Les plantes pour assainir l’eau, l’air et les sols

Montréal accueillait récemment le 9e colloque de la Société québécoise de phytotechnologie (SQP). Le vaste thème « Eau, air, sol : l’épuration par les plantes » a permis d’aborder tous les volets de la décontamination et de présenter de nombreuses solutions d’avenir à la question des techniques conventionnelles souvent coûteuses, qui, d’ailleurs, montrent plusieurs limites.
Épuration de l’air
Dans nos bâtiments et à l’extérieur, en milieu urbain, l’air est la plupart du temps pollué. On y trouve de nombreux composés organiques volatils, des gaz primaires — monoxyde de carbone, oxyde d’azote, dioxyde de soufre —, un gaz secondaire comme l’ozone, de la poussière, des moisissures… Les végétaux améliorent la qualité de l’air, mais à quel point leur rôle est-il important pour nettoyer l’air des contaminants ?
Voici des chiffres qui le prouvent. Le Dr Allan Darlington, de l’entreprise ontarienne Nedlaw Living Walls, a présenté les résultats obtenus avec un biofiltre botanique, qui est, en fait, un mur végétalisé intégré à un système d’aération de bâtiment. L’efficacité dépend de la source de l’air et de la quantité d’air à générer, mais selon les résultats, ce système peut éliminer jusqu’à 47 % des polluants.
De plus, il décontaminerait l’air des bâtiments à une fraction du coût des systèmes conventionnels. Donc, en plus d’être esthétique, il serait fonctionnel et abordable. Fait intéressant : ce ne sont pas les plantes qui dégradent les différents contaminants de l’air, mais plutôt les microbes à la surface de leurs feuilles.
Puis, David J. Nowak, directeur de projet au USDA Forest Service de Syracuse (New York), a présenté des chiffres d’études américaines qui démontrent l’efficacité des arbres pour décontaminer l’air. À travers les États-Unis, grâce aux arbres ruraux et urbains, plus de 17,4 millions de tonnes de polluants sont éliminées par année. Ce service est évalué à 6,8 milliards, dont 68 % sont associés au milieu urbain.
Toujours chez notre voisin, sans la capacité des arbres à éliminer l’ozone — un gaz toxique pour l’humain —, il y aurait 850 morts de plus par année et 670 000 cas de problèmes respiratoires aigus. Ces chiffres démontrent sans équivoque l’efficacité et l’importance des arbres comme filtres de l’air, en particulier dans les villes.
Épuration des sols
Au Canada seulement, des dizaines de milliers de terrains sont pollués, et même si des milliards sont dépensés pour les décontaminer, des centaines demeurent non traités à cause des coûts exorbitants impliqués. Est-ce que la phytoremédiation pourrait être une voie plus abordable et efficace ?
Mohamed Hijri, professeur à l’Université de Montréal, chercheur pour le projet GenoRem (Genome Remediation), n’en doute pas : les recherches l’ont démontré, le microbiome de la plante — saules, champignons et bactéries — est efficace pour la décontamination des sols.
Et c’est moins cher que le dig and dump — une pratique courante pour déplacer un sol contaminé… qui ne fait que déplacer le problème. Toutefois, il faut compter entre 5 et 50 ans pour nettoyer un sol, dépendamment des polluants. De l’Université de Bordeaux, en France, le directeur de recherche Michel Mench a présenté l’impressionnant projet Greenland, pour GentleRemediation of Trace Element Contaminated Land.
Ce projet, qui se tient dans huit pays d’Europe et sur 17sites contaminés, utilise le phytomanagement* pour promouvoir la bioéconomie et faire des gains environnementaux, sociaux et de santé publique.
Du reste, même si les recherches ont prouvé l’efficacité de la phytoremédiation, des sondages réalisés pour GenoRem par Éric Montpetit, professeur à l’Université de Montréal, auprès d’experts québécois en décontamination, démontrent clairement qu’ils connaissent peu cette technique et ne la recommandent pas.
De plus, comme l’expliquait Hélène Trudeau, également de GenoRem, professeure à la Faculté de droit à l’Université de Montréal, le cadre légal actuel n’empêche pas mais ne facilite pas non plus cette approche au Québec.
Citons enfin la conférencière Marie-Claude Robert, architecte-paysagiste pour Soverdi, une société de verdissement à Montréal : « Changeons l’image de ces terrains contaminés en attente de reconversion, intervenons rapidement tout au moins avec du préverdissement*, qu’ils deviennent un symbole de renouveau. »
* Phytomanagement : ensemble des méthodes permettant la gestion de sites contaminés grâce à l’utilisation de végétaux dans une perspective de développement durable.
* Préverdissement : opération de végétalisation qui se fait généralement à faible coût et qui permet de préparer le terrain pour un aménagement plus important ultérieurement.
Épuration de l’eau
Par rapport aux États-Unis et à l’Europe, le Québec affiche un retard notable dans la gestion des eaux pluviales et des eaux contaminées. Toutefois, quelques projets intéressants en gestion des eaux de pluie, réalisés ici ou un en voie de l’être, ont été présentés au colloque, ainsi qu’un bilan et les perspectives d’avenir des marais filtrants.
Architecte-paysagiste à la Ville de Montréal, Martin Guay a décrit un projet innovant de gestion des eaux pluviales pour la rue Papineau. Michel Rousseau, également architecte-paysagiste, a analysé l’efficacité des végétaux à gérer les eaux de pluie et donné les points positifs et ceux à revoir dans cinq projets.
Pour sa part, le président de l’entreprise Enviro-Step Technologies, Dominic Mercier, a fait le bilan de dix ans d’utilisation des marais de roseau pour le traitement d’eaux usées au Québec.
Quant à Emmanuelle Demers, candidate à la maîtrise à l’Université de Montréal et lauréate de la bourse de la SQP 2014, elle a parlé de l’utilisation des plantes pour le traitement d’eaux contaminées aux agents de préservation du bois.
Finalement, le renommé Hans Brix, professeur à l’Université d’Aarhus, au Danemark, a noté les perspectives et les tendances des marais filtrants artificiels à travers le monde.
Le colloque de la Société québécoise de phytotechnologie est un événement convivial qui favorise le partage et l’avancement des connaissances en phytotechnologie. Il a accueilli plus de 130 personnes pendant deux jours. Cette année, le dernier après-midi a été organisé en collaboration avec GenoRem, qui a présenté les résultats de cinq années de recherche en phytoremédiation.
On peut avoir accès à toutes les conférences en devenant membre de la Société québécoise des phytotechnologies.
Conférences horticoles
La saison des conférences horticoles débute bientôt à la Maison Saint-Gabriel. Elles auront lieu chaque dimanche à midi, du 21 juin au 6 septembre. Elles se déroulent dans son joli jardin créé dans l’esprit du XVIIe siècle. Une occasion de rencontrer des horticulteurs tels qu’Albert Mondor, Jean-Claude Vigor et moi-même.
Une nouvelle émission
Les urbaincultrices est une nouvelle émission sur l’agriculture urbaine à MAtv Québec tous les mardis à 19 h 30. Coanimée par Marie Eisenmann (cofondatrice des Urbainculteurs) et Pénélope Garon (animatrice à MAtv), elle présente des reportages et des techniques de jardinage, puis reçoit des invités passionnés.
Dans la bibliothèque
Gardens in FranceJardins de France en fleurs
Marie-Françoise Valéry
Photos de Deidi von Schaewen
Édité par Angelika Taschen Taschen, 339 pages
Voilà un magnifique livre de table à café en trois langues — français, anglais et allemand — qui nous entraîne dans un voyage à travers plus de 40 exceptionnels jardins français. Du nord au sud, du centre à la Côte d’Azur, chaque jardin est imagé par de nombreuses et excellentes photos, et chacune est accompagnée d’un court texte descriptif.
Puisque beaucoup de ces havres de verdure sont ouverts au public, on retrouve dans les dernières pages toutes les informations nécessaires pour organiser un itinéraire de rêve : une carte du pays indiquant leur emplacement, un aperçu de chacun, leur adresse, leur site Web, etc.
Au jardin cette semaine
Le mois de juin, avec ses nuits fraîches, est encore une bonne période pour la plantation et la transplantation des vivaces, des arbustes et des arbres. C’est aussi le temps de planter les tubercules de dahlia au jardin, au soleil ou à l’ombre partielle.Également, on taille les arbustes qui ont terminé leur floraison printanière comme le lilas et le forsythia, tandis que pour les haies de cèdre ou de feuillus, on attend que la nouvelle pousse ait terminé sa croissance.
Finalement, pour une deuxième récolte des légumes qui viennent rapidement à maturité — laitue, radis, haricots, épinards —, on peut faire un nouveau semis.