Présidentielle serbe - L'ultranationaliste Nikolic est en tête

Un tramway nommé Tomislav Nikolic, l’adversaire ultranationaliste du président serbe sortant, Boris Tadic.
Photo: Agence France-Presse (photo) Un tramway nommé Tomislav Nikolic, l’adversaire ultranationaliste du président serbe sortant, Boris Tadic.

La Serbie votait hier lors d'une présidentielle cruciale pour son avenir et qui oppose un candidat favorable à l'Union européenne à un ultranationaliste, alors que la province du Kosovo doit proclamer prochainement son indépendance. Le président sortant, Boris Tadic, 50 ans, un réformateur pro-UE avait comme principal adversaire l'ultranationaliste eurosceptique Tomislav Nikolic, 55 ans, qui a fini premier au premier tour.

Belgrade — Le candidat nationaliste Tomislav Nikolic est arrivé en tête du premier tour de l'élection présidentielle serbe d'hier avec 39,6 % des voix, suivi du président sortant Boris Tadic, avec 35,5 %, ont rapporté des observateurs de l'organisation indépendante Cesid après dépouillement de 90 % des bulletins. Un second tour sera dès lors nécessaire, le 3 février, pour départager les deux hommes.

«J'y réfléchirais à deux fois avant de dire qui est le favori», a déclaré l'analyste politique Djordje Vukadinovic. «Ce résultat annonce un duel très imprévisible au second tour.»

Participation record

Des observateurs estiment que le taux de participation record de 61 % reflète la crainte de certains électeurs peu engagés politiquement qu'une victoire de Nikolic retarde les réformes et plombe les perspectives d'adhésion de la Serbie à l'Union européenne (UE). «Les gens ont réalisé qu'il s'agit d'une élection très importante et que, en fonction de qui l'emportera, la Serbie décidera de sa future orientation, vers l'UE ou la Russie», explique Djordje Vukovic, de la cellule de réflexion Cesid. Pour l'emporter au second tour, les deux candidats tenteront de s'assurer les voix des électeurs qui ont voté pour des tiers en promettant une amélioration du niveau de vie et des emplois.

Nikolic, dont le Parti radical a repris à son compte les politiques de feu Slobodan Milosevic, table sur la Russie et le non-alignement, tendance ancienne dans l'ex-Yougoslavie. Il a tempéré son discours nationaliste pour séduire les modérés et les laissés-pour-compte de la transition post-soviétique qui regrettent la couverture sociale offerte du temps de la Yougoslavie. Mais il refuse tout compromis sur la province sécessionniste du Kosovo et souhaite que la Serbie trouve un équilibre dans ses relations avec l'Est et l'Ouest.

«Si l'Union européenne veut ouvrir ses portes et ne plus imposer d'obstacles, nous serons heureux d'adhérer à l'UE», a-t-il déclaré hier en promettant qu'il n'y aurait «plus d'humiliations».

Les principales humiliations appréhendées par les Serbes de la part de l'Occident concernent le Kosovo, placé sous protectorat des Nations unies depuis 1999, lorsque les forces de l'OTAN ont expulsé les troupes serbes accusées d'atrocités contre les Albanophones.

La perspective de la perte, dans les prochains mois, du Kosovo, considéré par les Serbes comme le berceau de leur culture, risque d'envenimer les relations avec l'Union européenne, et le prochain président sera soumis à ce sujet à des pressions tant intérieures qu'extérieures.

De nombreux Serbes estiment que le pays a déjà suffisamment payé pour son rôle dans les guerres des années 1990 dans l'ex-Yougoslavie, et la perspective d'une reconnaissance de l'indépendance du Kosovo par les États-Unis et par la plupart des pays de l'Union européenne pourrait entraîner un regain de nationalisme.

Tadic est lui aussi opposé à l'indépendance du Kosovo, mais il plaide néanmoins pour la signature d'un Accord de stabilisation et d'association (ASA) avec l'UE, considéré comme un premier pas sur la voie d'une adhésion au bloc communautaire.

Nikolic était déjà arrivé en tête du premier tour en 2004, avant d'être battu au second tour par Tadic. Ce dernier a mis en garde contre les risques de retour à l'époque Milosevic en cas d'élection de son rival.

«Le risque existe d'un retour de la vieille garde qui a conduit la Serbie dans des conflits et dans l'isolement pendant les années 1990 et conduit sa population dans le trouble et l'incertitude», a dit le président sortant.

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