En phase «ours»

Wall Street tangue vers une phase dite « bear market » avec un S&P 500 ayant affiché en mi-séance une perte de 20,5 % depuis son sommet de janvier. Si l’histoire se répète… Malmené depuis le début de l’année, le marché boursier vient d’inscrire à New York sa plus longue série de pertes hebdomadaires depuis l’éclatement des valeurs technologiques en 2000. Une remontée de dernières minutes aura tout de même permis au S&P 500 d’éviter d’entrer officiellement en territoire de marché fondamentalement baissier, sa perte depuis son sommet de janvier étant ramenée à 18,7 %. Cet indice de référence ressent le poids des valeurs technologiques qui forcent également le Nasdaq à toujours plus s’enfoncer. Son repli atteint les 29 % depuis son sommet de novembre, faisant s’enliser l’indice dans sa pire déconvenue depuis le krach des titres techno de 2000.

À Toronto, Bay Street se veut plus résiliente avec un repli sous les 10 %. Le S&P/TSX compte sur le fort poids des secteurs de l’énergie et d’autres matières premières et sur une valorisation moindre, avec un ratio cours/bénéfice prévisionnel sous les 13 fois.

Poussée de fièvre inflationniste, emballement des prix de l’énergie et des matières de base alimenté par l’invasion de l’Ukraine, hausse musclée des taux d’intérêt, distorsions sur les chaînes d’approvisionnement, ralentissement de l’économie chinoise, risque de stagflation, voire crainte de récession… Les sources d’inquiétude sont multiples.

À elles seules, les fortes pressions haussières sur le loyer de l’argent jouent pour beaucoup dans l’effacement des cours boursiers, pesant à la fois sur la rentabilité des entreprises et sur le prix que l’investisseur est prêt à payer pour chaque dollar de profit. D’un appétit pour le risque au plus fort de la pandémie, l’investisseur est désormais confronté à son degré d’aversion au risque. Malgré son recul de 19 %, le ratio cours/bénéfice prévisionnel 12 mois du S&P 500 n’en demeura pas moins historiquement élevé, à 17 fois un bénéfice prévisionnel, et appelé à être révisé à la baisse avec les marges bénéficiaires des entreprises actuellement sous forte pression.

Le scénario dominant retient que le S&P 500 ne pourra éviter l’entrée en zone de « bear market », le repli moyen attendu oscillant autour des 30 % durant l’épisode.

Selon les données Refinitiv reprises par l’hebdomadaire financier américain Barron’s, Wall Street a traversé 12 marchés fondamentalement baissiers depuis la Deuxième Guerre mondiale. Ils se sont étendus entre 23 jours et 637 jours de négociation, et ont impliqué une baisse de l’indice variant entre 20,6 % et 56,8 %. Sur les 12, 9 ont inscrit une perte de plus de 25 %.

Toujours historiquement, en moyenne, un « bear market » dure 13 mois du sommet au creux, et le recul moyen du S&P 500 est de 33 %. Selon le cabinet indépendant de services financiers LPL Financial, la chute moyenne atteint les 35 % si le marché baissier est accompagné d’une récession, ou de 24 % si la banque centrale réussit plutôt un atterrissage en douceur.

Récession ou pas ? Dans leur bulletin financier de mai, les économistes de la Banque Nationale estiment que dans le processus de normalisation de la politique monétaire, la fin de l’assouplissement quantitatif devrait amplifier l’impact de la hausse des taux d’intérêt sur la croissance et éviter une inversion de la courbe de rendement, généralement annonciatrice d’une récession. Il faudra voir.

Chute de la confiance

 

Dans la foulée, la poussée de fièvre inflationniste et l’emballement des prix ont eu raison de la confiance des consommateurs canadiens. L’indice du Conference Board a perdu 11,7 points en mai, encaissant son plus fort repli depuis le début de la pandémie. Leur inquiétude au sujet des finances futures a augmenté, ils sont devenus plus frileux à dépenser et plus réfractaires à l’achat d’articles coûteux.

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