La Russie coupe le gaz à la Pologne et à la Bulgarie

L’Union européenne (UE) a accusé mercredi la Russie de « chantage au gaz » après qu’elle eut coupé l’approvisionnement de la Pologne et de la Bulgarie, tandis que Moscou affirmait avoir détruit « une grande quantité d’armes » fournies par les Occidentaux aux Ukrainiens.
Le groupe russe Gazprom a annoncé mercredi avoir suspendu toutes ses livraisons de gaz à la Bulgarie et à la Pologne, assurant que ces deux pays n’avaient pas payé en roubles, comme l’exige Vladimir Poutine depuis mars.
Dénonçant un nouveau « chantage au gaz », la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a affirmé que ces deux pays membres de l’UE et de l’OTAN étaient désormais approvisionnés « par leurs voisins de l’Union européenne ».
« Il ne s’agit pas de chantage », mais d’une réponse à « des actes inamicaux », a répliqué le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, une allusion au gel des réserves russes de devises détenues à l’étranger.
La Bulgarie et la Pologne s’étaient déjà dites en mesure d’obtenir le gaz manquant par d’autres sources.
« Le Kremlin fait mal à l’économie russe, car il se prive lui-même de revenus importants », a indiqué Mme von der Leyen.
Les entreprises européennes acceptant de payer le gaz russe en roubles, comme l’exige Moscou, violeraient les sanctions de l’UE et s’exposeraient à un risque juridique « élevé », a-t-elle poursuivi.
« Aujourd’hui, le Kremlin a échoué une fois de plus dans sa tentative de semer la division parmi les États membres », a-t-elle assuré, après une réunion du groupe de coordination européen pour le gaz.
Selon des responsables européens, les ministres de l’Énergie de l’UE devraient se réunir lundi pour discuter de la situation.
Flou sur des armes détruites
De son côté, après avoir rencontré la veille le président Vladimir Poutine dans la capitale russe, le secrétaire général des Nations unies, António Guterres, est arrivé en Ukraine — sa première visite dans ce pays depuis le début de l’invasion russe. Il se rendra jeudi en banlieue de Kiev, à Boutcha, à Irpin et à Borodianka, théâtres d’exactions imputées à l’armée russe par les Ukrainiens.
Au moment où les Occidentaux intensifient leurs efforts pour armer les Ukrainiens face à la Russie, le ministère russe de la Défense a affirmé que « des hangars contenant une grande quantité d’armes et de munitions étrangères avaient été détruits » sur les terrains d’une usine d’aluminium de Zaporijjia, dans le sud de l’Ukraine. Le gouverneur de la région a cependant apporté un ferme démenti : « Aucun dépôt de munitions et d’armes n’a été touché à Zaporijjia », a-t-il rétorqué, soulignant que l’installation « n’était plus opérationnelle depuis six ans ».
Les troupes russes bombardent ponts et voies ferrées pour ralentir les livraisons d’armes occidentales à l’Ukraine, avait expliqué mardi un conseiller du ministre ukrainien de l’Intérieur, après la destruction d’un pont stratégique reliant le pays à la Roumanie.
Guerre « sur le long terme » en vue
La cheffe de la diplomatie britannique, Liz Truss, a appelé mercredi le monde à « redoubler le soutien » à l’Ukraine et à se préparer à une guerre « sur le long terme ». « Armes lourdes, chars, avions, creuser dans nos stocks, accélérer la production, nous devons faire tout ça », a-t-elle déclaré.
Vladimir Poutine a quant à lui fait une nouvelle mise en garde contre toute intervention extérieure dans le conflit en Ukraine, promettant une riposte « rapide et foudroyante ».
Les forces russes, qui intensifient depuis deux semaines leur offensive sur le Donbass, ont annoncé mercredi avoir effectué des frappes aériennes sur 59 cibles ukrainiennes.
Parallèlement, l’armée ukrainienne a, fait rare de sa part, reconnu des avancées russes à l’est — dans la région de Kharkiv et dans le Donbass, un bassin minier en partie contrôlé par des séparatistes prorusses depuis 2014. Kiev a admis que les Russes avaient pris des localités s’égrenant du nord au sud, ce qui laisse penser que Moscou veut prendre en étau une large poche encore aux mains des Ukrainiens.
À la pointe sud du Donbass, dans la ville portuaire stratégique de Marioupol, assiégée et dévastée, « l’ennemi bombarde massivement et bloque nos unités près de l’usine d’Azovstal », a dit dans son rapport quotidien le ministère ukrainien de la Défense.
Le commandant de la 36e brigade de la marine, Serhiy Volyna, a lancé un nouvel appel à l’aide et dit avoir avec lui, à Marioupol, 600 soldats blessés et des centaines de civils. « Mon message aujourd’hui est : sauvez la garnison de Marioupol, menez pour nous une opération d’exfiltration. Les gens vont simplement mourir ici […] et les civils meurent avec nous. […] La ville est quasiment effacée de la surface de la Terre », a-t-il demandé dans un message relayé sur Telegram.
Des craintes hors de l’Ukraine
Ces événements surviennent à un moment où le conflit semble vouloir s’étendre, après une série d’explosions dans la région séparatiste prorusse de Transnistrie, en Moldavie. « Nous condamnons fermement de telles actions. Les autorités veilleront à empêcher la république d’être entraînée dans un conflit », avait déclaré mardi la présidente moldave, Maïa Sandu, exhortant la population au calme.
Mercredi, les autorités de ce territoire séparatiste ont déclaré qu’un village frontalier hébergeant un important dépôt de munitions russes avait été la cible de tirs en provenance de l’Ukraine.
Pour venir en aide à l’Ukraine, la Commission européenne a proposé mercredi de suspendre dans l’UE pendant un an tous les droits de douane sur les produits importés de ce pays. La proposition doit encore être approuvée par le Parlement européen et les 27 États membres. « Cela nous permettrait de soutenir l’activité économique au maximum en Ukraine et de préserver notre production nationale », a indiqué dans la soirée le président Volodymyr Zelensky.