Les ménages ne s’en sortent pas
On n’observe aucun répit pour les ménages derrière le recul de l’inflation globale en septembre pour un troisième mois consécutif. Même l’impact inflationniste de la hausse des taux d’intérêt fait sentir une présence toujours plus marquée dans l’équation. Reste à voir si la Banque du Canada va en tenir compte le 26 octobre.
Selon le scénario majoritairement retenu, il devrait ressortir de la réunion du comité monétaire de la Banque du Canada, le 26 octobre, une hausse du taux directeur de 50 points, à 3,75 %, pour l’enfoncer davantage dans la zone de taux restrictive. Ils sont toutefois plus nombreux parmi les analystes à soutenir que la banque centrale voudra donner un autre coup de barre plus convaincant et remarqué, évoquant ainsi un tour de vis de 75 points qui pousserait le taux cible du financement à un jour à 4 %. Certes, l’impact toujours plus ressenti de la hausse du coût de la vie sur les ménages, avec l’augmentation du loyer de l’argent s’enracinant toujours plus profondément dans l’équation, pourrait inciter la banque centrale à s’en tenir à 50 points. On fait toutefois remarquer qu’elle n’est pas sans marteler l’existence d’une demande toujours excédentaire dans l’économie et sans pointer en direction du repli du dollar canadien face à une contrepartie américaine gonflée par une Réserve fédérale plutôt « agressive ». On verra.
Encore l’essence
Les données de septembre de Statistique Canada ont déçu. Certes, l’inflation telle que mesurée par l’indice des prix à la consommation (IPC) s’est repliée pour un troisième mois consécutif, à 6,9 %. Mais, sans les composantes volatiles des aliments et de l’énergie, les prix ont augmenté de 5,4 % d’une année à l’autre en septembre, contre 5,3 % en août.
L’allègement du mois dernier repose une fois de plus essentiellement sur un recul du prix de l’essence, qui poursuit ainsi sa décélération (d’un mois à l’autre) également pour un troisième mois consécutif. Il n’en demeure pas moins que, d’une année à l’autre, les automobilistes devaient conjuguer avec des prix de l’essence affichant une augmentation de 13,2 % le mois dernier par rapport au même mois en 2021. Et que le prix à la pompe de l’essence ordinaire se situe présentement autour de 1,71 $ le litre à Montréal et qu’il oscille entre 1,58 $ et 1,78 $ selon les régions au Québec. En décembre 2019, il s’établissait à 1,22 $ à Montréal, entre 1,13 $ et 1,32 $ dans le reste du Québec.
Lourde facture d’épicerie
Les statistiques de septembre mettent plus que jamais l’accent sur la pression sans cesse plus lourde qu’exerce la composante panier d’épicerie dans le budget des ménages. Avec une poussée de 11,4 % des prix des aliments achetés en magasin mesurée le mois dernier, la hausse d’une année à l’autre se veut la plus intense depuis celle de 11,9 % d’août 1981.
« L’augmentation des prix des aliments achetés en magasin dépasse celle de l’IPC d’ensemble depuis 10 mois consécutifs, soit depuis décembre 2021 », ajoute l’agence fédérale. Et elle demeurait généralisée, avec notamment un bond de 7,6 % pour la viande, de 9,7 % pour les produits laitiers, de 14,8 % pour les produits de boulangerie et de 11,8 % pour les légumes frais.
Le pourcentage d’articles dont la hausse sur un an est supérieure à 5 % a de nouveau augmenté, pour couvrir un peu moins de 65 % du panier de l’IPC, ont calculé les économistes du Mouvement Desjardins. Statistique Canada attribue cette poussée, entre autres, aux conditions météorologiques défavorables, à l’augmentation des prix d’intrants importants, comme les engrais et le gaz naturel, ainsi qu’à l’instabilité géopolitique découlant de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, des facteurs sur lesquels la Banque du Canada n’a évidemment aucun contrôle.
La hausse des taux d’intérêt se ressent
Autre fait saillant, les pressions haussières sur le loyer de l’argent attisées par l’austérité monétaire de la banque centrale font plus que jamais ressentir leur impact inflationniste. Statistique Canada souligne que l’indice du coût de l’intérêt hypothécaire (ICIH) a continué d’exercer une pression à la hausse sur l’IPC d’ensemble, sous le coup de l’augmentation des taux d’intérêt des prêts hypothécaires renouvelés ou obtenus. Ainsi, cet ICIH, tel que mesuré dans l’IPC, a progressé de 8,3 % d’une année à l’autre le mois dernier, inscrivant là aussi un troisième mois consécutif d’augmentation. Et cela, alors que la correction du marché immobilier résidentiel se poursuit de plus belle.
Les prix des autres dépenses pour le logement en propriété, qui abritent les commissions liées à la vente de biens immobiliers, ont progressé à un rythme moins prononcé qu’en août. La croissance d’une année à l’autre de ce poste ralentit depuis cinq mois consécutifs. Même constat pour un autre indice immobilier, celui du coût de remplacement par le propriétaire (associé au prix des logements neufs), qui affiche une augmentation moins marquée d’août à septembre et qui demeure en décélération d’une année à l’autre tous les mois depuis mai 2022.
Pouvoir d’achat érodé
Quant au pouvoir d’achat, plutôt malmené ces temps-ci, son érosion persistait le mois dernier, avec un accroissement de 5,2 % du salaire horaire moyen d’une année à l’autre. Sur 12 mois, elle a ainsi dépassé 5 % pour un cinquième mois consécutif. Mais à titre de comparaison, la croissance de l’IPC a été supérieure ou égale à 7 % de mai à août, pour descendre à 6,9 % en septembre. Sans oublier que l’on parle de salaire avant impôts. Donc, 50 ou 75 points ?