Hélène Laurendeau dénonce l’abus du marketing dans le secteur de l’alimentation

Cela fait presque 30 ansque je côtoie cette femme d’exception qu’est la nutritionniste Hélène Laurendeau. À une certaine époque, nous avons partagé des écrits dans des revues comme Sel et poivre et beaucoup échangé sur l’alimentation au Québec. Peut-être grâce à son éducation familiale, elle prônait déjà, dans la pratique quotidienne de son métier de nutritionniste, l’importance d’utiliser des produits de qualité.
Ceux qui la connaissent bien disent qu’elle est différente des autres professionnels, que ce soit par ses interventions dans les médias ou par ses prises de position, par exemple sur le chocolat, l’huile d’olive, la charcuterie artisanale ou surtout en ce qui concerne le goût des aliments.
La bande à Hélène
Mme Laurendeau est hautement respectée dans son milieu et dans ceux de la gastronomie et des journalistes en alimentation. Cette amoureuse du goût et de la science a beaucoup collaboré aux émissions de Ricardo Larrivée. Sa grande amie Brigitte Coutu, l’épouse de Ricardo, est aussi une confidente, avec qui elle aime partager des idées. Ces femmes font partie des gens qui ont favorisé les mutations alimentaires des Québécois.
Hélène Laurendeau aimerait que certains de ses collègues s’impliquent plus ouvertement dans les causes alimentaires. « Une nutritionniste peut rêver, aimer la bonne bouffe et ne pas confondre plaisir et situation médicale. » Car, selon elle, il est nécessaire dans certains cas d’user de contraintes alimentaires, sur avis médical, pour la santé d’une personne. Mais il reste que la restriction totale est souvent néfaste pour le moral.
Aussi, quand on lui parle de régimes et de produits miracles pour perdre du poids, elle crie au scandale.
Femme de convictions
Épicurienne, grande voyageuse, Hélène Laurendeau fait partie de ces gens « vrais » qui peuvent, par exemple, s’émerveiller, dans un marché, au contact d’un petit producteur qui présente un produit. Aussi, elle aime rappeler ses voyages en Provence pour ses étals de fruits confits, en Espagne pour ses nombreuses visites au marché de Barcelone et en Italie, à la découverte d’un producteur d’huile d’olive, d’un grand parmesan ou d’un jambon d’exception. Et rien ne pourra évacuer de sa mémoire la tarte aux blettes que lui préparait une amie à Nice, ni la terrasse et les odeurs d’un petit café en Espagne.
Jamais Hélène Laurendeau ne s’attarde aux calories consommées ; elle ajuste plutôt son alimentation en fonction des saisons et de la disponibilité des produits.
Ce qui la désole, parfois, c’est de voir comment certains chefs peuvent dénaturer le goût d’un plat par des artifices. « La valeur d’un produit est liée à sa fraîcheur et à son goût lorsqu’il est cuisiné. Il ne faut pas le transformer outre mesure, au risque de lui faire perdre son identité. »
Elle pose aussi un regard critique sur le manque de clarté de l’étiquetage nutritionnel, qui entraîne, selon elle, une confusion chez un grand nombre de consommateurs. Cela dit, elle croit que les gens devraient se préoccuper davantage de la composition et de l’origine des aliments qu’ils consomment.
L’importance de la transmission
Cuisiner ce qu’elle adore et transmettre ses connaissances à ses enfants est ce qui compte le plus pour Hélène Laurendeau, qui voue un culte sans limites à la famille. Elle se souvient de la façon dont sa mère lui a donné la piqûre du bien-manger. Après une longue maladie, cela a pris encore plus d’importance et donne même un sens à sa vie. Aujourd’hui, transmettre ses valeurs et ses connaissances liées à la nutrition est devenu l’une de ses grandes ambitions.
Depuis des années, tant à la radio qu’à la télévision avec le chef Jean Soulard et dans des conférences, elle ne mâche pas ses mots pour dénoncer les abus de la publicité, surtout en ce qui concerne les aliments dits « santé », un terme également galvaudé par certains médias.
Comparativement à ses débuts en nutrition et en communication, c’est une nouvelle vision qu’affiche aujourd’hui Hélène Laurendeau. Et elle rêve maintenant d’écrire sur sa vie afin de poursuivre son oeuvre d’éducation. Car, selon elle, si le Québec a pris le train en marche en ce qui concerne l’évolution des habitudes alimentaires, il existe malheureusement encore bien des déserts alimentaires dans nos villes, et il faut encore améliorer la diversité et l’accessibilité des produits ici. Il y a donc encore du chemin à faire.