Sous Trump, une nouvelle vague d’extrême droite émerge

Les groupes d'extrême droite étaient nombreux samedi au rassemblement de Charlottesville.
Photo: Chip Somodevilla Getty Images North America/Agence France-Presse Les groupes d'extrême droite étaient nombreux samedi au rassemblement de Charlottesville.

Galvanisée par les discours de campagne de Donald Trump et portée par l’audience illimitée des réseaux sociaux, une nouvelle génération d’extrême droite a surgi aux États-Unis, un essor illustré par les violences racistes qui viennent d’endeuiller Charlottesville.

« Ils agissent de concert en ce moment », souligne Spencer Sunshine, un analyste de l’organisation américaine Political Research Associates, spécialisée dans les groupes d’extrême droite. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard, souligne-t-il, si les manifestations de Charlottesville, en Virginie, avaient été convoquées le week-end dernier sous le mot d’ordre « rassembler la droite ».

C’est après ces rassemblements qu’un sympathisant néonazi a tué une jeune femme et blessé une vingtaine de personnes en fonçant en voiture dans une foule de contre-manifestants.

Retransmises dans le monde entier, les images montrant des néonazis et membres du Ku Klux Klan défilant dans la nuit à la lumière de leurs torches ou coiffés des cagoules pointues emblématiques du groupe, ont rappelé l’une des époques les plus sombres de l’histoire récente américaine. D’autres brandissaient des drapeaux confédérés, datant de la guerre de Sécession (1861-1865) et considérés comme des symboles racistes par beaucoup d’Américains.

Costume-cravate c. cagoule pointue

 

Au-delà de ces vestiges d’un autre temps émergent de nouvelles mouvances d’extrême droite surfant sur « la marée montante d’un racisme “trumpiste” » après des années de désuétude, selon Spencer Sunshine.

Surtout formés de jeunes hommes blancs déplorant leur poids décroissant dans une population de plus en plus cosmopolite, ces groupuscules compteraient des dizaines de milliers de membres et seraient forts du soutien de centaines de milliers d’autres dans ce pays de quelque 320 millions d’habitants, selon les observateurs. Le célèbre KKK ne dénombrerait lui plus que quelques milliers de membres.

Photo: Tasos Katopodis Archives Agence France-Presse Richard Spencer dirige le National Policy Institute, un centre de réflexion «dédié à l’héritage, l’identité et l’avenir des descendants d’Européens aux États-Unis».

Rebaptisée alt-right ou droite alternative, cette nouvelle extrême droite américaine revendique un nationalisme blanc centré sur les origines européennes supposées de la culture américaine. Une idéologie qui est entrée jusqu’au coeur même de la Maison-Blanche avec l’arrivée de Steve Bannon, devenu conseiller stratégique du président Donald Trump après l’avoir épaulé pendant la campagne. Ancien patron de Breitbart, cet homme érudit âgé de 63 ans avait en effet publiquement érigé ce site d’information en « plateforme de l’alt-right ».

Derrière cette vague dénomination de droite alternative, le groupe Southern Poverty Law Center (SPLC), spécialisé dans les mouvements extrémistes, voit « quasiment la même chose que la vieille droite prônant la suprématie blanche, même si elle préfère le costume-cravate aux habits du Klan ou aux faux uniformes nazis ».

Sympathies néonazies

 

Ils étaient nombreux samedi au rassemblement de Charlottesville, convoqué par Richard Spencer, le dirigeant d’un centre de réflexion basé à Washington, le National Policy Institute, « dédié à l’héritage, l’identité et l’avenir des descendants d’Européens aux États-Unis ».

Certains groupes invités affichent ouvertement leur identité néonazie, comme Vanguard America, dont les membres ont scandé les mots « sang et terre » faisant échos aux cris de « blut und boden » lancés par les partisans d’Adolf Hitler dans les années 1930, ainsi que d’autres, ouvertement antisémites, comme Identity Evropa et le Traditionalist Workers Party.

Se sont joints à eux des groupuscules particulièrement attachés à l’identité et aux symboles liés au sud confédéré. Pour Jason Kessler, un organisateur de Charlottesville, le retrait de la statue du général sudiste Robert E. Lee — qui a servi de prétexte au rassemblement — est ainsi synonyme d’un « génocide blanc ».

Photo: Chip Somodevilla Getty Images North America/Agence France-Presse Surtout formés de jeunes hommes blancs déplorant leur poids décroissant dans une population américaine de plus en plus cosmopolite, ces groupuscules compteraient des dizaines de milliers de membres.
 

Autre image marquante du rassemblement de Charlottesville : ces milices dites « patriotes » qui patrouillaient en gilet pare-balle et armées de fusils d’assaut.

Selon le SPLC, il en existe environ 165 à travers les États-Unis. Marquées par une profonde idéologie libertaire, elles seraient toutefois beaucoup plus concernées par le poids du gouvernement, ses lois et impôts, que par les questions raciales, certaines recrutant même des membres venues de minorités et dénonçant les sympathisants néonazis comme étant « antiaméricains ».

Selon Spencer Sunshine, elles n’ont d’ailleurs pas participé aux violences et se sont éloignées lorsque les troubles ont éclaté.

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