Dieudonné arrêté par les autorités françaises sur le qui-vive

Dieudonné avait publié sur sa page Facebook un message disant : « Je me sens Charlie Coulibaly ».
Photo: Patrick Kovarik Agence France-Presse Dieudonné avait publié sur sa page Facebook un message disant : « Je me sens Charlie Coulibaly ».

France — L’interpellation puis l’inculpation mercredi de l’humoriste français controversé Dieudonné pour « apologie du terrorisme », après les attentats qui ont bouleversé la France, est emblématique de la volonté affichée par les autorités de ne rien tolérer sur ce terrain.

Du président François Hollande au premier ministre Manuel Valls en passant par la ministre de la Justice Christiane Taubira, les responsables de l’exécutif multiplient, avec l’aval de l’opposition de droite, les mises en garde à tous ceux qui seraient tentés par des propos menaçants ou racistes. « Dans ces moments où la nation doit montrer son unité, les propos ou agissements répréhensibles, haineux ou méprisants, proférés ou commis en raison de l’appartenance à une religion, doivent être combattus et poursuivis avec la plus grande vigueur », a affirmé mercredi Mme Taubira dans une directive aux procureurs.

Elle a souligné la multiplication « des attaques ou dégradations contre les lieux de culte, des atteintes aux biens ou aux personnes en raison de leur religion, des violences ou menaces à l’encontre des forces de sécurité, des propos racistes, antisémites, discriminatoires ou faisant l’apologie du terrorisme », depuis l’attentat contre Charlie Hebdo, le 7 janvier.

Dieudonné, qui a été placé en garde à vue mercredi matin, comparaîtra en justice pour « apologie du terrorisme » en relation avec les attentats, a appris l’Agence France-Presse de source judiciaire. Le parquet de Paris a décidé de le convoquer « à une audience ultérieure » à l’issue de sa garde à vue mercredi soir.

La justice avait lundi ouvert une enquête, après la parution sur Facebook d’un message de l’humoriste, adepte des provocations et déjà condamné pour propos antisémites, affirmant « Je me sens Charlie Coulibaly ».

Une formule qui associe le nom d’un des trois djihadistes qui ont frappé à Paris, Amédy Coulibaly, qui a assassiné quatre juifs vendredi, au slogan « Je suis Charlie » repris par des millions de manifestants, en France et dans le monde, qui cette semaine ont rendu hommage aux 17 victimes des attentats.

54 arrestations

 

Depuis l’attentat à Charlie Hebdo, 54 procédures judiciaires ont été ouvertes pour apologie du terrorisme et menaces d’actions terroristes, selon le ministère de la Justice.

À elle seule, l’apologie du terrorisme concerne 37 procédures. Seule une menace, sur les 17 enregistrées, a donné lieu à une saisine du parquet antiterroriste.

Quelques condamnations ont déjà été prononcées. La plus importante concerne un homme de 34 ans condamné à quatre ans de prison fermes à Valenciennes pour avoir fait l’apologie de deux des djihadistes lors de son arrestation après un accident de voiture en état d’ivresse.

Un jeune homme de 21 ans a été condamné à 10 mois de prison fermes à Toulouse après avoir clamé, dans le tramway, sa solidarité avec les assassins. Un autre l’a été à un an de prison, dont neuf mois avec sursis, pour apologie du terrorisme sur Facebook.

Et, dans une condamnation qui fait redouter que les juges aient la main lourde en cette période exceptionnelle, un homme de 28 ans souffrant d’une légère déficience mentale a été condamné mercredi à six mois de prison fermes dans l’est de la France pour avoir crié à des policiers : « Ils ont tué Charlie, moi j’ai bien rigolé. »

Mardi, François Hollande et Manuel Valls avaient publiquement réclamé la plus grande fermeté contre les « actes antisémites et antimusulmans » et leur apologie. « Nous devons être intraitables devant l’apologie du terrorisme et devant ceux qui s’y livrent, et notamment les djihadistes qui se rendent en Irak ou en Syrie », avait déclaré M. Hollande, lors d’une cérémonie d’hommage aux trois policiers tués lors des attentats. Dans un vibrant discours unanimement ovationné par les députés, M. Valls avait appelé la justice à être « implacable à l’égard de ces prédicateurs de la haine », faisant référence à Dieudonné.

Si certains internautes ont salué l’interpellation de Dieudonné, d’autres à l’inverse ont dénoncé un « deux poids, deux mesures » de la justice française, qui laisserait faire lorsqu’on raille l’islam et se montrerait inflexible dans d’autres circonstances.

Charlie Hebdo avait publié en 2006 des caricatures du prophète Mahomet, qualifiées de blasphématoires par certains musulmans.

 

« Je ne peux pas blairer Dieudonné et sa clique nauséabonde, mais il semble qu’en France la liberté d’expression soit à géométrie variable », twittait un internaute après l’annonce que l’humoriste était en garde à vue.

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