Parti libéral du Canada - Un avenir lointain
Refaire l’histoire est un exercice généralement futile. On peut toutefois penser que Bob Rae aurait mieux fait que Michael Ignatieff à la tête du Parti libéral du Canada lors de la dernière élection. On a pu prendre la mesure de son talent et de son expérience ces 12 derniers mois dans son rôle de chef par intérim. Il a donné un tel élan à son parti qu’il a supplanté dans le rôle d’opposition officielle le NPD pendant que celui-ci était occupé à se choisir un chef.
Ce sentiment est largement partagé au sein du Parti libéral. Il aurait eu de larges appuis s’il avait voulu prendre part à la prochaine course au leadership. Aussi, sa décision de s’abstenir, annoncée mercredi, a-t-elle surpris et déçu.
Il ne fut sans doute pas facile de renoncer, après tant d’années en politique, à son ambition de devenir premier ministre du Canada. Néanmoins, ce fut une sage décision. Mieux que quiconque, il savait que la reconstruction du parti ne saurait déboucher sur un retour au pouvoir avant de longues années, voire avant deux ou trois élections.
Tout est à faire. Il faut redresser l’état des finances, recruter de nouveaux membres, remettre sur pied les organisations de comté, réécrire le programme, puis se tailler une place sur l’échiquier politique, où le Parti conservateur et le NPD accaparent maintenant tout l’espace.
Cet exercice, Bob Rae a conclu qu’il ne saurait le mener à terme, compte tenu de son âge. Il aura bientôt 64 ans. L’intérêt du parti l’a conduit à passer le témoin à une autre génération, celle des 40 et 50 ans, mieux à même d’incarner l’avenir. Des politiciens plus jeunes auront le temps d’inscrire la reconstruction du parti dans la durée. Ils auront la capacité aussi de mieux comprendre ce qu’attendent les électeurs d’un Parti libéral renouvelé.
D’emblée, les regards se sont tournés vers quelques postulants naturels à la direction du parti, comme Denis Coderre, Dominic LeBlanc, Justin Trudeau, Martin Cauchon, Martha Hall-Finlay. L’erreur à ne pas faire pour ces candidats potentiels est de se précipiter pour s’engager dans une campagne qui sera longue et exigera une caisse bien garnie.
Dans ce lot se distingue déjà Justin Trudeau. Comme les autres, il dit réfléchir, ce qui ne l’empêche pas de sonder ses appuis depuis des semaines, notamment à Toronto où certains le voient comme un sauveur, en raison d’un nom qui incarne les valeurs du Parti libéral. Ce serait se tromper que de croire que l’avenir réside dans un passé glorieux. Peut-être le fils Trudeau aurait-il le talent de devenir chef. Mais l’échec retentissant de Michael Ignatieff devrait inciter à se méfier des messies.