Alerte à la récession mondiale

Hier la Banque mondiale, aujourd’hui l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Les alertes sonnent de partout. L’économie mondiale s’est engagée dans la stagflation, avec la partie « stagnation de la croissance » du mot tanguant dangereusement vers la récession. Crise humanitaire, crise du coût de la vie, crise alimentaire… Les chocs mondiaux s’intensifient. Le monde paie au prix fort cette guerre de Vladimir Poutine contre l’Ukraine.

Cette dernière phrase vient de l’OCDE. L’organisation vient de revoir à la baisse ses prévisions de croissance dans la foulée de l’invasion russe. Cette guerre insensée va coûter 1,5 point de pourcentage au PIB mondial cette année, soit l’équivalent de 1500 milliards de dollars américains. L’OCDE évoque désormais une croissance autour de 3 %, contre 4,5 % dans sa prévision de décembre. Alliée à la politique « zéro COVID » de la Chine, la guerre a entraîné l’économie mondiale sur une trajectoire de ralentissement de la croissance et de hausse de l’inflation — une situation inédite depuis les années 1970, dit-elle.

Avant elle, la Banque mondiale a évoqué un risque grandissant de stagflation, « qui aurait des conséquences délétères tant pour les pays à faible revenu que pour ceux à revenu intermédiaire ». L’institution ramenait du même souffle sa prévision de croissance mondiale, la faisant passer de 5,7 % en 2021 à 2,9 % cette année, une cible de loin inférieure aux 4,1 % pour 2022 prévus en janvier dernier. Et elle estime qu’en raison des dommages conjugués de la pandémie et de la guerre, le niveau de revenu par habitant dans les pays en développement sera inférieur de près de 5 % à la tendance pré-COVID.

La Banque mondiale a revu à la baisse ses prévisions de croissance pour 2022 dans près de 70 % des économies émergentes et en développement — notamment dans la plupart des pays importateurs de produits de base — et dans 80 % des pays à faible revenu. « Les conséquences négatives de la guerre éclipseront l’effet positif éventuel à court terme de la hausse des prix de l’énergie pour certains exportateurs de matières premières. »

Mais au-delà de la décélération généralisée de la croissance, l’inflation fait encore plus mal. D’autant qu’elle se nourrit amplement de l’envolée des prix de l’énergie et de l’alimentation, amplifiée par la dégradation continue des chaînes d’approvisionnement qu’est venue exacerber l’approche zéro COVID de la Chine. « La guerre en Ukraine a anéanti l’espoir d’une fin rapide de la hausse de l’inflation engendrée par les difficultés d’approvisionnement liées [à la] COVID-19 », constate l’OCDE, qui craint une crise alimentaire à grande échelle.

Dans un rapport sur les répercussions internationales de ce conflit déposé mercredi, l’Organisation des Nations unies parle d’aggravation des conséquences. « L’impact de la guerre sur la sécurité alimentaire, l’énergie et les finances est systémique, grave et s’accélère. Pour les populations du monde entier, la guerre menace de déclencher une vague sans précédent de faim et de misère, laissant dans son sillage le chaos social et économique », a averti le secrétaire général de l’ONU, António Guterres.

Ainsi, « 94 pays, abritant environ 1,6 milliard de personnes, sont gravement exposés à au moins une dimension de la crise (finance, alimentation ou énergie) et incapables d’y faire face. Sur ces 1,6 milliard [de personnes], 1,2 milliard ou les trois quarts vivent dans des pays gravement exposés et vulnérables simultanément aux trois dimensions ».

Démondialisation ?

La Russie et l’Ukraine sont des fournisseurs importants sur de nombreux marchés de matières premières. À eux deux, ces pays représentaient environ 30 % des exportations mondiales de blé, 20 % des exportations de maïs, d’engrais minéraux et de gaz naturel, et 11 % des exportations de pétrole, rappelle l’OCDE. De son côté, la Chine représente 19 % de l’ensemble de la production mondiale et joue un rôle clé dans les chaînes d’approvisionnement qui alimentent le commerce international.

Dans le guide annuel des matières premières CyclOpe, dont la 36e édition était publiée mercredi à Paris, on retient que cette flambée mondiale des matières premières et d’autres composants industriels illustre « la remise en cause du marché » et « la fin de la mondialisation heureuse ».

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