29e InterAction Council - Israël: Vicente Fox fait la leçon à Obama

Québec — «Obama aurait dû se taire» au lieu de suggérer la création d'un État palestinien fondé sur les frontières de 1967, a déclaré l'ancien président mexicain Vicente Fox, hier, à son entrée de l'InterAction Council à Québec. En tout, quelque 20 anciens chefs d'État participaient à la 29e rencontre annuelle de ce club sélect, dont l'ancien président démocrate Bill Clinton et l'ancien premier ministre Jean Chrétien. Ceux-ci comptaient discuter entre autres choses de l'effet du «printemps arabe» sur le Moyen-Orient.
Pour M. Fox, Barack Obama devrait «laisser les populations de ces nations décider de leur avenir». Le 19 mai, Barack Obama présentait sa vision de deux États, l'un israélien, l'autre palestinien, divisés par les frontières de 1967 «adaptées». La proposition n'avait pas plu au gouvernement d'Israël. «Le problème avec les États-Unis, c'est qu'ils interviennent partout en pensant qu'ils proposent des solutions alors qu'ils ne font que créer des problèmes», a lancé M. Fox, qui a été à la tête de l'État mexicain de 2000 à 2006 après avoir mis fin à 71 ans de règne du Parti révolutionnaire institutionnel. Il a d'ailleurs fait un parallèle entre le «printemps arabe» et la démocratisation de l'Amérique latine dans les années 1970 et 1980.Pour Vicente Fox, lorsque des peuples n'arrivent pas à s'entendre, il y a l'ONU: «Il doit y avoir des efforts multilatéraux, et ce n'est certainement pas à un pays ou à un chef d'État de décider, même s'il est président des États-Unis.» Ce n'est pas la première fois que M. Fox critique l'actuel président américain. Fin mars, il déclarait par exemple qu'Obama était «partout» et semblait «débordé» par tous les dossiers — Libye, Afghanistan, etc. Il fustigeait la politique d'Obama de lutte contre la drogue et prônait leur légalisation.
Jean Chrétien a refusé de commenter les informations selon lesquelles le premier ministre Stephen Harper, au G8, aurait fait pression pour que le communiqué définitif soit exempt de toute référence aux frontières de 1967 en Israël. L'ancien premier ministre a préféré rappeler qu'il avait toujours défendu la position selon laquelle il doit y avoir deux États sur ce territoire, tout en soulignant que «les Israéliens ont le droit de vouloir avoir des frontières qu'ils peuvent défendre», faisant ainsi écho aux critiques du gouvernement Nétanyahou à l'égard de la position de Barack Obama. Insistant sur l'aspect «positif» du printemps arabe, il a noté que cela comportait des risques d'«instabilités» et «toutes sortes de pressions nouvelles, alors il va falloir faire attention». Aussi, «le printemps... il y a l'été qui vient et l'automne après!», a-t-il illustré. Dans son discours, il a du reste soutenu que «la démocratie n'arrivera jamais à la pointe d'une baïonnette», tout en indiquant qu'il est parfois nécessaire d'intervenir militairement, comme en Libye.
«Bombe hydraulique»
Les anciens chefs d'État et de gouvernement ont aussi abordé la question des problèmes liés à l'approvisionnement en eau. «Une bombe hydraulique a commencé à faire entendre son tic-tac», pouvait-on lire dans le texte d'un rapport de l'InterAction Council signé par Jean Chrétien et remis à une réunion à Toronto, en mars. Présent pour souhaiter la bienvenue aux participants, le premier ministre Charest n'a pas manqué d'évoquer le Plan Nord de son gouvernement, soulignant au passage que le Québec détenait 3 % des réserves d'eau douce de la planète. Toutefois, une des recommandations du rapport sur l'eau remis par M. Chrétien porte sur la nécessité de réduire l'utilisation de l'eau douce pour produire de l'électricité. Ce dernier a fait remarquer en point de presse que «si un pays utilise un fleuve et qu'il l'assèche, le pays en bas n'en a plus. Vous regardez dans la géographie, vous allez voir dans bien des continents, les fleuves quittent un pays pour aller dans l'autre. Ils n'ont pas de passeport eux autres!».
Par ailleurs, Helmut Schmidt, le président d'honneur de la réunion et ancien chancelier d'Allemagne de l'Ouest (1974 à 1982), a soutenu que le monde n'était pas à l'abri d'une autre crise économique grave. À ce sujet, l'homme de 92 ans a déridé l'auditoire au Salon rouge avec une blague en lien avec la crise de 2008. À ses yeux, a-t-il dit, l'humanité se divise en trois catégories: une première énorme cohorte de gens honnêtes, 99 % de la population mondiale; au pire, ils ont peut-être déjà «volé une pomme». Une seconde, très petite, est constituée d'esprits véritablement criminels. Et une troisième, terrible, mais très peu nombreuse: les banquiers d'affaires.
Les membres de l'InterAction Council seront à Québec jusqu'à demain.