Des «convois de la liberté» envisagent de bloquer Paris et Bruxelles

L’objectif affiché est de bloquer Paris dès ce week-end puis de se retrouver le 14 février à Bruxelles, où devraient converger des convois venus d’ailleurs en Europe. 
Photo: Facebook L’objectif affiché est de bloquer Paris dès ce week-end puis de se retrouver le 14 février à Bruxelles, où devraient converger des convois venus d’ailleurs en Europe. 

Lannion, petite ville perdue du bout de la Bretagne, des drapeaux canadiens flottaient cette fin de semaine sur le quai d’Aiguillon, au centre-ville. Les organisateurs de la manifestation contre le passeport vaccinal ont invité les 180 participants à se joindre au convoi qui partira jeudi en direction de Paris et qui passera par Morlaix et Guingamp. Personne ne sait combien de volontaires seront du voyage, mais de tels appels retentissent depuis quelques jours d’un peu partout en France.

Alors que les images saisissantes des camionneurs bloquant Ottawa ont envahi les écrans, à Perpignan, à Lyon, à Chalon-sur-Saône, à La Rochelle et dans de nombreuses autres villes, les invitations à leur emboîter le pas se sont multipliées. Depuis une semaine, la mobilisation s’organise. L’objectif affiché est de bloquer Paris dès ce week-end puis de se retrouver le 14 février à Bruxelles, où devraient converger des convois venus d’ailleurs en Europe.

Difficile d’évaluer l’ampleur réelle d’un mouvement dont l’organisation demeure plus que nébuleuse. Depuis une dizaine de jours, un groupe Facebook appelé « Le convoi de la liberté » revendique 250 000 membres. Loin d’exprimer la seule insatisfaction des camionneurs, ce mouvement reprend plus largement les appels des opposants aux mesures destinées à combattre l’épidémie de COVID-19. On peut y lire que « les citoyens entendent récupérer leur liberté, leurs droits fondamentaux, l’accès inconditionnel aux soins, à l’éducation et à la culture et le respect des valeurs essentielles de notre Constitution ».

De nombreuses cartes des trajets s’échangent sur les réseaux sociaux, et des convois sont déjà annoncés en provenance de Nice, de Perpignan, de Bayonne, de Brest, de Strasbourg, de Lille et de Cherbourg. Ce mouvement se veut « pacifique et joyeux », a précisé Pascal Poyen, du Collectif anti-passes et liberté vaccinale de Chalon-sur-Saône. À Perpignan, les participants se sont donné rendez-vous mercredi devant le Brico Dépôt situé au nord de la ville pour prendre la direction de Paris. Les convois venant du sud-ouest de la France devraient se retrouver à Poitiers avant de gagner Tours, où de nombreux bénévoles devraient les attendre pour les ravitailler.

Un contexte différent

 

Ce ne serait pas la première fois que des poids lourds bloqueraient Paris ou Bruxelles. À la nuance près que, pour l’instant, aucun syndicat de routiers n’a fait part de son soutien à un mouvement dont certains organisateurs affirment vouloir « sortir de cette tyrannie mondiale ». Plusieurs syndicalistes sont en effet sceptiques. Selon le secrétaire politique du Syndicat belge des employés, techniciens et cadres (SETCa), Julien Dohet, cité par le quotidien bruxellois DH, ces manifestants essaient « de coller à une réalité qui est différente ».

En Europe, les routiers ont toujours été exemptés des contrôles sanitaires aux frontières. Autre différence, les chauffeurs européens sont généralement des salariés, qui ne peuvent donc disposer de leur camion sans l’autorisation de leur employeur. D’ailleurs, un certain Rémi Monde qui s’est improvisé sur Facebook porte-parole du mouvement a appelé à ne pas compter sur les routiers. Le contexte européen est aussi différent de celui du Canada dans la mesure où plusieurs pays, comme le Royaume-Uni, le Danemark et l’Espagne, ont déjà levé pratiquement toutes les restrictions contre la COVID-19. Ce qui ne saurait tarder ailleurs aussi.

Cela n’empêche pas de nombreux manifestants de vouloir se rendre à Paris et à Bruxelles en camping-car, en voiture ou même à moto. Un groupe Facebook appelé « Les motards de la liberté » revendique 11 000 membres. Les messages qui s’échangent sur le Net, et qui évoquent notamment la hausse générale des prix, ne sont pas sans rappeler le mouvement des Gilets jaunes né en 2018 et qui continue à manifester dans plusieurs villes. Dans certaines, comme Troyes, antipass et Gilets jaunes ont d’ailleurs manifesté bras dessus, bras dessous.

En pleine campagne présidentielle, les principales personnalités politiques françaises se sont tenues loin de cette initiative. Seuls des personnages plus marginaux, comme le leader des Patriotes, Florian Philippot (autrefois conseiller de Marine Le Pen) et le président de Via, l’ancien Parti chrétien-démocrate, Jean-Frédéric Poisson (aujourd’hui soutien d’Éric Zemmour), ont fait connaître leur soutien.

Ailleurs en Europe, le groupe Facebook « European Freedom Convoy » revendique 47 000 membres. S’il faut en croire certains d’entre eux, des convois pourraient partir d’Autriche, de Hongrie, du Portugal, des Pays-Bas, d’Italie et de Croatie. Sur les réseaux sociaux, les offres d’hébergement et de dons se multiplient. Ainsi à Toulouse, un certain Thierry Silve-Chartier propose « d’apporter 40 baguettes pour le déjeuner, 20 croissants et 20 chocolatines pour le goûter ».

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