Mieux-être - La responsabilité de sa santé

Notre société aime bien les sophismes. On dit «malentendants», ça permet d'augmenter le nombre de sourds et d'avoir une meilleure subvention. Les citoyens doivent-ils être tenus responsables de leur santé? m'a demandé la recherchiste de l'émission Il va y avoir du sport à Télé-Québec. Traduisons, traduisons, lui ai-je proposé. On dit «responsable» et on entend «coupable». Le citoyen est-il coupable de sa maladie? C'est bien ce qu'on veut dire quand on dit responsable de sa santé, oui?

Moi, savez-vous, j'aime bien l'idée d'être responsable de ma santé et je déteste celle d'être coupable d'une maladie. Coupable de quoi, au fait? Les gens qui ont appris a fumer dans les années 30, 40, 50, l'ont fait dans le bonheur de la culture. Lentement, la société s'est retournée contre eux; ceux qui n'ont pas suivi, oups! on ne vous soigne plus?

La viande est la meilleure source de protéines, mangez-en... jusqu'au jour où on vous dit: ça bouche les artères, devenez végétarien. Qui décide de ce qui est bon pour moi?

C'est ici que je dis que la médecine est autoritaire. Quand l'autoritarisme se dissimule, il devient paternalisme, et la médecine est paternaliste.

Quel meilleur exemple de cela, d'ailleurs, que notre docteur ministre de la Santé? Et quand papa se fâche, on ne rit plus: le masque tombe.

Tous les médecins ne sont pas paternalistes mais le glissement de sens de «responsable» vers «coupable» est pas mal généralisé, chez les médecins aussi bien que dans le grand public. La finalité de la médecine est de rétablir la santé et de ne pas faire de mal. On est encore, en cela, les héritiers d'un médecin célèbre au Ve siècle avant J.-C., qui est un des premiers à avoir eu une école et à laisser des textes.

Je parle de monsieur Hippocrate, ce Grec qui établit les fondements de la médecine. Ces fondements, c'est aussi au sein de l'aristocratie qu'ils se sont établis. Et je ne dis pas cela par hasard ou pour étaler de la culture — la médecine est aussi une affaire de classe, une affaire d'éducation, de richesse.

Pensez à ces victimes qui se plaignent de leurs 250 000 $ par an; c'est pas juste, les autres ont plus que moi... et à la place que cela prend dans le discours social.

Tous les gens ne sont pas éduqués et riches. Et dans ce «tenu responsable», il y a une exclusion implicite des pauvres ignorants. Ce sont eux, les premiers, qui seront écartés, ces gens qui n'ont pas fait ce qu'il se doit.

Voici donc ce que j'entends par «coupables de leur maladie».

Mais si on dit «responsable de sa santé», je pense à tout ce mouvement d'auto-santé, à ces gens qui sont sortis du cadre de la médecine et qui y ont recours le moins possible en se disant: le système ne marche pas, je vais m'organiser. Ces gens sont devenus responsables de leur santé, ils font toutes sortes d'expériences et ce ne sont pas tous des naïfs incrédules qui se font avoir par des verreux profiteurs.

Où entend-on parler d'eux? Dans des milieux communautaires, pardon des ONG, mais aussi dans des librairies nouvel âge, au Centre Saint-Pierre à Montréal, à travers Internet où l'information n'est pas censurée, et dans des groupes de formation. Vous seriez étonné de la vitalité de ces mouvements, de leur discours et des résultats qu'ils obtiennent, y compris, parfois, la guérison de ce que la médecine ne peut pas guérir.

Seulement, ces gens qui sont responsables de leur santé en dehors des institutions sont vulnérables car, s'ils ont du succès, ils seront attaqués de toutes parts. On dira qu'ils ne sont pas scientifiques, qu'ils ne respectent pas les standards établis, et on fait une bataille sans merci pour les éliminer.

C'est paradoxal, n'est-ce pas? Vous voulez être responsable, mais c'est moi qui décide de quoi! C'est pas être autoritaire, ça?

Sur un plan personnel, être responsable de sa santé, ça peut aussi vouloir dire: je suis informé et je modifie mes habitudes en fonction de ces informations: je mange avec ma bible — Les Aliments contre le cancer —, je fais de l'exercice, je contrôle le stress en relaxant ou en méditant, je ne fume pas, j'essaie d'être optimiste...

Le plus choquant, c'est que ces gens-là aussi tombent malades. Mais on va les soigner parce qu'ils sont de bons élèves? On va leur donner de bons points? Quand je vous dis que c'est une médecine paternaliste!

Que de plus en plus de gens soient responsables de leur santé, je le constate par vos courriels et les lettres d'information que je reçois — oui, ça passe par Internet, forcément. Évidemment, je ne peux pas dire quelle ampleur sociale cela représente, ou même si c'est un mouvement.

Je sais aussi que beaucoup de gens sont passifs face à leur santé, leur médecin, leurs pilules. Ceux-là remplissent les hôpitaux et les discours.

Je regrette juste de ne pas entendre parler davantage des autres, qu'il n'y ait pas de leader d'une contre-culture de la santé, une théorie rassembleuse... Ce serait passionnant.

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Livres reçus

- Collectif, Planète attitude santé, Le Seuil. Très beau livre.

- P. Bertrand, Exercices de perception, Éditions Liber.

- Med Express, Stress, guide pratique, Éditions Broquet.

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vallieca@hotmail.com

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