Droite et extrême droite l’emportent en Suède

Après la défaite du camp social-démocrate, la première ministre, Magdalena Andersson, a annoncé sa démission mercredi.
Photo: Jessica Gow Agence France-Presse Après la défaite du camp social-démocrate, la première ministre, Magdalena Andersson, a annoncé sa démission mercredi.

Un bloc inédit réunissant la droite et l’extrême droite a remporté mercredi de justesse les élections législatives en Suède, chassant du pouvoir la gauche, aux commandes depuis huit ans.

Au terme d’une dernière journée de dépouillement du scrutin archiserré de dimanche, la première ministre sortante, Magdalena Andersson, a reconnu la défaite du camp social-démocrate et a annoncé sa démission, laquelle sera effective jeudi.

« Maintenant, nous allons remettre de l’ordre en Suède ! » a immédiatement déclaré sur Facebook celui qui doit lui succéder, le chef du Parti modéré (conservateur), Ulf Kristersson. « Je commence maintenant le travail pour former un nouveau gouvernement efficace », a ajouté le dirigeant de droite dans son message vidéo.

Avec 176 sièges, dont 73 pour le parti d’extrême droite des démocrates de Suède (SD), le bloc de quatre partis devance de très peu celui de gauche (173 sièges), selon un dépouillement quasi final (99,9 % des bureaux de vote) des autorités électorales.

Les élections de dimanche étaient si serrées qu’il a fallu attendre l’ajout de quelques dizaines de milliers de voix manquantes mercredi.

Une bascule historique

 

La bascule est historique : jamais jusqu’ici un gouvernement suédois ne s’était appuyé au Parlement sur les démocrates de Suède, les grands vainqueurs des élections avec 20,5 % des voix et un nouveau rang de deuxième parti du pays. « Maintenant, le travail commence pour faire en sorte que la Suède soit bien de nouveau », a déclaré son leader, Jimmie Åkesson, sur Facebook, promettant d’être une « force constructive et d’initiative ».

Héritier d’un groupe néonazi à sa création, en 1988, le parti d’extrême droite s’est peu à peu banalisé dans le paysage politique suédois, entrant au Parlement en 2010 avec 5,7 % des voix, puis grimpant lors de chaque élection, sur fond de forte immigration et de problèmes de gangs criminels.

Bien que SD soit le premier parti du groupe majoritaire de droite, son dirigeant n’est pas en mesure d’avoir le soutien des trois autres partis pour devenir premier ministre, poste promis à Ulf Kristersson. L’un des points les plus compliqués concerne d’ailleurs l’ambition affichée par le parti d’extrême droite de faire partie du gouvernement : les trois partis de droite traditionnelle (modérés, chrétiens-démocrates et libéraux) y sont défavorables. Le scénario le plus probable, selon les analystes, est que SD, bien qu’il soit le plus gros des quatre partis, ne fasse qu’appuyer le gouvernement au Parlement, sans en faire vraiment partie.

Une entente fragile

 

Mais cette majorité étriquée, allant du centre droit à l’extrême droite, s’annonce bien fragile, les libéraux et SD ayant notamment des lignes politiques très divergentes sur nombre de dossiers. « Nous allons être à seulement un ou deux sièges d’une crise gouvernementale », a prévenu la sociale-démocrate Magdalena Andersson.

Ancien gymnaste, Ulf Kristersson va maintenant devoir réussir l’acrobatie de finaliser et de maintenir l’union des trois droites — libérale, conservatrice et nationaliste. C’est lui qui, fin 2019, avait pour la première fois envisagé un scénario de collaboration entre la droite et SD.

La campagne a été dominée par des thèmes favorables à l’opposition de droite : criminalité et règlements de comptes meurtriers entre gangs, intégration de l’immigration et flambée des factures énergétiques.

« C’est un triste signe de notre époque, qu’ils peuvent profiter de faire peur aux gens, avec ce qu’ils disent sur tous ces criminels, etc. », dit Larry Nilsson, un retraité de Malmö (sud). « Il n’y a que 1 ou 2 % de la population qui subit ça, la plupart des gens vivent une vie très sûre. Comment peut-on gagner une élection là-dessus ? »

« C’est effrayant, c’est étrange. Nous voyons l’idiocratie progresser partout », dit Anna Senno, une commissaire d’exposition de 39 ans.

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