Pourquoi le Portugal est-il si vulnérable aux incendies?

Dans le centre du Portugal, plusieurs pompiers luttaient pour contenir les incendies qui ont déjà fait des blessés.
Photo: Sergio Azenha Associated Press Dans le centre du Portugal, plusieurs pompiers luttaient pour contenir les incendies qui ont déjà fait des blessés.

Des étés de plus en plus chauds et longs à cause du changement climatique, une mauvaise gestion des forêts et des tactiques inadaptées des pompiers rendent le Portugal particulièrement vulnérable aux incendies, estiment les experts.

L’exode rural très marqué des régions intérieures portugaises vers les villes du littoral contribue au problème, ajoutent-ils.

Quelque 850 pompiers étaient toujours à l’oeuvre mercredi pour éteindre les braises de trois incendies de grande dimension qui ont ravagé de vastes zones de région très densément boisée de Castelo Branco, à 200 km au nord-est de Lisbonne.

Ces scènes sont devenues une routine au Portugal, où des feux de forêt dévorent chaque été les maquis de la région touristique de l’Algarve, à l’extrême sud, jusqu’aux vallées verdoyantes du nord à la frontière avec la Galice espagnole.

Une grande partie des pompiers du pays sont des volontaires et se trouvent rapidement débordés face à d’importants incendies. « Une fois le feu maîtrisé, les pompiers devraient mieux le contenir, par exemple en utilisant des retardateurs de flammes chimiques, comme c’est le cas dans d’autres pays », déclare Domingos Xavier Viegas, expert des feux de forêt au Portugal à l’Université de Coimbra.

« Souvent, un feu est sous contrôle la nuit et se rallume le matin […] Il est naturel qu’il y ait des incendies, le problème, c’est qu’au Portugal ils prennent rapidement de l’ampleur », ajoute-t-il.

Les experts recommandent aussi de planter davantage de chênes, de châtaigniers et d’autres arbres plus résistants au feu que les pins et les eucalyptus que l’on trouve partout dans le pays.

Malgré les risques de combustion, l’eucalyptus, extrêmement inflammable, est planté pour répondre à la demande de l’importante industrie de la pâte à papier du Portugal.

De plus, « actuellement le centre et le nord du Portugal sont couverts de forêts ininterrompues, sans pare-feux naturels qui pourraient ralentir ou stopper la progression des flammes », souligne Carlos Da Camara, climatologue à l’Université de Lisbonne.

« Il y a quarante ans, ces zones défrichées existaient grâce à l’agriculture et aux élevages, car le Portugal était essentiellement un pays rural. Le décor a changé » a-t-il détaillé à la chaîne de télévision privée portugaise SIC Noticias.

Depuis que les jeunes se déplacent vers les villes à la recherche de meilleures occasions, une grande partie de la population des campagnes est composée de propriétaires trop âgés pour continuer à débroussailler leurs parcelles et autour de leurs maisons, souvent nichées dans ou à proximité des forêts.

« Il y a toujours un manque de sensibilisation aux risques des incendies et de nombreux agriculteurs et résidents continuent de brûler des feuilles mortes sur leurs terres, même dans des conditions de sécheresse », précise Domingos Xavier Viegas.

Carlos Da Camara assure que les étés au Portugal sont devenus plus chauds, plus secs et plus longs en raison du changement climatique, qui augmente le risque de feux de forêt.

 

La saison des incendies, qui s’étendait de juillet à septembre, commence désormais en juin et se termine en octobre.

« Les conditions climatiques et les caractéristiques de nos forêts rendent les grands incendies inévitables », a déclaré mardi à la presse le ministre portugais de l’Intérieur Eduardo Cabrita, lors d’une visite dans les zones dévastées par les incendies à Castelo Branco.

Mais il a salué les premiers effets des mesures gouvernementales prises après les feux de forêt les plus meurtriers de l’histoire du pays, qui avaient coûté la vie à 114 personnes, en juin et en octobre 2017.

Celles-ci incluent une réduction progressive de la culture d’eucalyptus, une simplification du cadastre forestier, l’obligation pour les propriétaires de défricher dans un rayon de 50 mètres autour des maisons isolées sous peine d’amendes et même l’utilisation de chèvres pour débroussailler les sous-bois.



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