Damas pourrait profiter du séisme pour se rapprocher des pays arabes

Le président Bachar al-Assad, sur l’affiche accrochée au mur, est ostracisé par plusieurs pays arabes depuis qu’il a été exclu de la Ligue arabe fin 2011, après le début du soulèvement populaire contre le régime qui a dégénéré en guerre civile.
Louai Beshara Agence France-Presse Le président Bachar al-Assad, sur l’affiche accrochée au mur, est ostracisé par plusieurs pays arabes depuis qu’il a été exclu de la Ligue arabe fin 2011, après le début du soulèvement populaire contre le régime qui a dégénéré en guerre civile.

Depuis le séisme meurtrier qui a dévasté la Syrie et la Turquie, des pays arabes ont repris contact et envoyé de l’aide au président Bachar al-Assad, qui pourrait profiter du drame pour sortir de son isolement diplomatique, estiment des analystes.

« La terrible tragédie qui a frappé la Syrie et la Turquie constitue une claire opportunité pour Bachar al-Assad », qui va « essayer de faire progresser le processus de normalisation de son régime avec le reste du monde arabe », déclare à l’AFP l’analyste Nick Heras.

Mais « cette crise humanitaire n’exonérera pas son régime aux yeux des pays occidentaux », ajoute le chercheur au New Lines Institute.

Quelques heures après le séisme lundi, le président syrien a reçu les condoléances de son homologue égyptien, premier appel entre les deux hommes depuis l’accession de Abdel Fattah al-Sissi au pouvoir en 2014.

Le président Assad est ostracisé par plusieurs pays arabes depuis qu’il a été exclu de la Ligue arabe fin 2011, après le début du soulèvement populaire contre le régime qui a dégénéré en guerre civile.

Les Émirats arabes unis, premier pays du Golfe à avoir rétabli ses relations avec Damas, ont déjà promis une aide d’au moins 50 millions de dollars et envoyé des avions chargés d’aide humanitaire.

Le roi de Bahreïn a de son côté appelé le président Assad lundi, premier contact officiel en plus de dix ans entre les deux hommes.

 

Le Liban, qui dit maintenir une politique de distanciation vis-à-vis du conflit syrien, a également envoyé mercredi une délégation à Damas, pour la première visite officielle de haut niveau depuis le début du conflit.

« Saisir l’opportunité »

L’aide humanitaire pourrait ouvrir la voie à « un canal pour un engagement diplomatique durable », estime M. Heras.

Mais Aron Lund, membre du groupe de réflexion Century International, se veut prudent.

 

« Il s’agit de messages routiniers que ces dirigeants adresseraient à n’importe quel autre chef d’État après une catastrophe naturelle majeure », selon lui.

Il estime cependant que le président syrien « va essayer de saisir l’opportunité actuelle », d’autant plus que la crise pourrait faciliter des contacts bilatéraux entre Damas et des États jusqu’ici réticents à la normalisation.

L’Arabie saoudite, qui a rompu ses liens avec Damas en 2012 et soutenu l’opposition au début du conflit, a ainsi promis une aide, y compris aux zones contrôlées par le gouvernement.

Une source au Centre d’aide humanitaire et de secours du roi Salmane a déclaré à l’AFP que l’aide serait envoyée directement à l’aéroport international d’Alep, tenu par le régime, ainsi qu’au Croissant-Rouge syrien à Damas, précisant toutefois qu’il n’y avait pas de canaux directs avec le gouvernement de M. Assad.

Le Qatar, accusé d’avoir financé l’opposition armée à M. Assad et qui n’a pas encore normalisé ses relations, a lui aussi promis son aide.

Le séisme pourrait par ailleurs accélérer le dégel des relations en cours entre Damas et Ankara, qui soutient les rebelles dans le nord-ouest du pays, selon M. Lund.

« Les deux pays ont désormais en commun un problème qui va au-delà des frontières et des désaccords politiques », estime-t-il.

Aide occidentale

 

Les efforts du régime pour sortir de son isolement sont loin d’être cantonnés au monde arabe.

Damas qualifie la guerre civile de complot fomenté par les Occidentaux et affirme que la crise économique est liée aux sanctions internationales qui frappent la Syrie depuis 2011.

 

Mais lundi, l’ambassadeur syrien aux Nations unies Bassam Sabbagh a annoncé que son pays était prêt à « travailler avec ceux qui veulent aider les Syriens ».

Le chef de la diplomatie syrienne, Fayçal Moqdad, a affirmé que le régime était prêt à « faciliter » l’arrivée de l’aide internationale.

Le Croissant-Rouge syrien a de son côté appelé à l’aide l’Agence américaine pour le développement (USAID).

Et mercredi, la Syrie a sollicité l’aide de l’Union européenne pour des secours, a annoncé le commissaire européen Janez Lenarcic, qui a encouragé les États membres à apporter cette assistance et à « s’assurer » que l’aide ne serait « pas détournée ».

Les États-Unis ont pour leur part indiqué mardi travailler avec des ONG locales en Syrie, refusant tout contact avec Damas.

 

Et jeudi, la France a annoncé une aide d’urgence à l’ensemble des régions syriennes, tout en soulignant que cela ne changeait pas l’« approche politique » de Paris vis-à-vis du régime de Bachar al-Assad.

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