Économiser pour les générations futures
« Mes parents ne m’ont rien laissé, et [mes enfants] n’auront rien eux non plus. Ils s’arrangeront. » Voici l’une des phrases entendues dans le cadre de ma pratique que je trouve les plus difficiles à comprendre. Même si je respecte tout à fait l’opinion des gens qui la formulent, il n’empêche que cette phrase entre en contradiction avec mes valeurs, me poussant à réfléchir très souvent à sa portée et à sa signification.
Peut-être est-ce une déformation professionnelle, mais je rêve, personnellement, d’en laisser le plus possible à mes enfants ! Évidemment, il est toujours possible de se « débrouiller » ; nous sommes plusieurs à l’avoir fait.
Toutefois, sans vouloir tomber dans la peur ou dans le drame, on ne peut jamais avoir la certitude que les prochaines générations profiteront des conditions socio-économiques que nous avons eu le privilège de connaître.
Peut-être est-ce mon instinct maternel, peut-être est-ce mon sentiment de culpabilité d’avoir mis au monde des êtres humains sur une planète à l’avenir incertain, mais j’ai ce fort désir de protéger ceux qui viendront après moi.
La planète en priorité
N’en faites pas tout un tollé ! Je sais déjà qu’il est inutile de laisser un pactole à nos enfants si la survie de notre belle Terre n’est pas assurée ! Que feront nos petits-enfants de tous ces millions s’ils ne peuvent plus se nourrir ?
En plus de nous occuper de planification successorale, nous avons actuellement le pouvoir, comme investisseurs, de modeler l’économie actuelle et future en priorisant les secteurs de l’économie verte et durable, en choisissant les solutions de placement intégrant l’analyse ESG (environnementale, sociale et de gouvernance).
Au-delà de tout ça, dans un contexte tendant de plus en plus vers une polarisation des économies mondiales et une transformation des relations commerciales, nous avons, comme consommateurs, le pouvoir de soutenir en priorité l’économie locale.
Pas évident, me direz-vous, surtout quand on subit les effets de l’inflation actuelle. Faire le choix de consommer moins, mais « mieux », demeure un choix individuel. Protéger les générations futures ne se limite donc pas à optimiser votre bilan successoral et à modifier votre
testament.
Planifier ne signifie pas se priver
Un élément méconnu de la planification successorale demeure que les stratégies qui la composent n’ont pas pour intention de vous priver pendant que vous êtes bien en vie afin d’en laisser plus à votre mort ! L’approche permet plutôt l’évaluation, une fois tous vos objectifs personnels atteints, de votre valeur nette et des liquidités successorales projetées à espérance de vie.
À partir du coût de la vie souhaité de votre vivant, des stratégies d’optimisation peuvent être appliquées afin de structurer différemment le patrimoine déjà en place.
Si vous détenez un portefeuille de placements non enregistré ou détenu par le biais d’une société, il est par exemple possible de recourir à l’assurance permanente, dans une optique de diversification des actifs, et d’améliorer du même coup les liquidités disponibles pour la succession au moment du décès. Les stratégies sont nombreuses, et la planification financière intégrée offre la possibilité à l’épargnant de les choisir avant même de réviser ce fameux testament, qui gagnerait souvent à être revu au passage à la
retraite.
En somme, jouir de son vivant, mais mourir l’esprit tranquille. Si vous avez trimé dur tout au long de votre vie, loin de moi l’idée de vous convaincre de ne pas en profiter pleinement. Mais si vous aviez l’immense privilège de pouvoir faire
les deux ?
La première génération sacrifiée
Lorsque nous abordons la notion d’optimisation de la succession, plusieurs répondent que, de toute façon, s’ils décèdent à leur espérance de vie, leurs enfants seront déjà très âgés et n’auront plus besoin de cet argent. Revenons à mon désir.
Lorsque je mourrai, à 120 ans (je suis très en forme… et optimiste !), mes garçons seront déjà prêts à trépasser, eux aussi ! Mais je pourrai en laisser davantage à mes petits-enfants et à mes arrière-petits-
enfants et, ainsi, tout mettre en œuvre pour protéger plusieurs
générations.
Cette mentalité est plus forte dans d’autres cultures qu’ici au Québec, mais je suis persuadée que cela peut se transformer, le désir de réussir financièrement n’étant plus aussi tabou que dans le passé.
Vous n’avez pas de succession ? Avec la planification successorale, il est également possible de favoriser des fondations et des organismes de charité. Chacun à sa façon peut certainement contribuer à orchestrer un futur plus clément pour ceux qui viendront après nous.
Ce texte fait partie de notre section Opinion qui favorise une pluralité des voix et des idées. Il s’agit d’une chronique et, à ce titre, elle reflète les valeurs et la position de son auteur et pas nécessairement celles du Devoir.