La seconde Révolution tranquille - PQ et ADQ se réjouissent des propos de Charest
Les propos du chef libéral Jean Charest, en fin de semaine, ne semblent pas ébranler ses adversaires. Le premier ministre Bernard Landry s'est dit heureux que M. Charest se soit choisi une nouvelle cible: l'Action démocratique de Mario Dumont. Du côté de l'ADQ, on sourit largement de voir les libéraux adopter un langage adéquiste.
«Je n'ai aucune mélancolie à le voir s'occuper de quelqu'un d'autre que moi», a ainsi commenté hier M. Landry, en conférence de presse à Contrecoeur, dans sa circonscription de Verchères, sur la Rive-Sud dans la région de Montréal.Le premier ministre s'est aussi montré sceptique quant à l'objectif de M. Charest de proposer une seconde Révolution tranquille, qui viserait à réduire le rôle de l'État, plutôt qu'à l'accroître comme en 1960. «Il l'a dit à la dernière campagne électorale, ça, déjà. Pour le résultat que ça a donné, ce n'est pas moi qui vais le blâmer de redire les mêmes erreurs.»
Devant Jean Charest qui dépeint le Parti libéral du Québec comme le seul parti proposant de véritables changements, le premier ministre a décrit le Parti québécois comme un parti «souverainiste et progressiste» qui a déjà réalisé les plus grands changements qu'a connus le Québec, comme la Charte de la langue française, le zonage agricole, les places en garderie à 5 $ et la loi anti-briseurs de grève. «Nous l'incarnons parfaitement le changement», a-t-il souligné.
M. Landry présente donc le règlement de la question nationale du Québec comme l'autre grand changement à réaliser. Si le Québec avait été souverain, dit-il, le déséquilibre fiscal, «on n'en parlerait pas», non plus que la Loi fédérale sur les jeunes contrevenants, ni le rêve de rendre toutes les provinces du Canada bilingues. «Tant que le grand changement n'est pas arrivé, on a fait notre preuve qu'on était capable de bien diriger.»
Réaction de panique
«Depuis les partielles, les libéraux ont pesé sur le bouton de panique et ils se cherchent un discours. Mais copier pour diviser, c'est de la vieille politique! Les citoyens et les citoyennes du Québec sont capables de juger tout ça», disait de son côté le député de Vimont, François Gaudreau. Celui-ci est l'un des trois adéquistes élus lors des quatre élections partielles de juin. Les libéraux, eux, non seulement n'avaient fait élire personne, mais trois de leurs candidats se sont retrouvés au troisième rang.
Depuis, l'ADQ continue d'avoir le vent dans les voiles, selon les sondages, ce qui ne manque pas d'influencer les libéraux, s'amusent les adéquistes. D'où l'importance de «replacer le message de M. Charest en perspective», indiquait hier M. Gaudreau, qui tenait une conférence de presse à ce sujet au nom de son parti.
En ouverture du 20e congrès des Jeunes libéraux, qui se tenait en fin de semaine à Trois-Rivières, Jean Charest a dénoncé vivement les idées adéquistes, qu'il a comparées à celles du Reform Party. Le lendemain, le chef libéral s'engageait néanmoins à «réinventer l'État du Québec» afin de mettre fin à un gouvernement «qui contrôle et taxe tout».
Une idée que M. Charest avait déjà lancée en 1998, reconnaît François Gaudreau. Mais une idée «déjà dans notre discours à ce moment-là», rappelle celui qui, cette année-là, était déjà candidat adéquiste, dans Vimont, aux élections générales. «La réduction de l'État, s'assurer de recentrer le citoyen au coeur de nos préoccupations, c'est la pierre angulaire de notre programme politique et de notre existence», souligne-t-il.
La différence, poursuit le député adéquiste, c'est qu'en 1998, Jean Charest n'avait pas maintenu son discours en raison des réactions qu'il suscitait. «Est-ce qu'on peut se fier à un chef comme ça face à M. Mario Dumont qui tient le même langage depuis 1994 et qui n'en a pas dérogé? Et pourtant, Dieu sait que des sondages, à deux, trois ou quatre pour cent de la population qui nous appuyait, on a connu ça, nous!»
Les accusations d'extrémisme ou de simplisme ne font pas tiquer M. Gaudreau, qui a fait valoir l'importance de la dette du Québec, qui s'élève à plus de 172 milliards, tel que révélé la semaine dernière. C'est assez pour faire réfléchir et tout remettre sur la table, dit le député.
Il s'interroge par ailleurs sur la cohérence de la démarche libérale. «M. Charest parlait dimanche de réduction de l'État alors que les jeunes libéraux sont prêts à créer de nouvelles sociétés d'État comme celle sur la nationalisation de l'eau! Et il se dit prêt à collaborer avec le privé en santé et en éducation alors que, pendant les partielles, il nous accusait de vouloir remplacer la carte d'assurance-maladie par une carte de crédit. C'est drôle quand même: un message au mois de juin, un nouveau en août! Ça frise le ridicule.»