Le suspect de l’attentat de Strasbourg est abattu par les forces de l’ordre

Fin de la cavale pour l’homme le plus recherché de France. L’auteur présumé de l’attentat du marché de Noël de Strasbourg, qui a fait trois morts et plusieurs blessés, a été abattu par la police jeudi soir. Le groupe État islamique a revendiqué l’attaque dans la foulée.
Traqué depuis deux jours par des centaines de policiers, le suspect, Chérif Chekatt, a été repéré en soirée, vers 20 heures locales, alors qu’il « déambulait » dans le quartier du Neudorf, là où il avait été aperçu pour la dernière fois après l’attentat de mardi soir.
Les forces de l’ordre ont tenté de l’arrêter, mais l’homme « s’est retourné, faisant face aux fonctionnaires de police en tirant. Ils ont alors immédiatement riposté et ont neutralisé l’assaillant », a indiqué en conférence de presse le ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner.
Le procureur de Paris s’est rapidement rendu sur les lieux pour confirmer que l’homme abattu était bel et bien Chérif Chekatt.
« Merci à l’ensemble des services mobilisés, policiers, gendarmes et militaires. Notre engagement contre le terrorisme est total », a commenté sur Twitter le président français, Emmanuel Macron.
S’appuyant sur le témoignage de témoins, la police a désigné Chérif Chekatt comme le principal suspect de l’attentat perpétré dans le centre historique de Strasbourg mardi soir, au milieu du réputé marché de Noël.
Armé d’un pistolet et d’une arme blanche, il a enlevé la vie à trois personnes et en a blessé treize autres, tout en criant « Allahou Akbar » (« Dieu est le plus grand » en arabe), selon des témoins. Le suspect s’est ensuite enfui en prenant un taxi, après avoir été blessé au bras dans un échange de tirs avec des militaires. Il a été aperçu pour la dernière fois dans le quartier du Neudorf, avant que les autorités ne perdent sa trace.
Chasse à l’homme
En deux jours, plus de 700 policiers et gendarmes ont été mobilisés pour le retrouver. Les autorités allemandes, suisses et luxembourgeoises étaient également en alerte. En tout, cinq personnes ont été placées en garde à vue : les parents de Chérif Chekatt et deux de ses frères, ainsi qu’un homme ne faisant pas partie de sa famille.
Jeudi, des policiers lourdement armés ont pénétré pendant une heure et demie dans des maisons du quartier de Neudorf. « Il s’agit d’une levée de doute comme il y en a eu plusieurs depuis 36 heures. Cela n’est pas un signalement et cela ne veut rien annoncer, laissons l’enquête se poursuivre », avait alors assuré le ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner.
D’après une source policière, cette opération était conduite dans le cadre de l’enquête, mais n’avait pas pour objectif immédiat l’interpellation du suspect.
C’est finalement grâce à l’appel à témoins lancé par la police — avec la photo et la description de Chérif Chekatt — mercredi soir que l’homme a pu être neutralisé. Une femme l’aurait reconnu et l’aurait signalé jeudi après-midi, d’après une source proche de l’enquête.
Né à Strasbourg et fiché « S » (« sûreté de l’État ») pour sa radicalisation islamiste, Chérif Chekatt était bien connu des autorités. Il avait été condamné à 27 reprises en France, en Allemagne et aussi en Suisse pour des faits de droit commun. Il faisait ainsi l’objet d’un suivi par les services de renseignement intérieur.
Après cette attaque, le gouvernement français a rehaussé le niveau d’alerte à travers le pays et déployé 1800 soldats supplémentaires pour surveiller les rues et les événements très fréquentés.
Pendant que la police continuait de mener sa chasse à l’homme jeudi, la vie reprenait tranquillement dans le centre-ville de Strasbourg.
Dans la rue des Orfèvres, théâtre de l’attentat du 11 décembre, les commerces qui avaient pour la plupart gardé leurs portes closes au lendemain du drame ont rouvert au public jeudi matin. Le marché de Noël, qui attire chaque année deux millions de touristes dans la capitale alsacienne, doit quant à lui rouvrir vendredi, a indiqué le ministre de l’Intérieur.
« On doit retrouver notre quotidien et montrer qu’on n’a pas peur, sinon c’est laisser [le tireur] gagner. Mais c’est difficile de se remettre dans l’ambiance de Noël, on est bien loin du climat de magie habituel », raconte en entrevue téléphonique avec LeDevoir Sylvie Pagnoux, qui travaille pour la Pharmacie De La Rose sur la rue des Orfèvres.
Mme Pagnoux n’était pas présente au moment de l’attaque mardi soir, elle venait de fermer boutique une petite heure plus tôt lorsque les premiers coups de feu ont retenti. « La première personne touchée s’est effondrée devant notre pharmacie. On n’était pas là pour voir, mais rien que de le savoir, ça fait un choc », confie-t-elle au téléphone, manifestement encore bouleversée.
Plusieurs clients ont passé la porte de la pharmacie durant la journée, « mais moins que d’habitude », certains pour partager leurs états d’âme, d’autres pour « offrir tout leur soutien » aux employés. Dans la rue, à travers la vitre, elle pouvait apercevoir les passants défiler pour déposer des fleurs et des bougies au sol, là où des hommes et des femmes sont tombés mardi soir.
« La ville est différente, c’est très calme et silencieux en cette période pourtant si joyeuse d’ordinaire. Dans les transports en commun, les gens se regardent sans dire un mot », explique Mme Pagnoux.
« Le quartier reprend vie doucement, car c’était comme une ville fantôme [mercredi]. Tout était fermé, tout était éteint, la police avait bloqué la circulation », renchérit Tom Schmidt, qui travaille dans une horlogerie et bijouterie à quelques pas de la pharmacie. Les clients se sont faits rares jeudi dans le magasin plutôt occupé d’habitude pendant le temps des Fêtes. Une situation qui risque de se ressentir sur son chiffre d’affaires, craint-il.
De son côté, la responsable de la boutique de vêtement Saint James, Jacqueline Bouniot, se dit plutôt chanceuse d’avoir réalisé un grand nombre de ventes. « On a eu beaucoup d’attention des clients qui repartaient avec un petit quelque chose. Peut-être que c’était aussi leur façon de nous encourager dans cette épreuve », avance-t-elle, se réjouissant de voir autant de sympathie et de solidarité dans un moment aussi difficile.
Avec l'Agence France-Presse