Qui a déshabillé les lampadaires de la rue Saint-Denis?

On ne pouvait pas les manquer: 50 lampadaires de la rue Saint-Denis recouverts de tricots de toutes les couleurs, toutes les formes, tous les formats. De l'art urbain rigolo, tout en douceur, qui faisait sourire et rendait la ville plus belle, tout simplement.
Ne cherchez plus ces oeuvres iconoclastes, elles ont disparu. Tout d'un coup, ou à peu près. Quelqu'un les a volées. Oui, on a volé les vêtements de laine qui devaient habiller les lampadaires de la rue Saint-Denis, le temps d'un été.Qui? Pourquoi? Comment? Mystère.
Ces oeuvres sont apparues le 6 juillet dernier, gracieuseté des Ville-Laines, groupe de tricoteuses sans peur et sans reproche qui a pour mission d'habiller de laine le mobilier urbain montréalais. Les commerçants de la rue Saint-Denis, établis entre les rues Roy et Gilford, avaient commandé ces oeuvres aux Ville-Laines. Les tricots devaient rester en place jusqu'au 30 septembre. Ils se sont volatilisés en moins de trois semaines.
«L'art urbain est toujours éphémère, on n'a jamais le contrôle sur nos oeuvres une fois qu'elles sont dans la rue, mais on s'attendait à ce que ça dure plus longtemps», raconte Marilène Gaudet, membre des Ville-Laines.
Il y avait des heures et des heures de travail derrière ces pièces tricotées serré: trois mois à temps partiel, de la part des cinq tricoteuses du groupe.
«C'était bien apprécié du public et des commerçants. Ça faisait rayonner la rue Saint-Denis. Pour nous, l'art public est une façon de se différencier», dit Joël Pourbaix, directeur de la Société de développement commercial Pignons rue Saint-Denis, qui a eu l'idée d'habiller les 50 lampadaires.
C'est quand même bizarre, la disparition de ces 50 oeuvres. Les voleurs ont dû utiliser une échelle, des ciseaux, et peut-être un camion. Ils n'ont laissé aucune trace, aucun dégât. Personne ne semble les avoir vus. C'est bien joli, du tricot, mais ça ne vaut pas une fortune. Pourquoi voler tout ce matériel? Peut-être est-ce l'oeuvre d'un groupe opposé aux graffiti? Un groupe anti-tricot? Si oui, pourquoi s'opposer au tricot?
On peut quand même se consoler, parce que le parc Garneau, dans l'arrondissement du Sud-Ouest, s'habillera aussi de laine, à compter de ce jeudi soir.
Plus de 300 citoyens du quartier ont tricoté tout l'été pour recouvrir une vingtaine de bancs du parc. La maison de la culture Marie-Uguay et l'organisme Voies Parallèles ont mené ce projet formidable.
Le tricot comme objet d'art public s'appelle le yarn bombing. C'est une sorte de graffiti de laine. Le Devoir en a parlé en 2011. On en voit de plus en plus en ville. Tant mieux. Souhaitons que l'escouade anti-tricot se calme le pompon.