Philippe Couillard associe Legault aux mouvements d’extrême droite

Dans le feu d’un débat portant sur le nombre d’immigrants que le Québec devrait accueillir dans les prochaines années, le premier ministre Philippe Couillard a associé le chef de la Coalition avenir Québec, François Legault, aux mouvements anti-immigration aux États-Unis, que peut incarner Donald Trump, ou encore en Europe, où émergent des partis populistes d’extrême droite.

Lors de la période de questions à l’Assemblée nationale, François Legault a critiqué la volonté de Philippe Couillard de hausser de 50 000 à 60 000 le nombre annuel d’immigrants que le Québec admet, « alors qu’on a déjà de graves lacunes dans l’intégration des immigrants ».

Photo: Jacques Boissinot La Presse canadienne Philippe Couillard

La réplique du premier ministre a été cinglante. « J’émets une crainte qu’on enfourche, du côté de la deuxième opposition, le mouvement de ressac anti-immigration qu’on observe au sud de notre frontière et en Europe », a-t-il déclaré.

« Je crains fort que la deuxième opposition souffle encore une fois, comme ils l’ont déjà fait, sur les braises de l’intolérance », a ajouté Philippe Couillard.

Dans un point de presse en début d’après-midi, François Legault a exigé du premier ministre qu’il retire ses propos « indignes d’un premier ministre ».

« Philippe Couillard a dépassé les limites, s’est insurgé le chef de la CAQ. Philippe Couillard, quand on lui parle de questions identitaires, c’est ses émotions qui prennent le dessus plutôt que la raison. Et ça, c’est inquiétant de la part d’un premier ministre, surtout le premier ministre d’une nation qui sera toujours vulnérable en Amérique du Nord, a avancé François Legault. De dire que parce qu’on veut défendre le français, on souffle sur les braises de l’intolérance, c’est inqualifiable. […] Je n’accepte pas ça. C’est grave comme affirmation. »

Couillard ne recule pas

En fin d’après-midi, en marge d’une conférence de presse qu’il tenait avec le gouverneur du Maine, Paul LePage, le premier ministre a refusé de retirer ses propos. « C’est très subtil, mais lorsqu’on parle des immigrants, qu’on parle de l’immigration comme d’un facteur négatif au Québec, on envoie un message volontairement ou involontairement — je ne fais pas de procès d’intention à M. Legault — qui va éveiller ce genre de sentiment. »

Ajoutant son grain de sel en Chambre, le leader parlementaire du gouvernement, Jean-Marc Fournier, a raillé « les tests de déportation » de François Legault : la CAQ propose de soumettre les immigrants à un examen de français et portant sur les valeurs dites québécoises trois ans après leur arrivée, quitte à les renvoyer dans leur pays en cas d’échec.

Dans un point de presse, le porte-parole péquiste en matière d’immigration, Maka Kotto, a pris la défense du chef caquiste. Il a qualifié la réplique du premier ministre de « réaction aberrante ». Poser des questions sur les problèmes d’intégration en emploi des immigrants est légitime, juge-t-il. « Ce n’est pas parce qu’on en pose qu’on est raciste ou xénophobe. »

À l’Assemblée nationale, la porte-parole caquiste en matière d’immigration, Nathalie Roy, a cité des chiffres du ministère qui illustrent les problèmes d’intégration des immigrants. Ainsi, de 2003 à 2012, sous un gouvernement libéral, le Québec a admis 473 000 immigrants ; or, le quart d’entre eux, ou 115 000 personnes, a quitté le Québec. Quatre-vingts pour cent des immigrants ne participent pas aux sessions d’initiation à la société québécoise, déplore aussi la CAQ.

Ce n’est pas la première fois que Philippe Couillard adresse de tels reproches à ses adversaires péquistes ou caquistes. En novembre dernier, lors d’un Conseil général de son parti, le chef libéral les avait accusés de poser des gestes « qui attisent les braises de ces démons qu’on a chez nous », tout en exprimant son « inquiétude quant à l’intolérance au Québec ».

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