Inondations - Des millions de Pakistanais sont menacés par la faim

Sukkur — Des millions de Pakistanais, confrontés à des inondations sans précédent avec des régions du Sud menacées par la montée des eaux, souffrent désormais de la faim, rapportaient hier les Nations unies.
«On ne peut pas encore parler de famine, mais je pense qu'on peut dire qu'il y a des millions de personnes frappées par la faim», a déclaré Maurizio Giuliano, porte-parole des opérations humanitaires de l'ONU. «Je pense que des millions de personnes souffrent de la faim et la faim est de toute évidence un facteur qui contribue à augmenter la vulnérabilité», a-t-il ajouté.Les inondations se sont étendues petit à petit aux zones rizicoles de tout le nord du Sind et les autorités craignent désormais pour les villes du sud du pays, telles qu'Hyderabad, Jamshoro et Thatta sur le cours de l'Indus, dont le niveau est très élevé en amont.
Environ 80 % des 3,9 millions de sinistrés de la province ont été déplacés, selon une porte-parole de l'Organisation internationale des migrations. Plus de 100 000 personnes ont abandonné Shahdakhot, toujours dans le Sind. Karachi, chef lieu de la province et capitale économique du Pakistan, à l'embouchure de l'Indus, a jusqu'ici été épargnée.
Dans la zone sinistrée, un demi-million de déplacés s'entasse dans quelque 5000 écoles, où les conditions d'hygiène, la chaleur et la promiscuité sont propices aux épidémies telles que le choléra.
La maladie
Plus de 120 000 cas supposés de dengue et de paludisme ont été recensés par les agences humanitaires de l'ONU, qui évoquent également des centaines voire des milliers de cas de diarrhée et d'affections cutanées.
Au-delà de l'urgence humanitaire, la catastrophe est lourde d'enjeux politiques. Le gouvernement pakistanais a été mis en cause pour la lenteur de sa réaction. Les organisations humanitaires islamistes, dont certaines sont liées à des mouvements armés, se sont empressées de porter secours aux sinistrés, ce qui pourrait faire le jeu de la guérilla.
Les talibans se montraient discrets depuis le début des inondations, mais une explosion a fait au moins 15 morts, hier, dans une mosquée du Sud-Waziristan, zone tribale frontalière de l'Afghanistan, où la milice est très active. Quelques heures plus tôt, sept personnes avaient trouvé la mort dans un attentat contre une assemblée traditionnelle dans la zone tribale de Kurram.
Sur le front économique, les perspectives de croissance pour 2010 s'étalent de zéro à 3 %, loin de l'objectif officiel de 4,5 %. Le coût de la catastrophe pourrait peser sur les projets de développement du Nord-Ouest, bastion de la contestation islamiste, ce qui risque d'alimenter encore l'insurrection.
Le Fonds monétaire international (FMI) arencontré hier à Washington des représentants du gouvernement pakistanais pour évoquer les conséquences de la catastrophe, qui a entraîné la destruction de 1,72 million d'hectares de récoltes, selon le ministre de l'Agriculture et de l'Alimentation. Le Pakistan a reçu plus de 800 millions de dollars de dons, a indiqué dimanche le ministre des Affaires étrangères.