Technologie: Téléphonie sur Internet, Skype franchit un fossé
Depuis plus d'une année maintenant, cette chronique n'a de cesse de vous entretenir des avancées technologiques du logiciel de téléphonie Internet Skype. D'une simple application disponible sous environnement Windows, les concepteurs de Skype ont fait évoluer ce produit au point de le rendre accessible sous de multiples environnements logiciels.
Que l'on soit sous Mac OS X, Linux, Windows et même, Pocket PC, il est dorénavant permis de passer un coup de fil à ses connaissances, quelle que soit la plate forme utilisée. Toutefois, et plusieurs lecteurs l'ont signalé, il manque cruellement une version destinée aux téléphones intelligents fonctionnant sous Palm OS, tel le Treo, ainsi que sous Symbian OS, le système d'exploitation de choix des Nokia, Sony Eriksson et compagnie. De plus, même s'il est maintenant possible d'appeler un correspondant utilisant un téléphone filaire ou un portable à partir de son ordinateur, l'inverse n'est cependant pas encore réalisable.Or, et les lecteurs en conviendront, il est contraignant, pour ne pas dire emm..., de devoir toujours être face à son ordinateur afin de faire ses appels téléphoniques par Internet. L'idéal serait d'avoir un bon vieux téléphone pouvant recevoir et faire des appels par l'intermédiaire de Skype.
Interface
En attendant que soit lancée une éventuelle version de Skype pour les téléphones intelligents, ce qui, à notre avis, devrait se produire en 2005, la société allemande Siemens, qui fabrique, entre autres choses, des téléphones traditionnelles et sans fil, vient d'introduire un petit adaptateur destiné à « interfacer » un téléphone conventionnel sans fil à un ordinateur.
Réservé pour l'instant aux consommateurs européens, l'adaptateur Gigaset M34 est une toute petite unité qui ressemble à s'y méprendre à une clé mémoire USB et, tout comme les clés USB, ce petit adaptateur de branche dans la prise USB d'un ordinateur. Une fois branché, le Gigaset M34 est relié par ondes hertziennes aux unités sans fil de dernière génération.
Grâce à cet adaptateur, il est dorénavant possible de recevoir et de faire des appels par téléphonie Internet en utilisant le logiciel Skype installé sur un ordinateur comme passerelle. D'un simple téléphone sans fil, il est possible de virtuellement joindre tous les correspondants inscrits dans son carnet Skype.
De plus, le service payant Skype Out (n'oublions pas que le logiciel Skype est gratuit et que les connexions de PC à PC le sont aussi) permet de joindre, moyennant quelques sous la minute, n'importe qui sur la planète.
Un bémol à la stratégie de Skype
Sachant que même les téléphones traditionnels ne sont pas l'abri d'améliorations technologiques, et que le geste de Siemens sera sûrement suivi par d'autres, attendons-nous donc à voir au cours de la prochaine année d'autres fabricants imiter Siemens.
Est-ce à dire alors que l'avenir s'annonce de plus en plus rose pour Skype ? Oui, assurément. Particulièrement si les versions Palm OS et Symbian OS sont disponibles en 2005.
Cependant, pour la première fois, il est important de mettre un bémol à la stratégie de Skype. Nul ne peut nier la qualité quasi sans fautes des télécommunications effectuées à l'aide de Skype. Et à voir le nombre de personnes ayant téléchargé Skype, il est facile de constater que Skype passera bientôt de technologie utilisée uniquement par des pionniers à un produit de plus en plus accessible par la masse des internautes. Et ce bémol, c'est spécifiquement sur la technologie utilisée par Skype que je l'émets. Depuis ses tout débuts, Skype utilise une technologie propriétaire, une technologie qu'elle seule contrôle.
Un jour, et ce jour viendra assurément, particulièrement si Skype devient « de facto » la norme, Skype se devra d'ouvrir sa technologie s'il veut continuer à assumer une place de chef de file.
En effet, le passé nous a maintes fois prouvé que les technologies basées sur des normes libres et ouvertes étaient celles qui réussissaient à devenir la norme, point à la ligne. Par exemple, le courriel électronique ou encore le Web ont tous les deux comme fondement des normes libres et ouvertes. C'est ce qui permet à de nombreux éditeurs de proposer leurs produits et d'offrir le choix aux internautes.
C'est grâce à ces normes libres et ouvertes qu'aujourd'hui, vous avez le choix d'utiliser un fureteur comme Firefox, Mozilla, Opera ou Internet Explorer. Ces sont ces mêmes normes qui vous permettent d'utiliser de façon tout à fait transparente le progiciel de courrier électronique de votre choix, qu'il se nomme Outlook, Eudora ou Thunderbird.
Bref, à terme, la pression se fera forte sur Skype afin que cette société jette un peu de lest sur sa technologie. Elle n'aura d'autre choix que d'offrir aux éditeurs et fabricants une technologie libre et ouverte.
Des doutes?
N'oubliez pas que Skype est aussi l'éditeur du logiciel de P2P honni par l'industrie du disque: Kazaa. Or, à force de vouloir contrôler sa technologie et de ne pas permettre l'accès à d'autres éditeurs de logiciels, que pensez-vous qu'il se produit actuellement ? Les internautes délaissent Kazaa au profit d'autres technologies, libres et ouvertes. Bref, si comme le proverbe, le passé se porte garant de l'avenir, il est facile d'imaginer que Skype joue son avenir à long terme s'il persiste à vouloir ne pas ouvrir sa technologie. Qu'en pensez-vous amis lecteurs ?
mdumais@ledevoir.com