Frappes mortelles à Belgorod et à Kiev

Près de 2500 citoyens russes ont fui pour la capitale régionale, Belgorod, où ils ont été pris en charge dans des centres d’hébergement temporaires.
Olga Maltseva Agence France-Presse Près de 2500 citoyens russes ont fui pour la capitale régionale, Belgorod, où ils ont été pris en charge dans des centres d’hébergement temporaires.

Au moins quatre civils ont été tués et 27 ont été blessés vendredi dans des bombardements sur la région russe de Belgorod, frontalière de l’Ukraine, dont la capitale, Kiev, a subi une sixième vague de frappes en six jours.

La région de Belgorod est visée depuis plusieurs jours par des frappes d’une intensité sans précédent en territoire russe depuis le début du conflit avec l’Ukraine en février 2022. Vendredi, le gouverneur régional a affirmé que des obus tirés par les forces ukrainiennes s’étaient écrasés sur une route près de la ville de Chebekino, située à une dizaine de kilomètres de l’Ukraine et fréquemment bombardée.

« Des éclats d’obus ont touché des voitures qui passaient. Dans l’une d’elles, deux femmes […] sont décédées sur place de leurs blessures », a déclaré Viatcheslav Gladkov, ajoutant que deux hommes avaient également été grièvement blessés.

Dans la soirée, deux autres civils ont été tués, dans le village de Sobolevka, dans un bombardement au lance-roquettes multiple Grad qui a aussi fait six blessés, dont deux enfants, a rapporté M. Gladkov.

Habitants déplacés

 

Les frappes sur la région de Belgorod se sont intensifiées dans les derniers jours, au moment où Kiev affirme s’apprêter à lancer une grande offensive dans les zones conquises par les forces russes en Ukraine. La zone la plus touchée est la ville de Chebekino, qui compte 40 000 habitants, dont une partie a fui. « Hier, plus de 850 obus sont tombés sur le district », a relevé M. Gladkov.

Jeudi, l’armée russe a affirmé avoir repoussé avec son artillerie et son aviation une tentative ukrainienne d’« envahir » la région de Belgorod, une semaine après une spectaculaire incursion d’hommes armés qui a suscité un choc en Russie.

Ces attaques sur le sol russe ont été revendiquées par des groupes se disant russes et combattant pour Kiev. Les autorités ukrainiennes ont nié toute implication.

 

Face à cette pluie de tirs, près de 2500 personnes ont fui pour la capitale régionale, Belgorod, où elles ont été prises en charge dans des centres d’hébergement temporaires, a expliqué à l’Agence France-Presse (AFP) le maire de la ville, Valentin Demidov. Une journaliste de l’AFP s’est rendue vendredi dans un stade de Belgorod transformé, accueillant près de 1000 personnes. La situation dans la ville était calme.

Les autorités russes ont également rapporté vendredi la mort de trois civils survenue lors de tirs ukrainiens sur les villes occupées de Donetsk et de Makiïvka, dans l’est de l’Ukraine.

Kiev a été visée par une nouvelle vague de drones explosifs et de missiles à l’aube, a indiqué son maire, Vitali Klitschko, précisant qu’aucune victime n’était à signaler. C’est la sixième attaque contre la capitale ukrainienne en six jours.

« Cette nuit, l’ennemi a utilisé 15 missiles de croisière et 18 drones d’attaque iraniens Shahed pour des frappes — toutes ces cibles aériennes ont été détruites par nos défenseurs », a déclaré l’armée ukrainienne. Quelques heures plus tard, l’armée russe a assuré avoir bombardé et « touché » pendant la nuit des systèmes de défense antiaérienne ukrainiens protégeant « des infrastructures militaires clés ».

« Échec stratégique » de Moscou

La Russie multiplie depuis début mai les attaques de drones et de missiles sur Kiev, souvent nocturnes, une tactique dénoncée par l’Ukraine comme visant à terroriser la population. Jeudi matin, au moins trois personnes, dont une enfant, ont été tuées à Kiev lors d’une de ces attaques. Ailleurs en Ukraine, deux personnes ont été tuées vendredi dans des bombardements dans la région de Kharkiv, et une autre l’a été dans la région de Soumy, dans le nord-est.

Sur le plan diplomatique, le secrétaire d’État américain, Antony Blinken, se trouvait vendredi en Finlande, un pays nordique frontalier de la Russie qui s’est récemment joint à l’OTAN. À cette occasion, M. Blinken a rejeté tout cessez-le-feu défavorable à Kiev, soulignant que continuer à armer et à renforcer l’Ukraine était la seule voie pour atteindre une « vraie paix ». Il a aussi estimé que l’attaque en Ukraine avait viré à l’« échec stratégique » pour Moscou.

Le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, a admis vendredi qu’une adhésion de son pays à l’OTAN était « impossible » tant que la guerre est en cours. La veille, il avait appelé les dirigeants européens réunis en Moldavie à ne plus avoir de « doutes » au sujet de l’entrée de Kiev au sein de l’Alliance atlantique.

« De telles déclarations montrent que le régime de Kiev n’est pas prêt, ne souhaite pas régler les problèmes existants à la table des négociations et n’a pas les moyens de le faire », a déclaré vendredi le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov. Il a affirmé que Moscou allait continuer à accomplir ses « objectifs » et à défendre « sa sécurité ». « Cela exclut un tel élargissement de l’Alliance [atlantique] et son rapprochement de notre frontière », a-t-il souligné.

De « nombreuses difficultés » empêchent la tenue de pourparlers, selon Pékin

De « nombreuses difficultés » empêchent en l’état la Russie et l’Ukraine d’entamer des pourparlers de paix, a estimé vendredi l’émissaire chinois pour l’Ukraine, de retour à Pékin après une tournée en Europe.

« Toutes les parties soutiennent un règlement politique » du conflit, a assuré Li Hui, dont la tournée l’a notamment conduit à Kiev et à Moscou. « Les différentes parties font face actuellement à de nombreuses difficultés qui entravent la possibilité qu’elles s’assoient [à la même table] et engagent des discussions », a-t-il déclaré à la presse, sans plus de précisions.

Mais, a-t-il ajouté, les belligérants « ne sont pas sans points de consensus ». « Les deux parties n’ont pas complètement fermé la porte à des discussions de paix », a-t-il encore assuré.

M. Li, représentant spécial pour les affaires eurasiatiques chargé de discuter du règlement du conflit armé en Ukraine, a par ailleurs pointé le rôle néfaste, selon lui, de l’aide militaire occidentale à l’Ukraine. « Si nous voulons vraiment arrêter la guerre, sauver des vies et obtenir la paix, nous ne devrions pas envoyer des armes sur le champ de bataille, a-t-il dit. Les douloureuses leçons sur la manière dont la crise en Ukraine est arrivée à la situation actuelle méritent une réflexion profonde de toutes les parties. »

L’émissaire a également laissé entendre qu’une nouvelle délégation chinoise pourrait se rendre en Europe, sans donner de précisions sur une éventuelle date ou sur sa composition.

« C’est une première fois, mais ce n’était pas la dernière », a-t-il déclaré.

Agence France-Presse


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