La SAQ ne cherche pas le prix le plus bas

La vérificatrice générale explique également que le modèle adopté par la société d’État ontarienne ferait perdre environ 219 millions de dollars en revenus de ventes brutes annuelles à la SAQ.
Photo: Olivier Zuida Le Devoir La vérificatrice générale explique également que le modèle adopté par la société d’État ontarienne ferait perdre environ 219 millions de dollars en revenus de ventes brutes annuelles à la SAQ.

La vérificatrice générale, Guylaine Leclerc, s’en prend à la Politique d’achat et de mise en marché de la Société des alcools du Québec (SAQ). Celle-ci n’incite pas la société d’État à arracher les meilleurs prix possible à ses fournisseurs, souligne-t-elle dans le dernier « Rapport de vérification de l’optimisation des ressources » dévoilé à l’Assemblée nationale mercredi.

Plutôt que d’exiger les prix les plus bas, la SAQ fixe une fourchette de prix de détail à l’intérieur de laquelle elle compte vendre la bouteille, puis y retranche un certain pourcentage. Mme Leclerc signale que le fournisseur a en main la majoration pratiquée par la société d’État pour établir le prix de vente, et est donc en mesure d’y arrimer ses prix, parfois à la hausse.

Politique défaillante

 

La VG a cité l’exemple d’une bouteille de vin rouge de 750 ml ou 1 l que la SAQ compte vendre de 13,95 $ à 17,45 $ pour générer des ventes de 1,25 million. « Le fournisseur de vin va calculer… [La SAQ] va lui fournir une calculette pour dire : “ Bien, voici le vin que je peux vendre à la SAQ qui va entrer dans la fourchette de 14 $ à 17 $. ” Donc, si le vin qu’il a à proposer avec la calculette donne 5 $, mais que, dans le fond, lui, il l’aurait vendu 4,50 $, bien, s’il le propose à 4,50 $, la SAQ va le rejeter. Alors, cette structure d’achat, d’établissement du prix d’achat, ne favorise pas l’économie », a expliqué Mme Leclerc en conférence de presse.

Elle a du coup invité la société d’État à « renforcer » les « moyens mis en place […] pour favoriser l’obtention des meilleurs prix et des conditions les plus avantageuses ».

« [La SAQ a] intérêt à aller chercher le meilleur prix possible chez leurs fournisseurs. La SAQ est un des plus grands acheteurs de vin au monde, alors ils se doivent de s’assurer qu’ils achètent les produits au meilleur prix possible, que ce soit pour en faire bénéficier les consommateurs ou que ce soit pour en verser les dividendes [à l’État] », a rappelé Guylaine Leclerc.

Modèle ontarien

 

Le prix de détail d’une boisson alcoolique correspond au prix du fournisseur auquel la SAQ applique une majoration fixe, puis une majoration variable. La SAQ privilégie une majoration à taux dégressif, passant de 131 % (bouteille vendue à 9,85 $) à 66 % (bouteille vendue à 120 $).

De son côté, la LCBO applique une majoration linéaire de 71,5 %. D’ailleurs, les écarts de prix de détail entre la SAQ et la LCBO incitent bon nombre de consommateurs québécois à faire leurs provisions de bouteilles de vin et de spiritueux en Ontario. La SAQ estime qu’elle perd des recettes de ventes de quelque 90 millions de dollars.

Cependant, un arrimage des prix de détail de la SAQ à ceux de la LCBO aurait un « impact négatif sur la rentabilité de la SAQ », a fait remarquer la vérificatrice générale. Selon ses calculs, la SAQ subirait une baisse de ses revenus de ventes brutes annuelles d’environ 219 millions, à moins d’une augmentation de ses volumes de ventes.

Il n’en fallait pas plus pour faire bondir le député caquiste François Bonnardel, qui a demandé la fin du monopole « malsain » de la SAQ. « Le constat est fort clair : la SAQ profite de son statut de monopole pour faire payer davantage les consommateurs. C’est une stratégie délibérée qui démontre quel est devenu le mandat de cette société d’État : faire toujours plus d’argent sur le dos des consommateurs », a-t-il lancé en Chambre.

Casser le monopole

 

Le ministre des Finances, Carlos Leitão, n’écarte pas la possibilité de casser le monopole de la SAQ. Une « réflexion importante sur le modèle d’affaires de la SAQ est en train de se faire », s’est-il contenté de dire mercredi.

Les revenus du gouvernement du Québec — unique actionnaire de la SAQ — provenant de la vente des boissons alcooliques ont crû de 64 % en près de 10 ans, passant de 995 millions en 2005-2006 à 1,63 milliard en 2014-2015.

Enfin, la SAQ a dit mercredi « continuer d’optimiser ses conditions d’approvisionnement au bénéfice des clients ».


Délais incontrôlés à la Régie du logement

La Régie du logement n’a pas mis en place de procédures pour minimiser les délais de traitement, a noté la VG. Le processus de mise au rôle ne permet pas une utilisation optimale du temps d’audience. La durée moyenne réelle des 17 400 séances d’audiences tenues sur une période de deux ans et quatre mois a été de 125 minutes, alors que le temps disponible des régisseurs était de 180 minutes. « Ainsi, une proportion de ce temps (31 %) n’a pas été utilisée pour l’audition des causes. »


À voir en vidéo