De l’extrême gauche au Front national

Symbole de la colère contre la fermeture des hauts-fourneaux, les habitants de Hayange ont mis fin en 2014 à 17 ans de règne socialiste au profit du Front national. À 37 ans, le maire de cette ville sinistrée, Fabien Engelmann, est vite devenu un symbole dans la région.
Représentant de la CGT, dont il a été exclu malgré l’opposition des militants de sa section, il a milité à Lutte ouvrière et au Nouveau Parti anticapitaliste avant de rejoindre le FN. Plusieurs, comme le politologue Pascal Perrineau, y ont vu un parcours représentatif de nombreux militants ouvriers et des mutations du FN depuis l’arrivée de Marine Le Pen.
« Il n’y a pas de cassure, dit Fabien Engelmann. Quel est le programme qui parle le plus des classes populaires ? Marine Le Pen est le seul candidat susceptible de l’emporter qui peut changer le quotidien des ouvriers, des salariés et du petit peuple. »
Depuis son élection, plusieurs de ses décisions ont prêté à polémique : suppression de la subvention au Secours populaire, fontaine et wagons miniers repeints aux couleurs du drapeau français, et surtout création d’un festival du cochon dans une région qui n’en produit pas et alors que le maire est lui-même végétarien.
Une politique destinée à braquer la population contre les immigrés ? « Je fais une différence entre une immigration réussie et une immigration qui ne veut pas s’intégrer, dit-il. Tous les Hayangeois d’origine italienne, portugaise ou espagnole votent massivement pour nous. Ils font partie de la même civilisation. Nous avons également des Algériens et des Marocains qui sont très bien intégrés. Je n’attise pas la haine, mais à l’époque, il y avait du travail. On avait affaire à des personnes qui se sont rapidement intégrées, ont respecté nos coutumes et nos valeurs et ont rapidement appris le français. Ce n’est plus le cas. »
Le maire se veut représentatif de ces nouveaux élus dont Marine Le Pen dit qu’ils ont fait la preuve de la capacité du FN à diriger une ville, une région et éventuellement la France. « Sécurité », « propreté », « pas de dépenses somptuaires », « pas d’augmentation d’impôts » sont les maîtres mots du maire, qui avoue tout de même qu’il « ne pourra pas rallumer les hauts-fourneaux. Je ne vais pas mentir comme le font les communistes. C’est de l’utopie. Mais il faut sauver ce qui reste à sauver ».
Même si, avec Marine Le Pen, la France devait quitter l’espace de Schengen, il assure que les Hayangeois qui travaillent au Luxembourg pourront continuer à le faire. « Ça ne changera rien. Il y a toujours eu des travailleurs frontaliers ici. Le Luxembourg en a besoin. Regardez la Suisse. Beaucoup de Français travaillent en Suisse, ça ne crée aucun souci. »
Même si Marine Le Pen ne l’emporte pas au second tour de la présidentielle, Fabien Engelmann se consolera. « Si on perd avec un score entre 40 et 50 %, ce sera quand même une victoire. En 2002, Jean-Marie Le Pen n’avait fait que 19 %. Ce sera une victoire de nos idées. »