Jeunes au travail
Ils arrivent aujourd’hui sur le marché du travail, stressés à l’égard de leurs finances. Or, dans le sillage de la génération qui la précède, la « GenZ » pourra compter sur un rapport de force favorable sur le marché de l’emploi qui pourrait changer la donne.
D’abord le stress. Une récente étude menée par Interac Corp. indique que la génération Z (GenZ) se sent stressée (42 %) ou anxieuse (37 %) à l’égard de sa situation financière, soit le pourcentage le plus élevé de toutes les cohortes. Et en matière de littératie financière, plus qu’ailleurs au Canada, les Québécois de cette génération sont les plus nombreux à déclarer qu’ils ont peur (21 %) ou qu’ils se sentent confus (20 %). Mais la volonté est là : 68 % disent vouloir améliorer leur relation avec l’argent.
D’ailleurs, on apprenait en mars que les personnes occupant un second emploi, voire s’activant dans l’économie des « petits boulots », étaient toujours plus nombreuses. Ainsi, 20 % des répondants à une enquête du spécialiste de l’impôt H&R Block ont déclaré avoir accepté un travail à la demande au cours des 12 derniers mois, ce pourcentage atteignant 35 % chez les 18-34 ans. Dans un autre sondage, réalisé pour TurboImpôt, on observe que 23 % des Canadiens greffent un petit boulot à leur emploi principal, la majorité d’entre eux étant des jeunes. « Plus de la moitié [52 %] des Canadiens ayant un second emploi appartiennent à la génération Z et 34 % sont des millénariaux », précise le spécialiste de l’impôt en ligne.
Mais pour l’avenir, même pas si lointain, l’anxiété devrait se transformer en une certaine confiance. Du moins sur le marché de l’emploi qui, par surcroît, tente de s’ajuster à une pénurie de main-d’oeuvre. Statistique Canada rappelait à partir des données du recensement de 2021 que les plus jeunes générations, comme les millénariaux et la génération Z, sont plus scolarisées et diversifiées que les générations précédentes. « Elles ont grandi dans un univers technologique et interconnecté qui a une incidence importante sur leurs valeurs et leur mode de vie. Ces générations constituent désormais une part considérable de la population en âge de travailler, entraînant ainsi des transformations sur le marché du travail. »
(Précisons que, pour l’agence fédérale, les millénariaux sont les personnes nées entre 1981 et 1996 et que le terme « génération Z » désigne celles nées entre 1997 et 2012.)
Les millénariaux représentent la génération qui a crû le plus rapidement. Le nombre de personnes de cette génération a augmenté de 8,6 % entre 2016 et 2021, contre 5,2 % pour l’ensemble de la population, en raison de l’apport plus important de l’immigration. Dans l’intervalle, la génération Z a augmenté de 6,4 %, affichant ainsi la deuxième croissance démographique parmi toutes les générations.
Selon les projections démographiques retenues par l’agence fédérale, les millénariaux pourraient devenir d’ici 2029 la génération comptant le plus grand nombre de personnes au pays, devançant pour la première fois les baby-boomers. « Dans 25 ans (soit en 2046), il pourrait y avoir 2,2 fois plus de millénariaux que de baby-boomers. Les personnes de ces générations seraient alors âgées respectivement de 50 à 65 ans et de plus de 80 ans. Suit la génération Z, dont le nombre de personnes pourrait être supérieur à celui des baby-boomers en 2032 et à celui des millénariaux en 2045. »
Rééquilibrage du marché du travail
Aujourd’hui, ces derniers forment la génération qui compte le plus grand nombre de personnes au sein de la population en âge de travailler (de 15 à 64 ans). La Banque de développement du Canada ajoute que les millénariaux et les membres de la génération Z compteront pour près des trois quarts de la main-d’oeuvre en 2030. Ce qui n’est pas sans moduler le marché du travail, notamment sous forme d’un rééquilibrage travail-famille-loisirs et quant à l’importance du perfectionnement professionnel et au but associé au travail. Il en va ainsi pour la loyauté au travail, pour la rétention des employés et pour la souplesse ou la flexibilité dans les horaires. « Selon des études, ces jeunes générations ne trouvent plus le travail aussi valorisant que les générations plus anciennes, et cherchent aussi à se réaliser ailleurs que dans une activité professionnelle », souligne Statistique Canada.
Des études publiées récemment dans Le Devoir se veulent plus éclairantes encore. Un sondage mené par Angus Reid pour le compte d’Indeed Canada indique que le télétravail n’est pas une panacée. Seulement 21 % des répondants de la génération Z trouvent que « le travail dans un bureau est dépassé ». Et « le 9 à 5 » est « dépassé » pour 46 % d’entre eux.
L’équilibre entre le travail et la vie personnelle trône au sommet de leurs exigences. Ils sont 76 % au Québec à affirmer qu’il s’agit d’« un élément primordial quant à [leur] fidélité envers une organisation ». La moitié des répondants (51 %) sont même prêts à faire « un compromis sur un salaire plus avantageux pour avoir un meilleur équilibre » de vie, lit-on dans le texte.
Dans l’étude de Léger commandée par le Conseil du patronat du Québec et l’Ordre des conseillers en ressources humaines agréés, la mobilité et son corollaire, la difficile rétention, ressortent clairement. Si 90 % des 16-34 ans estiment qu’il est « possible d’avoir une carrière épanouie en progressant au sein d’une même entreprise », un peu plus de 30 % d’entre eux pensent tout de même que « changer fréquemment d’emploi » est « important » pour « avoir une carrière épanouie et continuer d’apprendre ».
Ce texte fait partie de notre section Opinion qui favorise une pluralité des voix et des idées. Il s’agit d’une chronique et, à ce titre, elle reflète les valeurs et la position de son auteur et pas nécessairement celles du Devoir.