La famille au coeur du duel Fillon-Juppé

Les deux candidats qui s’affronteront lors du deuxième tour de la primaire chez Les Républicains, François Fillon et Alain Juppé.
Photo: Nicolas Tucat Agence France-Presse Les deux candidats qui s’affronteront lors du deuxième tour de la primaire chez Les Républicains, François Fillon et Alain Juppé.

L’un, François Fillon, entend supprimer le droit d’adoption pour les homosexuels. L’autre, Alain Juppé, prône une conception plus moderne de la famille : deux visions de société sont au coeur du duel à la primaire de la droite française.

À cinq jours du second tour dimanche, pour lequel M. Fillon est le grand favori, les questions liées au couple, à l’avortement et, fait rare dans la politique française, au pape, ont nourri les premières passes d’arme entre les deux anciens premiers ministres.

M. Juppé, 71 ans, divorcé et remarié, a fustigé « la vision extrêmement traditionaliste, pour ne pas dire un petit peu rétrograde sur le rôle des femmes, sur la famille, sur le mariage » de son adversaire, 62 ans.

M. Fillon, marié et père de cinq enfants, a combattu la loi sur le mariage homosexuel adoptée en 2013 par le gouvernement socialiste. Pour la primaire, il a reçu le soutien de la « Manif pour tous », association d’opposants au mariage gai qui a mobilisé dans la rue des dizaines de milliers de Français, dont de nombreuses familles catholiques.

M. Juppé a indiqué qu’il ne reviendrait pas sur cette loi. Son rival veut la réécrire pour supprimer l’adoption plénière pour les couples homosexuels.

Interrogé cet été dans la presse, M. Juppé jugeait : « Il faut regarder le monde tel qu’il est […], marcher avec son temps. » Il rejoint cependant son rival sur l’interdiction de la procréation médicalement assistée aux couples de femmes et sur la gestation pour autrui.

Il faut regarder le monde tel qu’il est [...], marcher avec son temps

 

Le pape

Le pape a même été invoqué dans le débat. « Je dis à mes coreligionnaires catholiques que moi, je suis plus proche de la parole du pape François que de la Manif pour tous ! », a lancé Alain Juppé qui se définit comme un « catholique agnostique ».

« Je ne suis pas sûr qu’il ait totalement écouté et lu le Pape François […] » qui, sur la plupart des sujets polémiques, « dit la même chose que moi », a répondu son adversaire, catholique pratiquant.

Pour le politologue Jérôme Fourquet, la primaire réunit un « segment particulier » où les catholiques pratiquants représentent 15 % de l’électorat, alors que la France en compte 10 %. « Ces électeurs sont nettement moins abstentionnistes que la moyenne, leur poids s’en trouve donc rehaussé », dit-il.

Sujet sociétaux

 

Pour l’électorat de droite, les sujets sociétaux sont déterminants.

« Je vote Fillon pour ses positions sur la famille, l’homosexualité », résume Camille Roullier, Parisienne de 38 ans, qui n’a pas regardé le reste de son programme. « Avec Juppé, il y a quand même plus de mollesse », estime cette mère de famille rencontrée devant l’établissement catholique Stanislas, dans un quartier bourgeois de la capitale.

« Il y a deux visions qui s’affrontent : l’une très traditionaliste, l’autre plus smooth », souligne un enseignant de ce lycée, 59 ans. « Moi je suis pour vivre et laisser vivre. L’autre vision, c’est du dogmatisme », estime ce pro-Juppé, qui se présente par son prénom, Amedeo.

François Fillon est « incontestablement » plus « réac » qu’Alain Juppé, a jugé mardi la ministre des Familles et des Droits des femmes, Laurence Rossignol.

« Sa conception de la famille n’est pas fondée sur une famille moderne avec des femmes qui travaillent. Sa politique familiale est bien davantage tournée vers les allocations que vers les modes de garde » permettant aux deux parents d’avoir une activité, selon elle.

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