Des «sites de torture» russes à Kherson, au dire de Kiev

Une dame enlace une amie soldate ukrainienne de retour à Kherson.
Bulent Kilic Agence France-Presse Une dame enlace une amie soldate ukrainienne de retour à Kherson.

Le parquet général ukrainien a annoncé lundi avoir trouvé quatre « sites de torture » utilisés par les Russes à Kherson avant leur retraite forcée de la région il y a une dizaine de jours, Kiev accusant Moscou de crimes de guerre.

Par ailleurs, à la suite des tirs, d’origine indéterminée, qui se sont abattus dimanche dans l’enceinte de la centrale nucléaire de Zaporijjia, les présidents français, Emmanuel Macron, et ukrainien, Volodymyr Zelensky, ont insisté lundi, lors d’un appel téléphonique, sur « l’absolue nécessité de préserver la sécurité et la sûreté » du site.

À Kiev, le directeur régional de l’Organisation mondiale de la santé pour l’Europe, Hans Kluge, a par ailleurs prévenu la population que l’hiver menacerait la vie de millions d’Ukrainiens, après les séries de frappes russes dévastatrices sur les infrastructures énergétiques du pays.

« Cet hiver mettra en danger la vie de millions de personnes en Ukraine, a déclaré M. Kluge. Dit simplement, cet hiver sera une question de survie. »

Les dommages causés à l’infrastructure énergétique ukrainienne « ont déjà des effets dévastateurs sur le système de santé et sur la santé de la population », a-t-il ajouté.

À Moscou, le Kremlin a promis de châtier les responsables de la mort d’un groupe de soldats russes en Ukraine, dénoncée par Moscou comme une exécution, alors que Kiev affirme que ces militaires ont été tués après une fausse reddition.

Une frappe russe a par ailleurs fait un mort et trois blessés à Kherson, selon le chef adjoint de la présidence, Kyrylo Tymochenko, qui n’a pas donné plus de détails.

« À Kherson, les procureurs continuent d’établir les crimes de la Russie : des sites de torture ont été établis dans quatre bâtiments », a indiqué le parquet ukrainien sur Telegram.

Selon le parquet, les enquêteurs ukrainiens se sont rendus dans « quatre » immeubles, notamment des « centres de détention provisoire » d’avant-guerre, « où, lors de la prise de la ville, les occupants ont illégalement détenu des personnes et les ont brutalement torturées ».

« Des morceaux de matraques en caoutchouc, une batte en bois, un appareil utilisé par les occupants pour électrocuter les civils, une lampe à incandescence et des balles […] ont été saisis », a ajouté la même source, 10 jours après la reprise de Kherson par l’armée ukrainienne à l’issue d’une contre-offensive qui aura duré deux mois.

« Les travaux visant à établir les lieux des chambres de torture et de détention illégale se poursuivent », a encore affirmé le parquet général ukrainien, précisant vouloir « identifier toutes les victimes ».

Depuis la libération de Kherson, le 11 novembre, Kiev a dénoncé à plusieurs reprises les « crimes de guerre » et les « atrocités » russes dans la région de Kherson.

Moscou n’a, à ce stade, pas réagi à ces accusations.

« Punir »

Le Kremlin accuse en retour les Ukrainiens, et a promis lundi de punir les responsables de la mort d’un groupe de soldats russes en Ukraine, dénoncée comme un « crime de guerre ».

Sur la foi de vidéos mises en ligne sur les réseaux sociaux, la Russie affirme que l’armée ukrainienne a exécuté plus de 10 de ses militaires qui avaient déposé les armes.

« Naturellement, la Russie va rechercher elle-même ceux qui ont commis ce crime. Ils doivent être retrouvés et punis », a déclaré à la presse le porte-parole de la présidence russe, Dmitri Peskov.

Il a ajouté que Moscou se tournerait à cette fin vers des instances internationales, « si cela peut être utile ».

Sur la première vidéo, une dizaine de militaires présumés être russes sortent les uns après les autres d’un abri, les mains en l’air, et se couchent face contre terre sous l’injonction de soldats apparemment ukrainiens qui les tiennent en joue.

La vidéo s’interrompt brutalement au moment où une dernière silhouette surgit de l’abri et semble ouvrir le feu. Une autre vidéo filmée par un drone montre, au même endroit, une dizaine de corps de soldats gisant au milieu de flaques de sang.

Dimanche, le chargé ukrainien des droits de la personne, Dmytro Loubynets, avait déclaré que ces vidéos montraient en fait une « reddition feinte » et que les soldats russes avaient, aux termes de la législation internationale, « commis un crime de guerre en ouvrant le feu sur les forces armées ukrainiennes » après avoir feint de se rendre.

Les militaires russes tués dans cet incident « ne peuvent donc pas être considérés comme des prisonniers de guerre », avait-il soutenu.

Il y a neuf ans, l’Euromaïdan

Selon la présidence française, Emmanuel Macron « a dit sa vive préoccupation » quant aux « nouveaux tirs contre la centrale » en Ukraine, que Moscou et Kiev s’accusent mutuellement d’avoir bombardée.

Il s’en était déjà entretenu dimanche avec le directeur général de l’Agence internationale de l’énergie atomique, Rafael Grossi, qui avait dénoncé des frappes « absolument délibérées, ciblées ».

Emmanuel Macron et Volodymyr Zelensky « ont rappelé que c’était l’occupation illégale de la centrale par la Russie qui était à l’origine de la situation actuelle », a rapporté l’Élysée.

Sous la neige, l’Ukraine a célébré lundi le neuvième anniversaire du début de la révolution prooccidentale de l’« Euromaïdan », qui avait mené à la destitution d’un président prorusse au prix d’une répression qui avait fait plus d’une centaine de morts.

En retour, la Russie avait annexé la Crimée et attisé une rébellion armée dans le Donbass.

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