Presque tous les clandestins sont «expulsables», avise Washington

Un poste frontalier à San Ysidro, en Californie. «Trop longtemps, les agents d’immigration et des douanes ont eu les mains liées», a affirmé le porte-parole de la Maison-Blanche, Sean Spicer.
Photo: Justin Sullivan Getty Images / Agence France-Presse Un poste frontalier à San Ysidro, en Californie. «Trop longtemps, les agents d’immigration et des douanes ont eu les mains liées», a affirmé le porte-parole de la Maison-Blanche, Sean Spicer.

Le gouvernement américain a publié mardi de nouvelles directives appliquant les décrets du président Donald Trump et déclarant presque tous les 11 millions de clandestins présents aux États-Unis comme potentiellement expulsables, tout en excluant ceux arrivés enfants.

Dans deux directives, le secrétaire à la Sécurité intérieure, John Kelly, a ordonné aux agents des douanes et de l’immigration d’expulser aussi rapidement que possible tous les clandestins qu’ils trouveront dans l’exercice de leurs fonctions.

Le gouvernement définit sept niveaux de priorité pour les expulsions de clandestins, à commencer par ceux condamnés pour des délits ou des crimes. Mais la liste inclut aussi ceux qui sont simplement accusés de délits, et il est laissé à la libre appréciation des fonctionnaires l’évaluation du danger posé par un sans-papiers à l’ordre public ou à la sécurité nationale.

Les directives maintiennent en revanche pour l’instant la protection accordée par le président Barack Obama depuis 2012 aux sans-papiers arrivés enfants sur le territoire américain, dans le cadre d’un programme nommé Daca et dont 750 000 personnes bénéficient aujourd’hui.

Le sort de ces « Dreamers », comme ils sont surnommés, divise depuis des années les républicains, entre les réalistes qui reconnaissent la légitimité de leurs demandes de régularisation et les conservateurs partisans d’une ligne dure, inquiets de l’appel d’air potentiel de toute « amnistie ».

Donald Trump lui-même a exprimé sa compassion à l’égard de ces jeunes gens, qui peuvent aujourd’hui travailler légalement sans craindre d’être arrêtés. « Nous traiterons Daca avec coeur, a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse jeudi dernier. La situation de Daca est très, très difficile pour moi, car j’aime ces enfants, j’aime les enfants, j’ai des enfants et des petits-enfants. »

Carte blanche pour les policiers

 

Sous le gouvernement Obama, les agents d’immigration utilisaient leurs ressources limitées quasi exclusivement contre des personnes venant de traverser la frontière ou ayant été condamnées pour des crimes ou délits graves. Désormais, les policiers auront presque carte blanche pour cibler plus de clandestins.

Le message du nouveau pouvoir est qu’à part les « Dreamers », personne n’est à l’abri. « À de très rares exceptions près, le département n’exemptera aucune catégorie d’étrangers expulsables, affirme le gouvernement. Tous ceux qui ont violé les lois d’immigration peuvent faire l’objet de poursuites pouvant aller jusqu’à l’expulsion des États-Unis. »

La Maison-Blanche a martelé qu’il s’agissait là d’une concrétisation des promesses de campagne du candidat Trump. « La priorité, ce sont ceux qui représentent une menace pour ce pays », a ajouté Sean Spicer, porte-parole de l’exécutif, estimant à un million le nombre de personnes ayant déjà reçu d’un juge l’ordre de quitter le territoire.

« Trop longtemps, les agents d’immigration et des douanes ont eu les mains liées », a-t-il dit. Devant l’immense tâche, l’embauche de 5000 agents des douanes et de 10 000 agents d’immigration est promise.

Les directives assouplissent également les règles gouvernant l’expulsion immédiate des clandestins, alors que, sous le gouvernement Obama, seuls ceux arrivés depuis 14 jours et interpellés dans les régions frontalières étaient déclarés expulsables sans passer par la case justice.

Les associations de défense des immigrés ont condamné les textes et menacé de les contester en justice. L’ONG de défense des droits civiques ACLU a décrit la nouvelle politique comme en étant une d’expulsions de masse, un terme contesté par l’exécutif.

Antisémitisme dénoncé

Washington — Après avoir esquivé le sujet pendant plusieurs jours, Donald Trump a clairement dénoncé mardi les menaces « horribles » visant la communauté juive après une série d’incidents contre des centres communautaires ces dernières semaines aux États-Unis. Profitant de sa première visite du musée de l’histoire afro-américaine de Washington, inauguré il y a moins de six mois par son prédécesseur Barack Obama, le président américain a appelé à combattre « le sectarisme, l’intolérance et la haine sous toutes ses formes ». Mettant en avant mardi un message d’unité — « Nous allons rassembler ce pays » —, le président américain a explicitement condamné la multiplication de fausses alertes à la bombe dans des centres juifs communautaires, qui font l’objet d’une enquête du FBI. Agence France-Presse

Une expulsion se solde par un suicide

Tijuana — Un Mexicain s’est suicidé quelques minutes seulement après avoir été expulsé des États-Unis, se jetant du haut d’un pont à Tijuana, au nord-ouest du Mexique, ont annoncé mardi les autorités locales. L’homme, qui avait été expulsé des États-Unis vers 08h20, « s’est jeté du haut d’un pont » situé à seulement quelques mètres de la frontière, a expliqué le responsable local de la sécurité publique, Marco Antonio Sotomayor. Il s’agirait de Guadalupe Olivas Valencia, âgé de 44 ans, natif de l’État de Sinaloa, dans le nord-ouest du Mexique, un État déchiré par les violences liées au narcotrafic. Selon des témoins, cet homme semblait très « angoissé après avoir été expulsé dans cette ville où il ne connaissait personne », a relaté à l’AFP un pompier sous le couvert de l’anonymat. Un fonctionnaire proche du dossier a indiqué qu’il s’agissait de sa troisième expulsion. Agence France-Presse


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