Combien cela coûtera-t-il ?
Cette question, «combien cela coûtera-t-il», est devenue obsédante pour tous les ordres de gouvernement responsables de grands projets de construction. À juste titre, tant il y a eu par le passé des dérapages douloureux; pensons au métro de Laval ou encore au pavillon des sciences de l'UQAM.
Dans un contexte de rareté relative des ressources, hommes et femmes politiques savent qu'il leur revient d'assurer une surveillance serrée des projets dont le financement est pour l'essentiel public. Depuis le dérapage survenu à l'UQAM, des contrôles ont été mis en place. Parfois excessifs et inutilement contraignants, ils permettent néanmoins un encadrement des processus de décision. L'objectif est de rassurer l'opinion publique.Contrôle n'est toutefois pas synonyme de transparence. Pour autant, les contribuables ne disposent pas de toute l'information nécessaire pour comprendre et juger de l'évolution de ces grands projets. Un exemple de cela: le 29 mai, la direction du CHUM lançait un appel de propositions pour la réalisation en partenariat public-privé de son centre de recherche au coût de 320 millions de dollars. Surprise: deux mois plus tôt, ce projet était de 280 millions de dollars. Comment expliquer cet écart de 14 %? De prime abord, la direction du CHUM n'avait pas de réponse cohérente à proposer. Plutôt étonnant qu'elle n'ait pas pensé que la question serait posée, comme si on imaginait que le public n'a pas à savoir ce genre de détails.
Autre exemple, celui de la nouvelle salle de concert de Montréal. Il y a peu, Le Devoir faisait état de l'explosion des coûts, les 105 millions de dollars annoncés au départ devenant 266 millions. Les responsables du projet ont réfuté le mot «explosion», invoquant le fait que les 266 millions comprenaient la conception, la construction, le financement et l'exploitation de la salle pendant 30 ans puisque celle-ci sera réalisée en mode PPP. Au surplus, on soutenait que cette information était publique. Or jamais il n'en avait été fait état, sinon à la page 88 de l'appel de propositions qui se trouve sur le site Internet du Secrétariat des partenariats public-privé. Jamais les responsables du projet, ni les ministres intéressés, n'avaient daigné diffuser un communiqué pour donner cette information, qui n'est tout de même pas un petit détail.
Ces deux exemples ne sont pas sans rappeler le cas de l'édifice de la Caisse de dépôt et placement dans le Quartier international, dont on avait appris tout à coup en 2003 que les coûts annoncés de 102 millions de dollars étaient passés à 418 millions. Il n'y avait eu aucune malversation, sinon un manque de transparence totale, tenant pour acquis que l'évolution des coûts due à l'augmentation du prix des matériaux et à l'ajout d'éléments importants au programme de construction ne regardait pas le public.
Cette obligation de transparence doit se traduire par une information complète donnée au public. Répéter que tous les contrôles sont assurés ne suffit pas. Il faut dire ce qui en est vraiment. Dans le cas des centres hospitaliers universitaires, on assure que le budget des trois projets sera respecté. Bien, mais encore faut-il savoir que les 3,6 milliards dont il est question sont en dollars de 2004. Au fait, combien cela fait-il en dollars de 2008?