Il est un fidèle à la hiérarchie de l’Église. Son souci pour la justice sociale ne l’a pas amené à soutenir, tout au contraire, le mouvement de la théologie de la libération que Rome combattait. Il s’est opposé à ce que ses prêtres laissent leurs églises pour oeuvrer dans la communauté.


Fidèle, il l’est aussi à la tradition de l’Église sur les questions sociales. Il est opposé à la libération des moeurs sexuelles, à l’avortement, au mariage entre conjoints de même sexe, à la contraception. L’ouverture qu’attendent tant de catholiques ne saurait venir de ce nouveau pape, à moins que l’Esprit saint ne vienne l’éclairer pendant son pontificat.


L’institution séculaire qu’est l’Église ne saurait changer aussi rapidement que le souhaitent plusieurs de ses fidèles. L’histoire du concile Vatican II enseigne qu’il faut compter sur la durée. Avec l’élection du cardinal Bergoglio, un pas a été franchi dont il reste à mesurer l’ampleur. Sans doute les cardinaux progressistes et conservateurs ont-ils vu en lui le candidat de compromis qui permettra à l’Église de s’adapter, à défaut de changer.

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