Le Nobel de la paix à Liu Xiaobo - La Vérité
À la différence des Nobel antérieurs, Liu a beaucoup écrit. Il n'a pas fondé une Amnistie internationale ou négocié un accord de paix, mais sans cesse il a théorisé le devoir de contestation comme l'observation des droits de la personne, en plus de décrypter les vices du système dit «post-totalitaire». Quoi d'autre? Ses dissertations très critiques à l'endroit des élites intellectuelles qui se contentent, par intérêts bien compris, d'adhérer à «la philosophie du porc». Long de trente ans, son combat a toujours logé à l'enseigne de la devise suivante: «Vivre dans la vérité». Avant de poursuivre, on conseille vivement à ceux qui voudraient en savoir plus long la lecture du texte éclairant qu'a composé le sinologue Jean-Philippe Béja. Intitulé Liu Xiaobo ou le retour de la morale, on peut le lire dans le journal en ligne Médiapart.
Au début des années 1980, Liu se taille toute une réputation en mettant en relief les stigmates de la «littérature de cicatrices». À cette époque, la critique du système passait par le roman. On voulait dénoncer les tares de l'éducation? L'école devenait le lieu de la fiction. Mais pour ne pas affronter de front les caciques du régime, on prenait soin de mettre en scène un membre du Parti plein de bonté et d'une honnêteté absolue. On levait le voile à gauche tout en prenant soin de se garder à droite. D'où le nom donné à ce mouvement: littérature de cicatrices.
Alors professeur à l'Université de Pékin, Liu va s'atteler à la déconstruction de ce courant en priant ses collègues écrivains de prendre le risque de la liberté et d'adopter la posture morale. «En Chine, pratiquement tout le monde a le courage de défier sans vergogne la morale. Tandis que ceux qui ont le courage moral de défier la réalité sans vergogne, on n'en trouve presque pas.» D'où sa conviction que l'intellectuel chinois est condamné, il n'y a pas d'autre mot, à devenir un être en mission tant et aussi longtemps que tous les citoyens n'auront pas la possibilité de dire la vérité. Alors, «ce sera une menace mortelle pour un système fondé sur le mensonge».
Il enseigne à l'Université Columbia, à New York, lorsque des centaines et des centaines d'étudiants occupent la place Tian'anmen. Contrairement aux opposants vivant à l'étranger, il prend la route du courage: il se rend à la rencontre d'une jeunesse révoltée. Il s'implique tant qu'il devient l'un des leaders du mouvement, allant jusqu'à négocier un retrait sans heurt. Aux intellectuels dits libéraux qui qualifiaient cette contestation de catastrophe, il répondra: «L'essentiel des élites s'est vite transformé en défenseur de la position officielle. [...] Il est bien difficile d'imaginer que cette couche sociale qui a profité du pouvoir et dépend de lui [...] risque sa position pour des raisons morales.»
Son engagement auprès des paysans spoliés, des citadins expropriés, sa lutte contre la corruption vont lui valoir un emprisonnement de trois ans. À peine sorti, il reprend son combat. Alors de nouveau il est condamné; onze ans derrière les barreaux, où il se trouve encore aujourd'hui. Liu Xiaobo a ceci d'admirable qu'il n'a jamais cédé sur ce qu'il juge fondamental: vivre dans la vérité.
Au début des années 1980, Liu se taille toute une réputation en mettant en relief les stigmates de la «littérature de cicatrices». À cette époque, la critique du système passait par le roman. On voulait dénoncer les tares de l'éducation? L'école devenait le lieu de la fiction. Mais pour ne pas affronter de front les caciques du régime, on prenait soin de mettre en scène un membre du Parti plein de bonté et d'une honnêteté absolue. On levait le voile à gauche tout en prenant soin de se garder à droite. D'où le nom donné à ce mouvement: littérature de cicatrices.
Alors professeur à l'Université de Pékin, Liu va s'atteler à la déconstruction de ce courant en priant ses collègues écrivains de prendre le risque de la liberté et d'adopter la posture morale. «En Chine, pratiquement tout le monde a le courage de défier sans vergogne la morale. Tandis que ceux qui ont le courage moral de défier la réalité sans vergogne, on n'en trouve presque pas.» D'où sa conviction que l'intellectuel chinois est condamné, il n'y a pas d'autre mot, à devenir un être en mission tant et aussi longtemps que tous les citoyens n'auront pas la possibilité de dire la vérité. Alors, «ce sera une menace mortelle pour un système fondé sur le mensonge».
Il enseigne à l'Université Columbia, à New York, lorsque des centaines et des centaines d'étudiants occupent la place Tian'anmen. Contrairement aux opposants vivant à l'étranger, il prend la route du courage: il se rend à la rencontre d'une jeunesse révoltée. Il s'implique tant qu'il devient l'un des leaders du mouvement, allant jusqu'à négocier un retrait sans heurt. Aux intellectuels dits libéraux qui qualifiaient cette contestation de catastrophe, il répondra: «L'essentiel des élites s'est vite transformé en défenseur de la position officielle. [...] Il est bien difficile d'imaginer que cette couche sociale qui a profité du pouvoir et dépend de lui [...] risque sa position pour des raisons morales.»
Son engagement auprès des paysans spoliés, des citadins expropriés, sa lutte contre la corruption vont lui valoir un emprisonnement de trois ans. À peine sorti, il reprend son combat. Alors de nouveau il est condamné; onze ans derrière les barreaux, où il se trouve encore aujourd'hui. Liu Xiaobo a ceci d'admirable qu'il n'a jamais cédé sur ce qu'il juge fondamental: vivre dans la vérité.