Théâtre: Une bonne main pour la visite!

Il en vient de partout. De Belgique, de France, du Mexique, d'Écosse aussi. Depuis quelques semaines déjà, Montréal est la cible, semble-t-il consentante, d'une attaque plus ou moins concertée... Depuis le trop court séjour à l'Espace Go du Duras d'Éric Vigner (La Bête dans la jungle) qui en a bouleversé plusieurs, les jeunes comédiens belges de Lorent Wanson se sont installés au théâtre Denise-Pelletier avec un En attendant Godot plutôt déstabilisant que le public du TDP accueille avec enthousiasme. Hier soir, les Mexicains du Teatro Linea de Sombra arrivaient à l'Espace libre avec Galeria de Moribundos, un spectacle-collage construit autour des objets, des obsessions et des personnages de Beckett... le tout rendu par le mime. Et toujours dans l'est de la ville, hier soir aussi à la Licorne cette fois, l'Écossais Gregory Burke assistait à la mise en lecture de son Gagarin Way — dans la traduction toute neuve d'Yvan Bienvenue —, une pièce incendiaire qui a déjà fait le tour des capitales du monde.

De la visite comme celle-là, on en recevrait tous les jours.
Pourtant, il aura fallu insister. Le collègue Stéphane Baillargeon, par exemple, aura dû régulièrement enfoncer le clou du déséquilibre des échanges culturels entre le Québec et l'Europe pour que des fonctionnaires se rendent compte de notre presque goujaterie dans le domaine, créent de nouveaux programmes et débloquent, enfin, des budgets. Cela aura pris quelques années, mais il semble désormais acquis qu'un vent d'air frais venant d'ailleurs soufflera régulièrement sur la villeÉ

Ce n'est pas qu'on étouffait avant, remarquez. Loin de là: le milieu est riche, vivant, diversifié, multiple. On sait y faire place à toutes les initiatives puisqu'il semble toujours y avoir une salle ou un espace pour accueillir les plus brillantes comme les moins bonnes des idées. Mais la venue de compagnies étrangères c'est autre chose, on l'admettra: elles apportent souvent dans leurs bagages des idées neuves et toujours, par définition, des approches différentes. On ne peut que gagner à se plonger dans le métissage que cela propose et s'ouvrir avec curiosité aux réservoirs d'imaginaire ainsi rendus accessibles. On anticipe déjà, par exemple, comment un créateur aussi profondément mexicain que Jorge A. Vargas peut se servir des objets hétéroclites, des chapeaux, des souliers percés ou trop petits et des obsessions diverses qui font des personnages de Beckett — cette galerie de moribonds — une sorte de purulente accusation à la face du monde. Métisser, c'est multiplier.

On est bien loin de la variante américaine. De la culture-produit et de la planète divertissement. Uniforme. Partout la même, occupant, achetant tout le territoire. Mondialisation par le bas, par écran interposé. Lingua franca implantée à la grandeur du globe à coup de dollars, de martèlement promotionnel et d'infotainment aussi cheap, aussi faux et inutile qu'efficace.

Alors, faut pas se gêner quand ça passe: une bonne main pour la visite!

Parmi vous

Parlant de visite, voici des nouvelles du Théâtre Parminou, une sorte d'ancêtre des petites compagnies d'ici, qui continue depuis des siècles à sillonner le Québec en offrant toute une gamme de productions s'adressant à tous les types de publics.

Cet automne, le Parminou met cinq productions sur la route. Pas de bébé, pas de bibites raconte l'histoire de Joe et Alex, «de la capacité de s'affirmer et de respecter l'autre dans les relations amoureuses». Facile à dire! aborde la problématique de la détresse des jeunes et la nécessité de prendre la parole et de se responsabiliser. Le propos de La Mamo, quel scénario est plus facile à saisir alors que Visage à trois faces, parle d'intimidation et de jeux de pouvoir. Quant à Aller savoir, c'est une production mettant en scène quatre personnages d'origine et d'aspiration différentes qui tentent un «retour au savoir».

De New-Richmond à Gatineau, de Plessisville à Chicoutimi, le Parminou visite une trentaine de villes dans tous les coins du Québec d'ici à la fin novembre. On peut se renseigner sur ses itinéraires comme sur ses activités en composant le (819) 758-0577 ou en visitant le site Internet www.parminou.com

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