Seize ans de réclusion dans l’affaire de l’amiante en Italie

Le tribunal de Turin a condamné aujourd'hui deux anciens patrons du groupe Eternit à 16 ans de prison pour homicide par négligence après le décès de 2000 anciens employés, qui ont succombé à un cancer provoqué par l’amiante.

L’ex-propriétaire du groupe suisse Stephan Schmidheiny et le baron belge Jean-Louis de Cartier de Marchienne, ex-administrateur d’Eternit Italie, ont tous deux été condamnés à 16 ans de réclusion, selon le verdict lu par le juge Giuseppe Casalbore après un procès qui a duré deux ans.

Le ministère public a enquêté sur des milliers de cas d’employés italiens qui ont travaillé pour Eternit dans les anciennes usines de Campanie, d’Emilie-Romagne et du Piémont et qui sont décédés d’un cancer provoqué par l’amiante, le mésothéliome.

Les accusés affirmaient de leur côté avoir tout fait pour limiter les risques dus à l’amiante et informer le public. Les fibres d’amiante, un matériau de construction largement utilisé jusqu’à la fin des années 80 et interdit en Suisse en 1990, peuvent être à l’origine de maladies incurables qui ne se manifestent souvent que 20, 30, 40 ans ou plus tard encore après l’exposition.

«C’est vraiment historique», a salué le ministre italien de la Santé Renato Balduzzi. Et de relever que la sentence est tombée après une «longue bataille» judiciaire. «C’est un grand jour, mais cela ne signifie pas que le combat contre l’amiante est terminé», a-t-il ajouté sur la channe Sky TG24, ce problème étant mondial.

Des centaines de personnes, pour la plupart des proches des victimes, s’étaient massées aux abords de la salle d’audience pour écouter le verdict. Certaines ont fondu en larmes à l’annonce de la peine. En France, l’Association des accidentés de la vie (FNATH) a salué une «victoire» pour les victimes italiennes et souhaité, dans un communiqué, que les autorités françaises «s’inspirent de cet exemple italien pour que les victimes de l’amiante et leurs familles ne soient pas toutes décédées ou trop âgées pour que leurs plaintes, déposées, il y a plus de 15 ans, aboutissent, enfin, à un procès pénal de l’amiante en France avec des accusés encore en vie».

Deux heures après le prononcé de la condamnation, le juge Casalbore était toujours en train de lire le détail du verdict. Il inclut notamment des indemnités financières pour quelque 6300 victimes ou proches directement concernés.

Selon l'agence de presse italienne LaPresse, les accusés sont condamnés à verser 25 millions d’euros à la ville de Casale Monferrato, où était située l’une des usines du groupe et où l’amiante était utilisée pour la construction de routes. Près de 20 millions d’euros iraient à la région du Piémont. Au total, l’indemnité se monterait en moyenne à 35 000 euros par plaignant.

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