La lapidation d’une femme enceinte force le premier ministre à intervenir

Des Pakistanais se sont rendus jeudi sur les lieux de la lapidation, à Lahore.
Photo: Agence France-Presse (photo) Arif Ali Des Pakistanais se sont rendus jeudi sur les lieux de la lapidation, à Lahore.

Le premier ministre pakistanais, Nawaz Sharif, a exigé jeudi des « mesures immédiates » dans l’affaire de la lapidation d’une jeune femme enceinte par ses proches devant des policiers impassibles, un crime suscitant une vague d’indignation.

Farzana Parveen, 25 ans, avait été battue à mort mardi à coups de briques par sa propre famille devant un tribunal en plein centre de Lahore, ville de plus de dix millions d’habitants dans la province du Penjab. Le crime de cette Juliette pakistanaise : s’être mariée par amour à son Roméo local sans l’assentiment de sa famille dans un pays où les unions demeurent le plus souvent arrangées.

Au Pakistan, près de 1000 femmes ou adolescentes ont été tuées l’an dernier pour avoir « déshonoré » leur famille, selon la Commission nationale des droits de la personne, qui dénonce « l’impunité » dont jouissent les auteurs de ces meurtres.

Le premier ministre Sharif a demandé jeudi aux autorités de la province du Penjab, dont Lahore est la capitale, de « prendre des mesures immédiates » dans l’affaire « du meurtre brutal d’une femme… en présence de la police ». « Ce crime est totalement inacceptable et les lois en vigueur doivent être mises en oeuvre rapidement dans cette affaire… Je demande donc au ministre en chef [du Penjab, Shahbaz Sharif, son frère] de prendre des mesures immédiates et de me soumettre dès ce soir un rapport », a-t-il ajouté sans définir ces mesures en question.

 

La loi

 

Au Pakistan, des lois en vigueur depuis le début des années 2000 interdisent les mariages forcés et pénalisent les crimes d’honneur, mais se heurtent à des coutumes ancestrales ou à une interprétation rigoriste de l’islam. Or, la police refuse le plus souvent d’intervenir dans ces affaires familiales, dénoncent des associations et des personnalités.

« Le gouvernement doit prendre des mesures fortes et urgentes pour mettre fin à ce flux continu de soi-disant meurtres d’honneur », a déclaré la commissaire des Nations unies sur les droits de la personne, Navi Pillay. Car « il n’y a pas la moindre trace d’honneur à tuer une femme », a-t-elle ajouté.

Le chef de la diplomatie britannique William Hague s’est dit « révulsé » jeudi par le « meurtre atroce » de Farzana Parveen et a exhorté Islamabad à prendre des mesures rapides pour traduire en justice les auteurs de ce crime et à juguler cette pratique. « Il n’y a absolument rien d’honorable dans les crimes d’honneur et j’en appelle au gouvernement pakistanais de faire tout ce qui est en son pouvoir pour éradiquer cette pratique barbare », a déclaré M. Hague.

 

Des aveux

 

Le mari de la Pakistanaise lapidée a admis jeudi avoir assassiné sa première épouse, nouveau rebondissement dans un drame qui suscite une vague d’indignation.

Il a dit avoir commis ce meurtre par « amour » pour Farzana, donnant à ce drame familial shakespearien une tournure aussi inattendue que macabre. « J’étais amoureux de Farzana et c’est à cause de cet amour que j’ai tué ma première femme par strangulation », a-t-il déclaré dans un entretien téléphonique.

Le fils du couple avait alors porté plainte contre son père, mais l’avait ensuite pardonné en échange du versement du prix du sang. Une fois pardonné, le père a recouvré sa liberté.

« Iqbal a tué sa première épouse il y a six ans. Il avait été arrêté, puis relâché après avoir trouvé un compromis avec sa famille », a confirmé Zulfiqar Hameed, un responsable de la police enquêtant sur le meurtre de la jeune Farzana.

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