L’Ukraine annonce des reconquêtes à Kherson, la Russie confirme son retrait

L’Ukraine a annoncé jeudi la reconquête d’une douzaine de villages dans la région de Kherson, dans le sud du pays, où Moscou a confirmé avoir entamé son repli. Un nouveau revers pour l’armée de Vladimir Poutine.

À la mi-journée, le commandant en chef de l’armée ukrainienne, Valery Zaloujny, a annoncé que ses forces avaient avancé mercredi de « sept kilomètres, prenant le contrôle de six localités dans la direction de Petropavlivka-Novoraïsk », et repris également « six localités dans la direction de Pervomaïske-Kherson ».

Peu avant, l’armée russe avait annoncé le début de son retrait dans la région de Kherson, déplaçant ses troupes sur la rive gauche du fleuve Dniepr, un obstacle naturel derrière lequel Moscou établit une ligne de défense.

Annoncé mercredi, ce retrait implique un départ de la ville éponyme de Kherson, capitale régionale située sur la rive droite.

 

Le général en charge de l’offensive russe en Ukraine, Sergueï Sourovikine, avait annoncé que le repli se ferait « très rapidement » pour préserver la « vie de chaque soldat russe », sans donner de calendrier.

Du côté ukrainien, l’annonce a été accueillie sans triomphalisme et avec circonspection, Kiev soupçonnant un piège. Le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, a réagi mercredi avec une « extrême prudence ».

Silence du Kremlin

« Nous ne pouvons ni confirmer ni infirmer les informations relatives à un prétendu retrait des troupes russes de Kherson », a dit jeudi à la presse le général Oleksiï Gromov, représentant de l’état-major ukrainien. Mais il a également noté que, dos au Dniepr, les Russes n’ont « d’autre choix que de fuir ».

À Mykolaïv, grande ville du sud à une centaine de kilomètres au nord-ouest de Kherson, des habitants sont tout aussi méfiants. « On ne peut pas leur faire confiance, personne ne va nous rendre quoi que ce soit juste comme ça », a déclaré à l’AFP Svitlana Kyrytchenko, une vendeuse. « Ce serait le comble de la stupidité. Cela n’a aucun sens dans mon esprit », argue de son côté Igor Kossorotov, un mécanicien de 59 ans.

Le Kremlin n’a fait aucun commentaire, le breffage quotidien de son porte-parole ayant été annulé jeudi.

Il doit y avoir une reconnais­sance mutuelle que la victoire militaire n’est probable­ment pas, au sens propre du terme, réalisable par des moyens militaires

 

Le président américain, Joe Biden, a estimé pour sa part que l’annonce du repli constituait « la preuve que [les Russes] ont de vrais problèmes ».

Un retrait russe « serait une nouvelle victoire » pour Kiev, a dit pour sa part le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, depuis Rome.

Le départ de Kherson, s’il se confirme, constitue un nouveau revers cinglant pour Moscou, déjà contraint d’abandonner la région de Kharkiv en septembre. D’autant que Vladimir Poutine avait revendiqué fin septembre l’annexion de quatre régions ukrainiennes, dont Kherson, et ordonné le 21 septembre la mobilisation de quelque 300 000 réservistes pour consolider les lignes russes.

Le président russe avait aussi prévenu que la Russie défendrait « par tous les moyens » ce qu’elle considère désormais comme son territoire.

Depuis l’été, l’armée ukrainienne, forte d’armements occidentaux, a peu à peu usé les forces russes, notamment en pilonnant les ponts essentiels au ravitaillement des troupes sur la rive occidentale du Dniepr.

Fenêtre pour des négociations ?

Dans le Donbass, la Russie essaie depuis plusieurs semaines de prendre la ville de Bakhmout. « C’est devenu plus compliqué ces trois derniers jours », indique à l’AFP Vitaly, un soldat ukrainien de 26 ans. « Les Russes poussent de plus en plus, même si nos hommes tiennent leurs positions », affirme-t-il depuis Bakhmout.

Les succès de Kiev ont par ailleurs relancé les conjectures sur l’éventuelle reprise de pourparlers de paix, certains médias affirmant même que l’Occident pousse l’Ukraine à les reprendre.

« Il y a bien plus que 100 000 soldats russes tués et blessés », a déclaré mercredi le plus haut responsable militaire américain, le général Mark Milley, qui s’exprimait devant le New York Economic Club. « Même chose probablement du côté ukrainien », a-t-il ajouté.

« Il doit y avoir une reconnaissance mutuelle que la victoire militaire n’est probablement pas, au sens propre du terme, réalisable par des moyens militaires », a ajouté le général Milley, estimant qu’il existe « une fenêtre d’opportunité pour la négociation ».

Signe d’un changement de ton après une visite vendredi à Kiev du conseiller présidentiel américain Jake Sullivan, le président Zelensky a énuméré lundi ses conditions pour la reprise de pourparlers avec Moscou, dont le retrait de ses troupes du territoire ukrainien.

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