Bombardier - Rude journée en Bourse

L'effet combiné de la crise qui secoue l'industrie nord-américaine du transport aérien et les avaries à répétition des trains construits pour Amtrak ont donné des maux de tête à Bombardier hier. L'action de la multinationale québécoise a en effet connu l'une de ses pires journées, chutant de près de 10 % pour clore la séance à 9,04 $.

Les restructurations massives chez American Airlines, la faillite de US Airways et les prévisions pessimistes pour l'automne dans l'industrie nord-américaine du transport aérien ont déjà fait de nombreuses victimes parmi les transporteurs et les entreprises du domaine de l'aéronautique du Canada.

Pour Bombardier, les conséquences des turbulences actuelles sont évidemment désastreuses. Mais l'entreprise québécoise subit aussi le contrecoup des avaries à répétition dont sont victimes ses trains Acela Express, vendus à la compagnie américaine Amtrak.

Hier, la société ferroviaire a annoncé qu'elle retirait de la circulation la plupart de ces trains rapides qui desservent le nord-est des États-Unis après avoir découvert des fissures dans les amortisseurs de trois locomotives au cours d'une inspection de routine. Un examen minutieux de 13 des 18 autres véhicules Acela en service a aussitôt été ordonnée.

Ces trains à grande vitesse, qui peuvent atteindre 240 km/h ont été construits par un consortium formé de Bombardier, de la multinationale française Alstom ainsi que d'Amtrak.

Les trois partenaires s'accusent mutuellement d'être responsables des problèmes des Acela. Au début d'août, le président du géant ferroviaire américain, David Gunn, a signalé qu'il ne commanderait plus jamais de trains de ce type. Il a d'ailleurs refusé de prendre possession du 19e train qu'il avait commandé sous prétexte que les modifications requises n'y avaient pas été apportées. Bombardier avait alors répliqué en affirmant qu'Acela constituait la norme «en ce qui a trait à la technologie et au service de trains à haute vitesse en Amérique du Nord». Ce n'est cependant pas la première fois que Bombardier éprouve des problèmes avec ses produits ferroviaires. Au milieu des années 1980, ses trains «LRC» pour «Légers, rapides et confortables» avaient été jugés peu fiables par Via Rail. De plus, l'an dernier, l'entreprise de Valcourt a aussi connu des problèmes avec le tramway sur pneus qu'elle avait conçu pour la ville française de Nancy.

Turbulences généralisées

Jacques Kavafian, directeur de la recherche chez Octagon Capital à Toronto, croit toutefois que les problèmes de la division transport de Bombardier sont moins importants que ceux auxquels la multinationale fait face dans le domaine aéronautique.

À son avis, l'entreprise risque d'avoir de moins en moins d'acheteurs pour ses produits puisque les transporteurs retirent des avions plutôt que d'en acquérir de nouveaux.

La situation est comparable chez le fabricant de simulateurs de vol CAE. «Tous les indicateurs laissent penser que le trafic aérien ne redécollera pas cet automne. Conséquemment, la formation offerte aux pilotes pourrait être réduite», explique M. Kavafian. Hier, l'action de la compagnie a perdu 12,5 % de sa valeur — soit 0,89 $ — à la Bourse de Toronto, pour atteindre un prix plancher de 6,20 $.

M. Kavafian ne partage cependant pas le pessimisme des investisseurs américains. «C'est très saisonnier», affirme-t-il. American Airlines a annoncé hier qu'elle coupait 7000 postes. Mais «ils réduisent leur capacité après les mois de gros achalandage. Ils font ça chaque année», soutient-il.

L'analyste s'attend à ce que le nombre de voyageurs augmente au cours des six prochains mois. Si elle se confirme, cette prévision réjouira sans doute Air Canada, qui a connu cette année une baisse d'achalandage de 0,8 % comparativement à l'été dernier.

L'action du plus important transporteur aérien canadien a perdu près de 11 % de sa valeur depuis le début de la semaine, au lendemain de l'annonce de la faillite de son concurrent US Airways, le septième plus gros transporteur américain. Hier, le titre se transigeait à 5,60 $.

Même si elle a déclaré des profits pour un deuxième trimestre consécutif, la société Air Canada n'a peut-être pas fini de souffrir, croit Glenn Engel, de la firme new-yorkaise Goldman Sachs. «Les revenus des compagnies aériennes ont reculé à leurs niveaux de 1995. C'est un déclin sans précédent», d'environ 30 %, dit-il.

«Il y a trois mois, on croyait que l'économie prenait du mieux», maintenant on craint un «double plongeon», c'est à dire une seconde récession en un an.

Même la dynamique WestJet n'a pas réussi à échapper aux turbulences. Son titre a perdu 4,2 % de sa valeur pour atteindre 19,25 $ hier à Toronto. D'après M. Kavafian, c'est une véritable aubaine pour les investisseurs. Selon son évaluation et celle d'un de ses collègues de Vancouver, d'ici un an, le titre devrait en effet se transiger à environ 22 $.

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