Énergie - Un plan, lequel?

Les ministres fédéral et provinciaux de l'Énergie se sont entendus cette semaine à Kananaskis, en Alberta, sur un plan favorisant «une approche de collaboration». Une collaboration qui vise essentiellement à s'attaquer aux délais d'approbation des projets d'exploitation et de transport d'énergie. Dire qu'il y a des gens qui trouvent qu'on va déjà trop vite!

À l'issue de la rencontre des ministres de l'Énergie, la ministre québécoise Nathalie Normandeau s'est dite rassurée de voir que le Plan d'action national auquel elle venait de souscrire est à la fois flexible et non contraignant. Après tout, le Québec possède déjà sa propre stratégie et n'a pas l'intention de troquer ses droits constitutionnels contre un plan canadien.

Cela dit, Mme Normandeau a tout de même donné son accord à un plan canadien parce qu'avec l'élection d'un gouvernement conservateur majoritaire à Ottawa, tout le monde veut accélérer le pas en matière de réalisation de ses projets énergétiques, chacun dans sa spécialité.

D'abord les provinces de l'Ouest, qui veulent exploiter plus de pétrole des sables bitumineux et l'acheminer rapidement, par oléoduc ou autrement, jusqu'au port de Vancouver pour répondre à la demande de pays comme la Chine et l'Inde.

À l'ère de l'abondance de gaz de schiste à un prix peu élevé et de l'engouement pour les technologies vertes aux États-Unis, il est devenu urgent pour l'Ouest de contrer les attaques dont son pétrole «sale» est victime. D'Ottawa, ces provinces attendent donc qu'il assume le leadership de la simplification des mécanismes d'évaluation environnementale, qu'il augmente l'aide au développement de technologies comme le captage de CO2 et qu'il livre la guerre médiatique en faveur du pétrole «démocratique» canadien dans le monde.

L'Ontario a aussi donné son appui au plan fédéral après avoir fait biffer les qualificatifs «durables» et «responsables» accolés aux «sables bitumineux» dans le projet de communiqué. Si le premier ministre, Dalton McGuinty, refuse d'adhérer à la vision conservatrice du tout au pétrole, c'est pour lui préférer le nucléaire, qui suscite aussi beaucoup de résistance, et les énergies renouvelables, qui exigent aussi beaucoup d'argent.

L'Ontario en a assez de voir ses impôts investis par Ottawa dans le pétrole de l'Ouest, a lancé M. McGuinty à la veille de la rencontre annuelle du Conseil de la fédération, qui se déroule depuis hier à Vancouver. S'il a dit oui au plan d'Ottawa, plus tôt cette semaine, son intention n'en est pas moins de convaincre le gouvernement Harper de financer ses propres projets, comme il a promis de financer la future ligne de transport d'électricité de Terre-Neuve.

Et parlant d'électricité, c'est bien sûr la marotte des Maritimes et du Québec. Mais pour ces provinces aussi, l'espoir d'exploiter le pétrole et le gaz fait naître un intérêt certain pour une réglementation moins exigeante et un processus d'approbation des projets plus expéditif, même si cela présente un risque accru pour l'environnement.

En donnant l'accord de son gouvernement au plan d'action fédéral, la ministre Nathalie Normandeau a eu beau se draper du fleurdelisé, elle ne pouvait qu'applaudir à la volonté commune des provinces et du fédéral d'accélérer la réalisation des projets énergétiques, y compris les siens. Ce qui n'est pas pour nous rassurer.

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